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12fév17


Loi n° 2007-05 modifiant le Code de la Procédure pénale relative à la mise en oeuvre du Traité de Rome instituant la Cour pénale internationale


EXPOSE DES MOTIFS

Le présent projet de loi a pour objectif de définir les relations du Sénégal avec la Cour pénale internationale. Le principe primordial du statut de Rome portant création d'une juridiction pénale internationale permanente est sa complémentarité avec les juridictions nationales et les liens affirmes avec ces dernières.

Pour permettre une coopération pleine et entière dans les enquêtes et poursuites, les crimes du statut de Rome sont intégrés dans le code pénal en vue de servir également pour la poursuite et le jugement des auteurs et complices des infractions graves qui de ce fait sont imprescriptibles.

Le principe de la souveraineté territoriale qui veut que tout Etal ait le droit d'exercer une juridiction exclusive sur ses nationaux et sur les étrangers vivant sur son territoire est battu en brèche par la règle de la «compétence universelle». La compétence extraterritoriale retenue est commandée par l'obligation du Sénégal de réprimer les infractions graves telles que définies par tes conventions de Genève de 1949 et leur protocole I et par d'autres instruments juridiques internationaux de même que les actes de terrorisme indépendamment du lieu où l'infraction a été commise, de la nationalité de son auteur pour peu que celui-ci ou la victime réside au Sénégal.

Les trois mécanismes de coopération sont : l'entraide, l'arrestation et la remise ainsi que d'autres formes de collaboration. L'entraide internationale répressive, qui est une technique de relation classique entre Etats, est raffermie dans les rapports entre le Sénégal et la juridiction internationale. L'arrestation et la remise se rapprochent des procédures d'extradition avec le renforcement des garanties des droits de la défense. Par contre certains aspects de la coopération avec la Cour pénale internationale telle la collecte des preuves longtemps après la commission des faits peuvent s'avérer difficiles.

Le réaménagement législatif opéré conféré au procureur général près la Cour d'appel de Dakar, à la chambre d'accusation de ladite cour l'exclusivité de l'exécution des actes requis.-Cette centralisation poussée est dictée par le souci d'une plus grande efficacité.

Une nouvelle problématique est introduite : la protection des victimes et témoins quand cela est nécessaire.

Sur un autre plan, avec l'abolition de la peine de mort les dispositions de l'article 684 sont devenues sans objet d'où l'opportunité de leur abrogation.

Telle est l'économie du présent projet de loi.

L'Assemblée nationale a adopté, en sa séance du mercredi 31 janvier 2007 ;

Le Président de la République promulgue de loi dont la teneur suit :

Article premier. - Il est ajouté à l'article 7 du Code de Procédure pénale un alinéa 4 ainsi rédigé :

    « les crimes définies aux articles 431-1, 431-2, 431-3 et 431-5 du code pénal sont par leur nature imprescriptibles.

Art. 2. - l'article 669 du Code de Procédure pénale est modifié comme suit :

    « Tout étranger qui, hors du territoire de la République s'est vu reproché d'être l'auteur ou le complice d'un des crimes visés aux articles 431-1 à 431-5 du code pénal, d'un crime ou délit d'attentat à la sûreté de l'Etat ou de contrefaçon du sceau de l'Etat, des monnaies nationales ayant cours ou d'actes visés aux articles 279-1 à 279-3, 295-1 du code pénal peut être poursuivi et jugé d'après les dispositions des lois sénégalaises ou applicables au Sénégal, s'il se trouve sous la juridiction du Sénégal ou si une victime réside sur le territoire de la République du Sénégal, ou si le gouvernement obtient son extradition ».

Art. 3 - Il est ajouté au Livre quatrième du code de procédure pénale un titre XIV ainsi rédigé :

    Titre XIV : Des relations avec la Cour pénale internationale.

    Chapitre premier. - De l'entraide judiciaire

    Article 677-1. - l'entraide entre le Sénégal et la Cour pénale internationale vise :

    1- le recueil de témoignages ou de dépositions ;

    2- l'identification d'une personne, le lieu où elle se trouve ou la localisation des biens ;

    3- la demande d'une aide pour la mise à la disposition des autorités judiciaires requérantes de personnes détenus ou d'autres personnes aux fins de témoignage ou d'aide dans la conduite de l'enquête ;

    4- le rassemblement d'éléments de preuve y compris les dépositions faites sous serment et la production d'éléments de preuve, y compris les expertises et les rapports dont l'autorité judiciaire a besoin ;

    5- l'interrogatoire des personnes faisant l'objet d'une enquête ou d'une procédure ;

    6- l'examen des localités notamment l'exhumation et l'examen de cadavres enterrés dans des fosses communes ;

    7- l'exécution des perquisitions et saisies ;

    8- la fourniture et la transmission de documents et de dossiers originaux ou les copies certifiées conformes ;

    9- la protection des victimes et la représentation des éléments de preuve ;

    10- l'identification, la localisation, le gel ou la saisie de produits des crimes, des biens, des avoirs et des instruments qui sont liés aux crimes, aux fins de leur confiscation éventuelle sans préjudice des droits des tiers de bonne foi ;

    11- et toute autre forme d'assistance qui ne serait pas incompatible avec l'ordre public national.

    Article 677-2. - les demandes d'entraide judiciaire sont envoyées ou reçues par le ministre chargé de la justice.

    Toute les mesures doivent être prises afin de respecter le caractère confidentiel des demandes d'entraide judiciaire et des pièces justificatives y afférentes dans la mesure où la divulgation est nécessaire pour donner suite à la demande.

    Le procureur général près la Cour d'appel de Dakar est chargé de l'exécution de la demande sur l'ensemble du territoire de la République. En cas d'urgence il peut être saisi directement des demandes en copies certifiées conformes, par tout moyen laissant des traces écrites.

    Les originaux sont ensuite transmis dans les formes prévues à l'alinéa premier du présent article.

    Article 677-3 - Les autorités judiciaires requises sont tenues de respecter les conditions dont la Cour pénale internationale assortit l'exécution des demandes.

    Article 677-4 - Lorsque l'exécution des demandes soulève des difficultés qui l'empêchent ou la gênent, le procureur général près la Cour d'appel de Dakar consulte la Cour pénale internationale sans tarder en vue de régler la question.

    Article 677-5 - L'entraide ne peut être refusée que pour des motifs prévus par les stipulations du statut de Rome.

    Article 677-6 - Toute demande d'entraide judiciaire est faite en langue française, par écrit et comporte :

    - le nom de l'autorité requérante :

    - l'indication de l'objet de la demande et une brève description de la demande, un exposé des faits allégués qui constituent une infraction, les dispositions juridiques applicables ou l'indication de ces dispositions ;

    - l'exposé des motifs et l'explication détaillée des procédures ou des conditions à respecter ;

    - tout autre renseignement utile pour que l'assistance demandée puisse être fournie.

    Chapitre II. - De l'arrestation et de la remise

    Article 667-7 - Une demande d'arrestation et de remise est présentée accompagnée des pièces justificatives ci-après :

    1º) si la demande concerne l'arrestation et la remise d'une personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt délivré par la chambre préliminaire de la Cour pénale internationale en vertu de l'article 8 du statut de Rome :

    - le signalement de la personne recherchée ;

    -l'original ou une copie du mandat d'arrêt en cas d'urgence ;

    2° si la demande concerne l'assistance et la remise d'une personne déjà reconnue coupable, elle contient ou est accompagnée des pièces suivantes :

    - l'original ou une copie du mandat d'arrêt en cas d'urgence ;

    - une copie certifiée conforme de la décision judiciaire ;

    - des indications sur le temps de détention déjà accompli et le temps restant à accomplir.

    Article 677-8 - Si lors de son arrestation provisoire, l'intéressé consent à être remis à la Cour pénale internationale, il y est procédé avant que la demande de remise et les pièces justificatives visées à l'article 667-7 du présent code soient reçues.

    Article 677-9 - Si dans les soixante jours qui suivent l'arrestation provisoire la chambre d'accusation de la Cour d'appel de Dakar ne reçoit pas les pièces justificatives, elle ordonne d'office ou sur requête l'élargissement de la personne concernée.

    Article 677-10 - La chambre d'accusation de la Cour d'appel de Dakar vérifie que le mandat d'arrêt vise la personne arrêtée, que celle-ci a été arrêtée selon la procédure régulière et que ses droits ont été respectés, faute de quoi la personne arrêtée est remise en liberté.

    Article 677-11 - Le président de la chambre d'accusation de la Cour d'appel de Dakar avise la chambre préliminaire de la Cour pénale internationale dès qu'une demande de mise en liberté provisoire a été présentée. La chambre préliminaire de la Cour pénale internationale doit statuer dans un délai maximum de huit jours.

    Avant de statuer sur la demande de mise en liberté provisoire, la chambre d'accusation de la Cour d'appel de Dakar prend en considération les recommandations de la chambre préliminaire de la Cour pénale internationale.

    Article 677-12 - Lorsqu'elle se prononce, la chambre d'accusation de la Cour d'appel de Dakar examine si, eu égard à la gravité des crimes allégués, l'urgence et des circonstances exceptionnelles justifient la mise en liberté provisoire. Dans ce cas elle fixe les conditions qui permettent de s'assurer que la personne peut être remise à la Cour pénale internationale.

    Article 677-13 - Si la personne poursuivie conteste la compétence de la Cour pénale internationale, la remise est ajournée jusqu'à ce que ladite juridiction ait rendu sa décision.

    Article 677-14 - le procureur général près de la Cour d'appel de Dakar procède à la remise de la personne poursuivie ainsi qu'à la transmission des objets et valeurs saisis.

    Le procureur général près la Cour d'appel de Dakar prend les mesures nécessaires en vue de la remise après entente avec la Cour pénale internationale.

    Article 677-15 - Le transit sur le territoire national d'une personne transférée à la Cour pénale internationale est autorisé par le ministre chargé de la justice conformément à l'article 89 de statut de Rome.

    Article 677-16 - La procédure est régie à tous autres égards par les dispositions de la loi n° 71-77 du 28 décembre 1971 relative à l'extradition.

    Chapitre III. - Des autres formes d'entraide judiciaire

    Article 677-17 - Toute personne détenue sur le territoire national peut, si elle y convient être transférée temporairement à la Cour pénale internationale aux tins d'identification ou d'audition ou pour l'accomplissement de tout autre acte d'instruction.

    Article 677-18 - Lorsque le procureur de la Cour pénale internationale veut exécuter des actes à l'article 99/4 du statut de Rome sur le territoire national, il en avise immédiatement le procureur général près la Cour d'appel de Dakar qui peut proposer l'exécution desdits actes s'ils peuvent l'être dans les mêmes délais et selon les mêmes modalités définies en réponse à la demande d'assistance.

    A la demande expresse de la Cour pénale internationale, le procureur général près la Cour d'appel de Dakar peut ordonner, dans les vingt quatre heures, des mesures provisoires en vue de maintenir la situation existante, de protéger des intérêts juridiques menacés ou de préserver des éléments de preuve ou d'assurer la protection des témoins et des victimes.

    S'il y a péril en la demeure, le procureur généra près de la Cour d'appel de Dakar peut d'office prendn les mesures provisoires qu'il détermine. Il consulte h Cour pénale internationale dans les meilleurs délais ei vue de la suite à y donner.

    Article 677-19 - En application de l'article 14 di statut de Rome, le procureur général près la Coui d appel de Dakar peut déférer à la Cour pénale internationale une situation dans laquelle un ou plusieurs crimes relevant de la Cour pénale internationale paraissent avoir être commis et prier le procureur de la Coin pénale internationale d'enquêter sur cette situation en vue de déterminer si une ou plusieurs personnes identifiées doivent être accusées de ces crimes.

    Dans ce cas le procureur général près la Cour d'appel de Dakar indique, dans la mesure du possible, les circonstances de l'affaire et produit les pièces dont il dispose.

    Article 677-20 - La Cour pénale internationale jouit sur le territoire de la République du Sénégal des privilèges et immunités nécessaires à l'accomplissement de sa mission.

    Les juges, le procureur, les procureurs adjoints et le greffier jouissent, dans l'exercice de leurs fonctions ou relativement à ces fonctions, des privilèges et immunités accordés aux chefs de missions diplomatiques. Après l'expiration de leur mandat, ils continuent à jouir de l'immunité contre toute procédure légale.

La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat

Fait à Dakar, le 12 février 2007.

Abdoulaye WADE.

Par le Président de la République

Le Premier Ministre,
Macky SALL.


[Source: Journal Officiel de la République du Sénégal, Dakar, pp. 2384-2386, 10mar17]


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