Crime d'agression
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25juin13


Rapport explicatif sur les amendements des 10 et 11 juin 2010 au Statut de Rome de la Cour pénale internationale relatifs au crime d'agression et aux crimes de guerre


Table des matières

Condensé

1 Présentation de l'objet

2 Commentaires des disposition des amendements

3 Conséquences

4 Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies nationales du Conseil fédéral

5 Aspects juridiques


Condensé

Le présent projet porte sur la ratification de deux amendements apportés au Statut de Rome de la Cour pénale internationale : l'ajout du crime d'agression et l'élargissement de la définition des crimes de guerre - tous deux adoptés à la Conférence de révision de Kampala (Ouganda) en juin 2010.

Crime d'agression

L'interdiction générale du recours à la force est l'une des règles les plus fondamentales des rapports entre Etats. Elle figure dans la Charte de l'ONU, et constitue désormais une norme du droit international impératif. Pourtant, cette règle reste encore trop souvent transgressée de nos jours, même si le nombre des conflits armés interétatiques a diminué depuis la Seconde Guerre mondiale. Du fait de l'ajout du crime d'agression, l'interdiction du recours à la force est maintenant aussi traduite dans le domaine de la responsabilité pénale individuelle: les plus hauts dirigeants d'un pays pourront désormais être poursuivi personnellement devant la Cour pénale internationale pour de graves infractions à l'interdiction du recours à la force.

Le précurseur du crime d'agression a été le crime contre la paix, pour lequel plusieurs personnes ont été condamnées au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, dans les procès de Nuremberg et de Tokyo. Après quoi, les Etats ne sont pas parvenus pendant des décennies à s'entendre sur une définition du crime d'agression, pas même lors de l'adoption du Statut de Rome de la Cour pénale internationale en 1998. La percée a finalement eu lieu à la Conférence de révision de Kampala en 2010; la Suisse a consacré à ce processus des efforts importants.

La Suisse a tout intérêt à ratifier l'amendement relatif au crime d'agression. Certains considèrent l'agression comme le crime le plus grave, car le recours injustifié à la force entraîne souvent dans son sillage des actes très graves, comme des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité. Criminaliser l'agression est donc un moyen important pour promouvoir la coexistence pacifique des peuples et le respect des droits de l'homme, et soulager les populations vivant dans le besoin et la pauvreté - valeurs fondamentales de la Suisse et objectifs de politique extérieure de premier plan ancrés dans la Constitution fédérale. En tant qu 'Etat neutre, ayant été membre de de la Société des Nations, ayant adhéré en 1929 au pacte Kellogg-Briand condamnant le recours à la guerre, puis avec son entrée aux Nations Unies en 2002, la Suisse a réaffirmé son soutien à l'interdiction du recours à la force : la ratification des dispositions relatives au crime d'agression s'inscrit donc dans le droit fil de sa politique extérieure. La répression de l'agression a aussi des effets bénéfiques en ce qui concerne la sécurité et a souveraineté territoriale de la Suisse. La ratification aura un effet dissuasif sur des velléités d'agression; elle contribuera par ailleurs au maintien de la paix et de la sécurité au niveau régional comme international, ce qui aura des répercussions indirectes pour la Suisse.

La répression du crime d'agression couvre la planification, la préparation, le lancement ou l'exécution d'un acte d'agression constituant une violation manifeste de la Charte des Nations Unies. Le caractère manifeste de l'infraction dépend de la nature, de la gravité et de l'ampleur de l'acte. Sont seules punissables les personnes effectivement en mesure de contrôler ou de diriger l'action politique ou militaire d'un Etat (crime dit « de dirigeant »).

La compétence de la Cour pénale internationale est en principe limitée aux actes d'agression entre Etats parties au Statut de Rome. Il faut que soit l'Etat partie dont l'agresseur est un ressortissant, soit l'Etat agressé ait ratifié l'amendement relatif au crime d'agression. Un Etat partie au Statut peut pourtant aussi déposer une déclaration déclinatoire indiquant qu 'il ne reconnaît pas la compétence de la Cour. Les restrictions susmentionnées ne sont toutefois pas applicables si le Conseil de sécurité saisit la Cour. Quoi qu 'il en soit, cette dernière ne pourra exercer sa compétence que dans le futur : il faudra tout d'abord que 30 Etats aient ratifié l'amendement relatif au crime d'agression, puis que l'Assemblée des Etats parties adopte - après le 1er janvier 2017 - une décision autorisant la Cour à exercer sa compétence sur le crime d'agression.

Dans l'état actuel des choses, le Conseil fédéral ne souhaite pas transposer le crime d'agression dans le droit pénal suisse. La répression d'un crime d'agression entraînerait un jugement sur les actes d'autres Etats recourant à la force : il vaut donc mieux attendre de connaître les effets concrets de l'amendement apporté au Statut de Rome au niveau de la Cour pénale internationale, ainsi que l'approche qu'adopteront d'autres Etats. Cela n'empêche nullement la Suisse de coopérer pleinement avec la Cour en matière de crime d'agression sur la base de sa législation actuelle, et donc de se conformer d'ores et déjà aux exigences du Statut de Rome modifié.

Elargissement de la définition des crimes de guerre

Aux fins du Statut de Rome adopté en 1998, le fait d'employer du poison ou des armes empoisonnées, des gaz asphyxiants, toxiques ou similaires, ainsi que tous liquides, matières ou procédés analogues, de même que le fait d'utiliser des balles qui s'épanouissent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain (dum-dum) sont des crimes de guerre uniquement dans le cadre de conflits armés internationaux. Depuis l'adoption de ce texte, de plus en plus de voix s'élèvent pour demander que cette interdiction soit étendue aux conflits armés non internationaux. Les Etats parties au Statut de Rome ont fini par adopter en 2010 l'élargissement correspondant de la définition des crimes de guerre.

La Suisse estime qu'il faut s'en féliciter, car le caractère du conflit ne change rien à la gravité de ces actes ni aux souffrances des victimes. Ces amendements améliorent la protection des civils et des personnes impliquées dans les hostilités.

L'amendement du Statut de Rome relatif aux crimes de guerre n'entraîne pas de modification du droit pénal suisse, qui, contrairement au Statut de Rome, ne fait en principe pas de distinction entre les conflits armés internationaux et non internationaux et punit d'ores et déjà en droit interne les actes de cette nature dans un cas comme dans l'autre.

Rapport explicatif

1 Présentation de l'objet

1.1 La Cour pénale internationale et la Conférence de révision de Kampala (2010)

La Cour pénale internationale (ci-après désignée par « la Cour » ou « la CPI ») est une institution permanente, dont le siège se trouve à La Haye, qui est compétent pour juger les auteurs des crimes les plus graves affectant la communauté internationale dans son ensemble : les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité, le génocide, et à l'avenir le crime d'agression, une fois que la compétence de la Cour à l'égard de ce crime aura été activée. Le texte fondateur de la Cour en droit international est le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (« Statut de Rome ») |1| adopté le 17 juillet 1998 dans la capitale italienne, et que la Suisse a ratifié le 12 octobre 2001. Il est entré en vigueur le 1er juillet 2002, après avoir été ratifié par 60 Etats. |2| Actuellement, 122 Etats sont parties au Statut de Rome (état le 6 juin 2013). |3|

Le Statut de Rome prévoit au par. 1 de son art. 123 la convocation d'une conférence de révision pour examiner tout amendement au Statut. Cette conférence a eu lieu du 31 mai au 11 juin 2010 à Kampala (Ouganda). Elle a abouti à l'adoption de deux amendements indépendants du Statut :

    - définition du crime d'agression et des conditions d'exercice de la compétence de la Cour à cet égard (résolution RC/Res.6 du 11 juin 2010) ;

    - élargissement de l'art. 8 relatif aux crimes de guerre (résolution RC/Res.5 du 10 juin 2010).

1.2 Crime d'agression

1.2.1 Faire respecter l'interdiction générale du recours à la force dans l'intérêt de la paix et de la sécurité ainsi que de la protection des droits de l'homme

En cette première moitié du XXe siècle, une des règles les plus fondamentales de la coexistence entre les Etats a été établie au lendemain des horreurs commises lors des deux guerres mondiales : l'interdiction du recours à la force. La communauté internationale avait pris conscience de la nécessité de prévenir les conflits armés, car au-delà de compromettre la paix et la sécurité, ils donnent lieu à de très graves violations des droits de l'homme, ainsi qu'à de terribles souffrances pour les personnes affectées. |4|

L'interdiction du recours à la force a beau être un principe fondamental de la Charte des Nations Unies, elle-même universellement acceptée |5|, et constituer une norme impérative du droit international |6|, de nombreux conflits armés interétatiques montrent à quel point il est difficile de la faire respecter. Le Conseil de sécurité de l'ONU et la Cour internationale de justice (à ne pas confondre avec la Cour pénale internationale) |7| sont habilités depuis 1945 à constater un acte d'agression, mais ce constat ne porte que sur les manquements des entités abstraites que sont les Etats (responsabilité des Etats). Au fil du temps s'est imposée l'idée que les actes d'agression émanent en fin de compte de personnes dotées du pouvoir de les ordonner, et que c'est à ce niveau individuel qu'il faut avant tout lutter contre ces actes.

La criminalisation de l'agression vise donc au meilleur respect de l'interdiction du recours à la force, car elle permettra de traduire en justice les personnes mêmes qui, au sommet de l'Etat, l'ont enfreinte. Elle souligne la force obligatoire de l'interdiction du recours à la force dans les rapports entre Etats, permet de punir ceux qui se rendent coupables d'infractions à cet égard, et contribue par son effet dissuasif à la prévention des actes d'agression et de leurs répercussions sur les personnes affectées.

La Suisse a tout intérêt à ratifier l'amendement relatif au crime d'agression. La répression de l'agression est un moyen de faire respecter des valeurs fondamentales de la politique extérieure et de la politique de paix de la Suisse. Elle contribue en particulier de manière importante à promouvoir la coexistence pacifique des peuples et le respect des droits de l'homme, et à soulager les populations dans le besoin et dans la pauvreté - objectifs de premier plan de la politique extérieure de la Suisse ancrés dans la Constitution fédérale. |8| La ratification s'impose par ailleurs du fait qu'elle s'inscrit dans le droit fil de la tradition humanitaire de la Suisse et de son engagement au service de la prévention et du règlement des conflits armés ainsi que du maintien durable de la paix |9|. Elle va également dans le sens de la sécurité et de la souveraineté territoriale de la Suisse par son effet dissuasif sur toute velléité d'agression et en contribuant à la paix et à la sécurité régionales comme internationales - ce qui présente des avantages indirects pour la Suisse.

L'interdiction du recours à la force est une préoccupation fondamentale de la Suisse, comme le montre toute une série d'engagements internationaux qu'elle a contractés au fil du temps :

    - elle a adhéré en 1910 aux conventions de La Haye concernant les droits et les devoirs des puissances et des personnes neutres refusant leur aide à des belligérants dans la conduite de la guerre |10| ;

    - elle a adhéré en 1920 à la Société des Nations, dont la principale mission était de préserver la paix ;

    - elle a adhéré en 1929 au Pacte Briand-Kellogg, par lequel les Etats parties condamnaient le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux, et y renonçaient en tant qu'instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles |11| ;

    - elle a adhéré en 2002 aux Nations Unies, organisation à la base d'un système de sécurité collective fondé sur le principe général de l'interdiction du recours à la force |12|.

La répression pénale de l'agression par le biais d'un accord international est un grand pas en avant pour le droit international et comble une lacune très importante pour la Suisse, qui lutte depuis de nombreuses années contre l'impunité. La ratification de cet amendement par la Suisse contribue de manière importante au respect de l'interdiction du recours à la force, et ainsi, au maintien de la paix et de la sécurité, au respect des droits de l'homme et à la protection de la souveraineté territoriale.

1.2.2 Rappel historique

C'est dans la Charte des Nations Unies qu'est ancré depuis 1945 le principe général de l'interdiction du recours à la force : « Les Membres de l'Organisation s'abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de tout Etat, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies. » |13| Cette disposition fondamentale du droit international s'applique exclusivement aux Etats.

A l'issue de la Seconde Guerre mondiale, des individus ont aussi été sommés de rendre des comptes pour des agressions commises par un Etat. De nombreuses personnes ont été inculpées de « crime contre la paix » et condamnées par les tribunaux militaires internationaux de Nuremberg et de Tokyo. Les éléments constitutifs de ce crime étaient notamment la direction, la préparation, le déclenchement ou la poursuite d'une guerre d'agression, ou d'une guerre en violation des traités, assurances ou accords internationaux. |14| Des efforts ont été déployés au lendemain des procès de Nuremberg et de Tokyo pour codifier de façon permanente le « crime contre la paix » en droit international |15|. Mais le but s'est révélé politiquement hors d'atteinte pendant longtemps. L'Assemblée générale des Nations Unies a défini plus précisément en 1974 ce qui caractérise l'acte d'agression commis par un Etat |16|, mais sans qu'il soit possible aux Etats de s'entendre sur la définition d'un crime entraînant une responsabilité individuelle.

Même lors des négociations ayant conduit à l'adoption du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, en 1998, il s'est révélé impossible de rapprocher les positions sur la définition de l'agression en tant que crime imputable à un individu. Les divergences portaient sur la définition du crime, mais aussi sur le rôle à attribuer au Conseil de sécurité de l'ONU quant à la question de savoir si un acte d'agression est imputable à un Etat. La Conférence de Rome a donc décidé de mentionner dans le Statut le « crime d'agression » |17|, comme il était maintenant nommé, mais en reportant dans un premier temps la compétence de la Cour à cet égard jusque à ce que le crime d'agression soit défini et les conditions d'exercice de la compétence de la Cour fixées |18|.

Les Etats ont confié cette tâche à la Commission préparatoire de la CPI. Celle-ci a elle-même créé un Groupe de travail sur le crime d'agression (« Working Group on the Crime of Aggression »), qui s'est réuni de 1999 à 2002 et a publié le 11 juillet 2002 un document de travail réunissant les propositions des Etats |19|.

A l'entrée en vigueur du Statut de Rome, le 1er juillet 2002, l'Assemblée des Etats parties a constitué un Groupe de travail spécial sur le crime d'agression (« Special Working Group on the Crime of Aggression ») , chargé de poursuivre les travaux antérieurs et de les mener à leur terme. Il a fonctionné entre 2002 et 2009, et réunissait des représentants des Etats parties, mais aussi d'Etats non parties ainsi que des scientifiques et des membres de la société civile. Le groupe a remis les résultats de ses travaux en février 2009. |20| Un accord avait été obtenu sur la définition du crime d'agression, mais pas sur la question de la compétence de la Cour. L'Assemblée des Etats parties a finalement adopté par consensus en novembre 2009 les propositions du Groupe de travail spécial comme base de négociation pour la Conférence de révision.

1.2.3 Déroulement des négociations à la Conférence de révision

La Conférence de révision s'est tenue à Kampala du 31 mai au 11 juin 2010 avec la participation de 4600 délégués de 87 Etats parties, de 32 Etats non parties (dont les Etats-Unis d'Amérique, la Russie et la Chine), ainsi que d'un grand nombre d'organisations intergouvernementales et non gouvernementales.

Comme le Groupe de travail spécial était déjà parvenu à un accord sur la définition du crime d'agression avant même la Conférence, la négociation a principalement porté sur l'exercice de la compétence de la Cour. |21|

Le rôle du Conseil de sécurité est la question qui a suscité le plus de débats. Plusieurs Etats, dont les membres permanents du Conseil de sécurité, ont fait valoir que l'art. 39 de la Charte de l'ONU |22| prévoit que le Conseil de sécurité constate l'existence d'un acte d'agression. Ce groupe d'Etats estimait que la Cour ne pourrait exercer sa compétence à l'égard d'un crime d'agression que si la situation en question lui était déférée par le Conseil de sécurité, comme prévu à l'art. 13, let. b, du Statut de Rome. Un autre groupe d'Etats, dans lequel figurait la Suisse, souhaitait que la Cour puisse aussi exercer sa compétence, comme pour les autres crimes définis dans le Statut de Rome, dès lors que la situation lui est déférée par un Etat partie (art. 13, let. a), ou si le Procureur ouvre une enquête de sa propre initiative (art. 13, let. c).

Les amendements relatifs au crime d'agression ont finalement été adoptés par consensus au prix d'un certain nombre de compromis. Ainsi, la Cour ne pourra exercer sa compétence à l'égard du crime d'agression que lorsque 30 Etats auront ratifié l'amendement correspondant du Statut de Rome, et sous réserve que l'Assemblée des Etats parties entérine cette compétence par une décision subséquente qui ne peut être prise qu'après le 1er janvier 2017. En cas de saisine de la Cour par un Etat partie ou d'enquête du Procureur de sa propre initiative, un Etat partie conservera toutefois la possibilité de se soustraire à la compétence de la Cour en déposant une déclaration déclinatoire.

La délégation suisse a contribué de manière importante au succès de cette négociation. Elle a soumis avec l'Argentine et le Brésil une proposition informelle de compromis contenant des idées qui n'avaient encore jamais été explorées, et qui a relancé une négociation qui se trouvait dans l'impasse. |23| C'est ainsi qu'a été obtenu le 11 juin 2010 un résultat jugé hors de portée quelques jours à peine auparavant : la Conférence de révision de Kampala a adopté par consensus la définition du crime d'agression et les conditions d'exercice de la compétence de la Cour à cet égard.

1.2.4 Résultat de la négociation et récapitulatif des amendements

Eléments constitutifs du crime d'agression (art. 8bis du Statut de Rome)

La définition du crime d'agression adoptée à la Conférence de révision de Kampala a deux composantes.

Tout d'abord, le crime d'agression présuppose une agression commise par un Etat. La définition de l'acte d'agression est celle qu'a donnée l'Assemblée générale de l'ONU en 1974 dans sa résolution 3314 (XXIX) |24| : « l'emploi par un Etat de la force armée contre la souveraineté, l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un autre Etat, ou de toute autre manière incompatible avec la Charte des Nations Unies » |25|. Pour constituer un crime d'agression, il faut en outre que l'acte, « par sa nature, sa gravité et son ampleur, constitue une violation manifeste de la Charte des Nations Unies ». |26| En d'autres termes, un individu ne peut pas commettre de crime d'agression sans qu'un Etat ait commis un acte d'agression qualifié, ce qui exclut d'emblée les agressions dont la caractérisation se trouve juridiquement dans une zone grise.

Ensuite, outre que l'acte d'agression doit avoir été commis par un Etat, le crime d'agression doit émaner d'un individu, « une personne effectivement en mesure de contrôler ou de diriger l'action politique ou militaire d'un Etat », précise la définition adoptée. |27| Il s'agit donc d'un « crime de dirigeant », que seul un petit nombre de personnes sont en mesure de commettre. Les actes incriminés (« la planification, la préparation, le lancement ou l'exécution » |28|) sont presque littéralement repris de la définition du « crime contre la paix » figurant dans les statuts des tribunaux militaires internationaux de Nuremberg et de Tokyo. |29|

Exercice de la compétence (art. 15bis et 15ter du Statut de Rome)

La question la plus controversée, on l'a vu, était celle des conditions d'exercice de la compétence de la Cour à l'égard du crime d'agression. Le dispositif adopté reprend les trois mécanismes de saisine de la Cour applicables aux autres crimes couverts par le Statut de Rome : renvoi par un Etat partie, enquête du Procureur de sa propre initiative ou renvoi par le Conseil de sécurité. |30| Sur cette base, deux questions subsistaient.

Il fallait tout d'abord clarifier les rapports entre le Conseil de sécurité et la CPI : La Cour ne pourrait-elle exercer sa compétence qu'une fois que le Conseil de sécurité aurait constaté l'acte d'agression en vertu de l'art. 39 de la Charte des Nations Unies ? Telle était en fait la proposition des membres permanents du Conseil de sécurité. Elle revenait à faire dépendre la compétence de la CPI d'une décision politique du Conseil. La solution finalement adoptée prévoit en revanche que le Conseil doit être consulté, mais que la Cour peut entamer la procédure si le Conseil n'a pas fait la constatation de l'acte d'agression dans un délai de six mois. |31| Il est d'ailleurs à noter que la Cour n'est pas liée par un éventuel constat du Conseil. |32|

La seconde question à régler était de savoir quels Etats devraient avoir ratifié l'amendement relatif au crime d'agression pour que la Cour puisse exercer sa compétence. L'exercice de cette compétence nécessiterait-il l'accord de l'Etat agresseur comme de l'Etat agressé (régime cumulatif), ou l'accord de l'un des deux suffirait-il (régime alternatif) ? Les positions étaient divisées sur ce point. |33| Le compromis finalement adopté est le suivant : il se fonde sur l'art. 12 du Statut, qui dit que la Cour peut exercer sa compétence lorsque la personne accusée du crime est un ressortissant d'un Etat partie, ou alors si le crime a été commis sur le territoire d'un Etat partie. Pour le crime d'agression, ce principe veut dire qu'il suffit que l'un des deux Etats (agresseur ou agressé) ait ratifié les amendements (régime alternatif). Mais deux exceptions ont été ajoutées à l'art. 15bis dès lors qu'un Etat partie défère une situation ou que le Procureur lance une enquête de sa propre initiative (pour le renvoi par le Conseil de sécurité, voir plus bas).

    - Première exception : la Cour ne peut exercer sa compétence quand le crime d'agression est commis par des ressortissants d'un Etat qui n'est pas partie au Statut de Rome ou sur le territoire d'un tel Etat. |34| Si l'Etat agresseur ou l'Etat agressé n'est pas partie au Statut, la Cour n'a donc pas de compétence.

    - Seconde exception : un Etat partie peut, à titre préventif, déclarer qu'il ne reconnaît pas la compétence de la Cour à l'égard du crime d'agression au cas où il commettrait lui-même un acte d'agression (déclaration dite « déclina-toire »). |35| On peut penser que les obstacles politiques au dépôt d'une telle déclaration seraient relativement importants.

Ce résultat constitue une solution fondée sur le consensus, étant donné que l'art. 15bis prévoit que la Cour n'exerce pas sa compétence sur les Etats non parties et que les Etats parties peuvent déposer une déclaration déclinatoire. Cela dit, l'accord tacite de l'Etat agresseur (qu'il signifie en ne déposant pas de déclaration déclinatoire) suffit si l'Etat victime a ratifié l'amendement relatif au crime d'agression. |36|

L'art. 15ter prévoit que les restrictions ci-dessus ne s'appliquent pas au cas où la situation est déférée à la Cour par le Conseil de sécurité. Comme pour les autres crimes du Statut de Rome, le Conseil de sécurité peut saisir la Cour d'une situation concernant un Etat partie comme un Etat non partie. |37| Le caractère obligatoire de la résolution du Conseil rendrait sans effets toute éventuelle déclaration déclinatoire.

Quel que soit le mécanisme de saisine, la Cour ne pourra exercer sa compétence qu'à compter de 2017 au plus tôt. De plus, il faudra que 30 Etats au moins aient ratifié l'amendement relatif au crime d'agression, et que l'Assemblée des Etats parties ait activé la compétence de la Cour par une décision prise par consensus ou à la majorité des deux tiers des Etats parties. |38|

Eléments des crimes et éléments d'interprétation

Avec l'amendement du Statut de Rome relatif au crime d'agression, la Conférence de révision a également adopté des « éléments des crimes », qui doivent aider la Cour à interpréter et à appliquer l'article relatif au crime lui-même (art. 9 du Statut de Rome). Ces éléments avaient été pour l'essentiel définis par une commission d'experts que la Suisse, comprenant que la définition du crime d'agression allait aboutir, avait réunie et présidée à Montreux au mois d'avril 2009.

La Conférence de révision a par ailleurs adopté des « éléments d'interprétation ».

Texte et traductions faisant foi

Les textes arabes, chinois, anglais, français, russes et espagnols des amendements du Statut de Rome font tous foi ; ils sont déposés auprès du Secrétaire général de l'ONU, dépositaire du Statut de Rome. |39| Pour la Suisse, la version française a donc valeur d'original. La version allemande des amendements a été préparée avec le Liechtenstein, l'Autriche et l'Allemagne. La version italienne a été élaborée par la Suisse et mise à disposition des autorités italiennes.

1.2.5 Appréciation

L'adoption de l'amendement relatif au crime d'agression par les Etats parties au Statut de Rome est un grand pas en avant pour la justice pénale internationale. Le tribunal international militaire de Nuremberg avait estimé qu'il s'agissait du crime international le plus grave |40|, mais il aura fallu plus de 65 ans de tractations intenses pour arriver à sa codification à la Conférence de révision de Kampala. La difficulté venait du fait que sa répression entraîne un jugement sur le comportement d'un Etat, bastion traditionnel de la souveraineté nationale. La restriction du droit à la guerre qu'avaient acceptée les pays en signant la Charte de l'ONU acquiert une nouvelle dimension maintenant qu'elle relève aussi du droit pénal. Le Conseil de sécurité, et en particulier ses membres permanents, prétendaient conserver la haute main sur tout ce qui concerne la paix et la sécurité, ce qui avait longtemps bloqué la discussion. La percée effectuée à Kampala n'en a que plus de valeur.

L'adoption de l'amendement relatif au crime d'agression a indéniablement une très grande valeur symbolique. Mais il ne faut pas surestimer ses effets concrets immédiats. D'une part, il faudra attendre, pour que la Cour puisse jouer son rôle, que l'Assemblée des Etats parties active sa compétence, ce qui ne se fera pas avant 2017. Et d'autre part, le champ d'application de l'amendement est relativement circonscrit :

    - l'acte d'agression ne peut être un crime que s'il est commis par un Etat contre un autre, alors que la plupart des conflits armés actuels sont internes ;

    - l'acte d'agression doit être d'une gravité qualifiée pour être un élément constitutif d'un crime d'agression, de sorte que d'autres actes d'agression prohibés en droit international ne pourront toujours pas être sanctionnés en droit pénal ;

    - la compétence de la Cour est en principe limitée aux Etats parties au Statut de Rome, pour autant qu'ils aient ratifié l'amendement relatif au crime d'agression, et les Etats parties susceptibles de commettre un tel acte peuvent s'y soustraire en déposant une déclaration déclinatoire.

Il n'en faut pas moins considérer l'adoption de l'amendement relatif au crime d'agression comme une avancée majeure. La Suisse lutte activement depuis des années déjà contre l'impunité, et l'amendement comble une lacune importante dans la répression des crimes les plus graves en droit international. S'il raréfie les conflits armés illicites par son effet dissuasif sur les agresseurs potentiels, cela réduira automatiquement le nombre des crimes graves commis dans ce contexte. En d'autres termes, si la répression du crime d'agression fait mieux respecter le jus ad bellum (droit à la guerre), le jus in bello (droit dans la guerre, droit international humanitaire) sera moins souvent mis à contribution. La ratification de cet amendement s'inscrit donc dans le droit fil de l'engagement important de la Suisse pour la paix, la sécurité et les droits de l'homme. La criminalisation de l'agression assure par ailleurs une certaine protection à la Suisse en décourageant les agresseurs potentiels. En tant qu'Etat neutre, la Suisse a renoncé aux actes d'agression et attend de tous les autres Etats qu'ils fassent de même ; elle a donc tout intérêt à ce que l'interdiction générale du recours à la force soit respectée. Et l'un des aspects primordiaux de la nouvelle compétence de la Cour en la matière est que le contrôle du respect de cette interdiction n'est plus confié au seul Conseil de sécurité de l'ONU, qui fonde fréquemment ses décisions sur des considérations d'ordre politique, mais qu'une institution judiciaire indépendante aura aussi désormais un rôle à jouer.

1.2.6 Transposition en droit national

Le crime de génocide, le crime contre l'humanité et les crimes de guerre définis dans le Statut de Rome ont été transposés dans le droit pénal suisse, et peuvent donner lieu en Suisse à des poursuites et à des sanctions. |41| Il faut donc se demander s'il convient de transposer également en droit national le nouveau crime d'agression établit dans le Statut de Rome. Le Conseil fédéral souhaite s'abstenir de faire cette transposition en l'état actuel.

Le crime d'agression se distingue des autres crimes définis dans le Statut de Rome et évoqués ci-dessus du fait que l'acte constitutif de l'agression doit obligatoirement avoir été commis par un Etat. La transposition pourrait placer la Suisse, ses autorités de poursuite pénale et ses tribunaux dans une situation où ils auraient à déterminer s'il y a eu ou non acte d'agression entre deux Etats étrangers. Le fait que les pays qui ont déjà ratifié l'amendement relatif au crime d'agression retardent la transposition en droit national montre que la circonspection est ici de mise. Comme ce crime n'a quasiment plus été réprimé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et que la définition de ce crime est nouvelle, il est préférable d'attendre de connaître ses effets concrets au niveau de la Cour pénale internationale ainsi que l'approche adoptée par d'autres Etats avant d'envisager la transposition en droit national.

Il n'y a aucune obligation de transposer dans le droit national les crimes définis dans le Statut de Rome. Certes, le Statut de Rome est fondé sur le principe de la complémentarité |42|, et chaque Etat doit poursuivre ces crimes, mais le droit international ne prévoit pas de véritable obligation de les ériger en crimes de droit pénal national. |43| A Kampala, les Etats parties ont d'ailleurs adopté l'amendement relatif au crime d'agression à la condition explicite que cela n'entraînerait pas d'obligation de transposition nationale. |44| C'est la CPI qui est la mieux placée pour juger un crime d'agression, en raison de sa nature même. Le caractère essentiellement international du crime apparaît aussi dans le fait qu'un tout petit nombre seulement de pays ont déjà réprimé des crimes similaires dans leur droit national.

Il est cependant important de souligner que la Suisse peut de toute façon s'acquitter pleinement des obligations de coopération avec la Cour pénale internationale prévues au chapitre IX du Statut, même sans transposition du crime d'agression dans son droit national. La loi fédérale du 22 juin 2001 sur la coopération avec la Cour pénale internationale (LCPI), qui traite de ces questions en droit interne, prévoit une coopération générale de la Suisse avec la Cour, qu'elle ne limite par exemple pas aux crimes transposés en droit national. La Suisse pourrait ainsi arrêter et remettre à la CPI l'auteur présumé d'un crime d'agression recherché par la Cour et faisant l'objet d'un mandat d'arrêt. |45| Les règles en vigueur en Suisse sont compatibles avec l'art. 86 du Statut, qui prévoit que les Etats sont tenus de coopérer avec la Cour dans les affaires relatives à des « crimes relevant de sa compétence ». Le crime d'agression figure parmi ces crimes depuis la Conférence de révision de Kampala. C'est pourquoi la coopération est pleinement possible aussi pour ce nouveau crime, sans que sa transposition en droit suisse soit nécessaire.

Certes, même la coopération avec la Cour en matière de crime d'agression pourrait poser à la Suisse de délicats problèmes de politique extérieure. Mais le Conseil fédéral estime que les répercussions en seraient moindres que dans le cas de poursuites nationales indépendantes, car l'impulsion proviendrait toujours de la Cour elle-même, qui dispose d'une large assise internationale. La Suisse n'aurait alors qu'un rôle d'exécutant, elle ne serait pas à l'origine des poursuites.

Ne pas transposer les amendements dans le droit national aurait aussi pour effet que la Suisse ne pourrait vraisemblablement pas empêcher l'inculpation de l'un de ses ressortissants pour crime d'agression devant la Cour. |46| Elle ne pourrait pas user de son droit de le poursuivre elle-même, car elle serait « dans l'incapacité de mener véritablement à bien l'enquête ou les poursuites », faute de dispositions pénales en la matière. |47| L'art. 299 (violation de la souveraineté territoriale étrangère) et l'art. 300 (actes d'hostilité contre belligérants des troupes étrangères) du Code pénal ne répriment que certains aspects du crime d'agression en droit interne. Eu égard à la neutralité de la Suisse qui est ancrée dans le droit international, à la séparation effective de ses pouvoirs, à la stabilité de ses structures politiques et à la sécurité qui règne actuellement en Europe, il semble très improbable aujourd'hui que des ressortissants suisses puissent être traduits devant la CPI pour crime d'agression.

1.3 Ajouts à l'art. 8 du Statut de Rome relatif aux crimes de guerre

1.3.1 Rappel historique

La distinction entre conflits internationaux et non internationaux est l'un des principes historiques du droit international humanitaire, et figure en particulier dans les Conventions de Genève de 1949. |48| Elle se fonde sur la croyance solidement ancrée en la souveraineté juridique de l'Etat. Les Etats sont plus réticents à se plier à des règles dans les conflits intérieurs que dans les conflits interétatiques. Du point de vue des victimes, cette distinction n'a guère de sens, et c'est pourquoi elle a été largement abandonnée en droit pénal suisse, par exemple. Issu d'une négociation internationale, le Statut de Rome de 1998 reprend la distinction traditionnelle. Ce qui explique que le catalogue des crimes de guerre soit plus long pour les conflits armés internationaux que pour les conflits armés non internationaux. L'art. 8 du Statut de Rome interdit l'emploi de poison ou d'armes empoisonnées, de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires ainsi que de tous liquides, matières ou procédés analogues, de même que l'utilisation de balles qui s'épanouissent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain (dites à expansion, ou « dum-dum ») dans les conflits armés internationaux |49|, mais les Etats parties n'avaient pas voulu qu'il en soit de même dans les conflits non internationaux. La raison en était surtout qu'au moment de l'adoption du Statut de Rome, le droit international coutumier n'était pas aussi largement reconnu par les Etats dans les conflits non internationaux que pour les conflits internationaux en ce qui concerne ces actes. |50|

En préparation à la Conférence de révision de Kampala de 2010, la Belgique a cherché à obtenir que le Statut de Rome mentionne l'utilisation d'autres types d'armes et l'érige en crime de guerre. Elle aurait initialement voulu inclure dans la liste les armes biologiques et chimiques, les mines antipersonnel, les éclats non localisables et les armes à laser aveuglantes ; mais cette proposition n'a pas suscité l'approbation nécessaire de la majorité d'Etats, et a donc été retirée.

En revanche, l'idée a commencé à s'imposer que la compétence de la Cour pénale internationale, déjà prévue pour les conflits internationaux, pouvait être étendue aux conflits non internationaux à l'égard de l'utilisation de poison et d'armes empoisonnées, de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires ainsi que de tous liquides, matières ou procédés analogues et de balles à expansion. Les auteurs de la proposition ont su faire valoir que l'emploi de ces armes enfreint le droit international coutumier dans les conflits internes comme interétatiques, et que l'opinion contraire défendue par la majorité des Etats en 1998 était maintenant dépassée. Les Etats parties ont également été sensibles au fait que les blessures infligées aux victimes par ces armes sont les mêmes dans un conflit interne ou interétatique. Enfin, un groupe d'Etats aux positions communes (dont la Suisse), le Comité international de la Croix-Rouge et de nombreuses organisations non-gouvernementales ont soutenu l'initiative. L'Assemblée des Etats parties a donc adopté ces propositions en décembre 2009 et mars 2010 pour examen à la Conférence de révision. |51|

1.3.2 Déroulement des négociations à la Conférence de révision

La proposition d'amendement de l'art. 8 du Statut de Rome n'a pas vraiment donné matière à discussion à la Conférence de révision de 2010, les Etats parties étant par avance arrivés à un accord à ce sujet. Une fois réglée une question en suspens sur l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions, les amendements et les « éléments des crimes » ont été adoptés par consensus.

1.3.3 Résultat de la négociation et récapitulatif des amendements

Les trois chiffres ajoutés à l'art. 8, par. 2, let. e, du Statut de Rome ont pour effet que les actes suivants sont considérés comme des crimes de guerre s'ils sont commis non seulement dans des conflits internationaux, comme auparavant, mais désormais aussi dans des conflits non internationaux :

    - le fait d'employer du poison ou des armes empoisonnées (ch. xiii) ;

    - le fait d'employer des gaz asphyxiants, toxiques ou similaires, ainsi que tous liquides, matières ou procédés analogues (ch. xiv) ;

    - le fait d'utiliser des balles qui s'épanouissent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain, telles que des balles dont l'enveloppe dure ne recouvre pas entièrement le centre ou est percée d'entailles (ch. xv).

La formulation reprend textuellement celle de l'art. 8, par. 2, let. b, ch. xvii, xviii, xix, qui érige déjà ces actes en crimes de guerre dans les conflits armés internationaux. |52|

L'art. 121, par. 5, du Statut de Rome prévoit que cet amendement ne sera applicable qu'aux Etats parties qui l'ont ratifié. La Cour ne peut pas exercer sa compétence à l'égard d'un crime faisant l'objet de l'amendement lorsqu'il a été commis par un ressortissant d'un Etat partie qui n'a pas accepté ni ratifié l'amendement ou sur le territoire de cet Etat.

Avec les crimes de guerre ajoutés à l'art. 8 du Statut de Rome, la Conférence de révision a adopté les « éléments des crimes » correspondants, dont l'art. 9 indique qu'ils aident la Cour à interpréter et à appliquer les articles relatifs aux actes qui lui sont soumis.

En ce qui concerne le texte faisant foi et ses traductions, se reporter au passage correspondant relatif au crime d'agression. |53|

1.3.4 Appréciation

La Suisse estime que l'on peut se féliciter de l'amendement apporté à l'art. 8, car il élimine l'différence de traitement des actes en question suivant qu'ils sont commis dans des conflits armés internationaux ou non internationaux. Elle a d'ailleurs coparrainé cette résolution. Un traitement identique se justifie objectivement par une même gravité de l'acte et des souffrances identiques infligées aux victimes dans un cas comme dans l'autre. De plus, le droit international coutumier interdit déjà ces actes dans les conflits des deux types |54| ; en instaurant un traitement identique, le Statut de Rome permet désormais d'utiliser le droit pénal pour faire respecter cette interdiction, ce qui améliore la protection des populations civiles et des personnes participant aux hostilités. Il faut toutefois rappeler que la compétence de la Cour à l'égard des actes que criminalise l'amendement est subordonnée à la ratification des Etats, ce qui limite considérablement son champ d'application, du moins pour l'instant.

Même après l'amendement apporté à l'art. 8, le nombre d'actes criminalisés par le Statut de Rome diffère toujours notablement selon le type de conflit : 34 dans les conflits armés internationaux |55|, mais 19 seulement - compte tenu du présent amendement - dans les conflits non internationaux. |56| L'élargissement du traitement identique de trois crimes de guerre est un premier pas, d'autres devraient suivre.

1.3.5 Transposition en droit national

En principe, le droit pénal suisse ne fait plus de distinction entre les conflits armés internationaux et non internationaux en ce qui concerne l'utilisation des armes interdites. |57| Les actes caractérisés dans l'amendement de l'art. 8 du Statut de Rome sont punissables dans les conflits des deux types en vertu de l'art. 264h, al. 1, let. a-c, du Code pénal suisse. |58| Il en va de même pour le champ d'application du code pénal militaire, dont l'article correspondant (art. 112d, al. 1, let. a-c) possède la même teneur. |59| Le droit pénal suisse reflétant déjà intégralement les amendements apportés à l'art. 8 du Statut de Rome, aucun ajustement n'est nécessaire.

La coopération de la Suisse avec la Cour pénale internationale est d'ores et déjà possible à l'égard de l'amendement apporté à l'art. 8 du Statut de Rome sans modification additionnelle de la loi. L'art. 86 du Statut de Rome prévoit l'obligation générale de coopérer pleinement avec la Cour en ce qui concerne les crimes relevant de sa compétence, dont font désormais partie les crimes de guerre ajoutés par l'amendement à l'art. 8 du Statut |60|. La loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale met la Suisse en mesure de s'acquitter de cette obligation. |61|

2 Commentaires des disposition des amendements

2.1 Crime d'agression

Art. 5 Crimes relevant de la compétence de la Cour

Le par. 2 de cet article avait été adopté en 1998 en raison de l'impossibilité de définir le crime d'agression et les conditions d'exercice de la compétence de la Cour. Ayant perdu sa raison d'être avec la Conférence de révision de Kampala, il est abrogé.

Art. 8bis Crime d agression

Le crime d'agression est défini au nouvel art. 8bis du Statut de Rome. Il trouve place après les crimes déjà prévus : crime de génocide (art. 6), crimes contre l'humanité (art. 7) et crimes de guerre (art. 8), ce qui suit l'ordre de la liste des crimes relevant de la compétence de la Cour (art. 5, par. 1).

Le par. 1 constitue le cœur de la définition. Commet un crime d'agression la person-ne qui planifie, prépare, lance ou exécute un acte d'agression. La planification et la préparation sont érigées en crime, mais l'acte d'agression doit avoir eu lieu pour que le crime ait été effectivement commis. |62| D'autre part, tout type d'acte d'agression n'est pas suffisant, il faut que, « par sa nature, sa gravité et son ampleur, [il] constitue une violation manifeste de la Charte des Nations Unies », ce qui exclut les actes commis dans les cas où la licéité du recours à la force entre Etats est difficile à déterminer en droit international.

Le par. 1 indique par ailleurs que, parmi les crimes définis dans le Statut de Rome, l'agression est un délit spécial, car il s'agit d'un crime de dirigeant. Il ne peut être imputable qu'à « une personne effectivement en mesure de contrôler ou de diriger l'action politique ou militaire d'un Etat ». Il s'agit donc surtout de personnes placées au plus haut niveau de l'Etat ou de l'armée, même si des personnes n'exerçant pas de responsabilités gouvernementales ou n'occupant pas un rang élevé dans l'armée peuvent aussi être inculpées si elles sont « effectivement en mesure » d'exercer une telle influence. En revanche, une personne ne possédant qu'une autorité formelle ne peut pas être accusée de crime d'agression.

La première phrase du par. 2 définit la notion d'acte d'agression introduite au par. 1 comme « l'emploi par un Etat de la force armée contre la souveraineté, l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique d'un autre Etat, ou de toute autre manière incompatible avec la Charte des Nations Unies ». Cette définition est reprise littéralement de celle de l'agression entre Etats donnée par l'Assemblée générale de l'ONU en 1974 |63|, elle-même inspirée en grande partie de la Charte de 1945 des Nations Unies |64|. L'acte d'agression est seulement défini ici comme l'emploi effectif de la force par un Etat contre un autre Etat. La simple menace du recours à la force ou un acte n'impliquant pas l'usage de la force (comme un embargo économique), voire le recours à la force au sein de l'Etat ne constituent pas un acte d'agression au sens de cette définition. Le recours à la force doit en outre être incompatible avec la Charte des Nations Unies, ce qui veut surtout dire que la définition exclut les actions autorisées par le Conseil de sécurité |65| et la légitime défense |66|.

La seconde phrase du par. 2 précise la première par une liste non exhaustive d'actes d'agression. La formulation est pratiquement identique à celle de la définition ci-dessus que l'Assemblée générale avait donnée de l'agression |67|.

    - Les let. a à d de la liste énumèrent des actes des forces armées d'un Etat, comme l'invasion, l'occupation militaire, l'annexion, le bombardement ou l'attaque, et le blocus des ports et des côtes.

    - Les let. e et f érigent aussi en actes d'agression la violation d'un agrément ou d'un accord de stationnement de troupes étrangères sur le territoire d'un Etat, ainsi que la permission donnée par un Etat à un autre d'utiliser son territoire pour un acte d'agression contre un Etat tiers.

    - La let. g assimile l'envoi de bandes, groupes, troupes irrégulières ou mercenaires armés à un acte d'agression lorsque les actes ainsi commis présentent une gravité égale à celle des actes énumérés aux let. a à f.

Art. 15bis Exercice de la compétence à l'égard du crime d'agression (renvoi par un Etat, ou de sa propre initiative)

L'art. 15bis explicite les conditions dans lesquelles la Cour exerce ses compétences à l'égard du crime d'agression lorsqu'un Etat lui défère une situation |68|, ou lorsque son Procureur ouvre une enquête de sa propre initiative |69|.

Le par. 1 prévoit que la Cour exerce sa compétence à l'égard du crime d'agression conformément aux lettres a) et c) de l'article 13, comme pour les autres crimes visés dans le Statut, à moins que les paragraphes 2 à 10 du nouvel article 15bis n'en disposent autrement.

Les par. 2 et 3 reportent dans le temps l'exercice de la compétence de la Cour à l'égard du crime d'agression jusqu'à ce que certaines conditions soient remplies. D'une part, la Cour n'aura compétence qu'à l'égard de crimes d'agression commis un an au moins après la ratification ou l'acceptation de l'amendement par trente Etats parties. Et d'autre part, les Etats parties devront, après le 1 er janvier 2017, activer la compétence de la Cour à l'égard du crime d'agression par une décision prise à la majorité qualifiée. La CPI ne pourra donc pas exercer sa compétence à l'égard du crime d'agression avant 2017.

Aux termes du par. 4, la Cour peut exercer sa compétence dans les conditions définies à l'art. 12, c'est-à-dire en substance si l'acte a été commis sur le territoire d'un Etat partie ou si son auteur présumé est ressortissant d'un Etat partie. |70| Mais dans le cas du crime d'agression, un Etat partie a la possibilité de déposer une déclaration indiquant qu'il n'acceptera pas la compétence de la Cour s'il commet un acte d'agression. Pour être valable, cette déclaration dite déclinatoire doit avoir été déposée avant que l'acte d'agression ne soit commis ; elle peut être révoquée à tout moment. La matrice ci-dessous résume les règles de compétence pour le cas où l'Etat agresseur comme l'Etat agressé sont parties au Statut de Rome (dans le cas contraire, voir commentaire du par. 5 ci-dessous).

L'Etat agressé a ratifié l'amendement L'Etat agressé n'a pas ratifié l'amendement
L'Etat agresseur a ratifié l'amendement et n'a pas déposé de déclaration déclinatoire OUI OUI
L'Etat agresseur n'a pas ratifié l'amendement ni déposé de déclaration déclinatoire OUI NON
L'Etat agresseur a ou non ratifié l'amendement, et déposé une déclaration déclinatoire NON NON

Le par. 5 introduit une autre restriction par rapport aux conditions normales d'exercice de la compétence de la Cour définies à l'art. 12. La Cour n'exerce pas sa compétence si le crime d'agression est commis par des ressortissants d'un Etat non partie ou sur le territoire de ce dernier. Les Etats non parties, qu'ils soient agresseurs ou victimes, ne relèvent donc pas de la compétence de la CPI à l'égard du crime d'agression.

Les par. 6 à 8 traitent des rapports entre la Cour pénale internationale et le Conseil de sécurité de l'ONU. Si le Procureur se propose d'ouvrir une enquête sur un crime d'agression, il doit impérativement en avertir l'ONU au préalable et vérifier si le Conseil de sécurité a constaté l'acte (par. 6). Après quoi, deux scénarios sont possibles :

    - si le Conseil de sécurité a constaté l'acte d'agression, le Procureur peut mener l'enquête (par. 7) ;

    - si, dans un délai de six mois après notification, l'acte n'est toujours pas constaté, le Procureur peut demander à la Section préliminaire l'autorisation d'ouvrir une enquête (par. 8).

Le par. 9 souligne l'indépendance de la Cour pour ce qui est de la constatation d'un acte d'agression. En particulier, la Cour n'a pas nécessairement à se ranger à une décision du Conseil de sécurité sur l'existence ou la non-existence d'un acte d'agression.

Le par. 10 précise que l'article 15bis est sans effet sur les conditions d'exercice de la compétence de la Cour à l'égard des autres crimes visés dans le Statut de Rome.

Art. 9 « Eléments des crimes »

L'ajout du crime d'agression impose de compléter par une référence au nouvel art. 8*is la liste des « éléments des crimes » qui doit aider la Cour à l'interpréter et à l'appliquer.

Art. 15ter Exercice de la compétence à l'égard du crime d'agression (renvoi par le Conseil de sécurité)

L'art. 15ter s'applique lorsque le Conseil de sécurité défère à la Cour pénale internationale une situation dans laquelle aurait pu être commis un crime d'agression.

Le par. 1 reprend pour l'essentiel la teneur de l'actuel art. 13, let. b : le Conseil de sécurité peut déférer une situation au Procureur de la Cour par une résolution prise en vertu du chap. VII de la Charte des Nations Unies, que l'Etat concerné soit ou non partie au Statut de Rome.

Les par. 2 et 3 prévoient un report dans le temps jusqu'à 2017 au moins, exactement dans les mêmes termes qu'à l'art. 15bis, par. 2 et 3, examiné précédemment.

Les par. 4 et 5 soulignent l'indépendance de la Cour et limitent la validité de l'article 15ter au crime d'agression, en reprenant mot pour mot les par. 9 et 10 de l'art. 15bis.

Art. 20 Ne bis in idem

L'ajout du crime d'agression impose de compléter par une référence au nouvel art. 8bis la liste des crimes pour lesquels nul ne peut être jugé deux fois (ne bis in idem).

Art. 25 Responsabilité pénale individuelle

Les Etats parties ayant voulu que le crime d'agression ne puisse être commis que par des personnes dirigeantes, l'art. 25 sur la responsabilité pénale individuelle doit être complété. Le nouveau par. 3bis empêche qu'une personne puisse être poursuivie pour incitation, complicité ou autre forme de participation en vertu de l'art. 25 si elle n'était pas « effectivement en mesure de contrôler ou de diriger l'action politique ou militaire d'un Etat ».

2.2 Ajouts à l'art. 8 du Statut de Rome relatif aux crimes de guerre

Art. 8, par. 8, ch. 2, let. e, ch. xiii : le fait d'employer du poison ou des armes empoisonnées

Cette disposition insérée à l'art. 8 du Statut de Rome érige en crime de guerre l'emploi de poison ou d'armes empoisonnées dans les conflits armés non internationaux. Elle reprend textuellement l'actuel art. 8, par. 2, let. b, ch. xvii du Statut de Rome applicable aux conflits armés internationaux, et l'on peut se reporter aux explications figurant à ce propos dans le message correspondant |71|.

Art. 8, par. 8, ch. 2, let. e, ch. xiv : le fait d'employer des gaz asphyxiants, toxiques ou similaires, ainsi que tous liquides, matières ou procédés analogues

Cette disposition insérée à l'art. 8 du Statut de Rome érige en crime de guerre l'emploi de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires ainsi que de tous liquides, matières ou procédés analogues dans les conflits armés non internationaux. Elle reprend textuellement l'actuel art. 8, par. 2, let. b, ch. xviii du Statut de Rome applicable aux conflits armés internationaux, et l'on peut se reporter aux explications figurant à ce propos dans le message correspondant |72|.

Art. 8, par. 8, ch. 2, let. e, ch. xv : le fait d'utiliser des balles qui s'épanouissent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain, telles que des balles dont l'enveloppe dure ne recouvre pas entièrement le centre ou est percée d'entailles

Cette disposition insérée à l'art. 8 du Statut de Rome érige en crime de guerre l'utilisation de balles qui s'épanouissent ou s'aplatissent facilement dans le corps humain, telles que des balles dont l'enveloppe dure ne recouvre pas entièrement le centre ou est percée d'entailles dans les conflits armés non internationaux. Elle reprend textuellement l'actuel art. 8, par. 2, let. b, ch. xix du Statut de Rome applicable aux conflits armés internationaux, et l'on peut se reporter aux explications figurant à ce propos dans le message correspondant |73|.

3 Conséquences

3.1 Conséquences pour la Confédération

3.1.1 Conséquences financières et sur l'état du personnel

Les principales conséquences financières et sur l'état du personnel découlant de l'adhésion de la Suisse au Statut de Rome, en 2001, il convient de se reporter aux explications données à ce sujet dans le message correspondant. |74| La ratification des amendements relatifs au crime d'agression et aux crimes de guerre ne devrait ainsi avoir que des conséquences négligeables.

Les amendements apportés au Statut peuvent accroître le nombre d'affaires devant la Cour, ce qui pourrait se traduire par un alourdissement des dépenses, dont la Suisse aurait à prendre en charge une quote-part au titre de contribution obligatoire. |75| Cela dit, la Suisse pourrait supporter ces coûts même sans avoir ratifié les amendements, si la Cour doit examiner une affaire en relation avec un autre Etat.

Les ressources humaines existantes du Service central chargé de la coopération avec la Cour pénale internationale à l'Office fédéral de la justice |76| devraient permettre de répondre à d'éventuelles demandes supplémentaires de la Cour. Il ne faut donc pas attendre d'alourdissement du coût de la coopération de la Suisse avec la CPI. Là encore, la Suisse pourrait de toute façon avoir à répondre à des demandes supplémentaires même sans avoir ratifié les amendements.

Il ne devrait pas non plus y avoir de frais supplémentaires pour les autorités de poursuite pénale (notamment le Ministère public de la Confédération et les organes de poursuite pénale militaires) du fait que la ratification des amendements n'engendre pas de transposition en droit pénal suisse.

3.2 Conséquences pour les cantons et communes, ainsi que pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne

La ratification des amendements au Statut de Rome de la Cour pénale internationale par la Suisse ne devrait pas avoir de conséquences pour les cantons et les communes, ni pour les centres urbains, les agglomérations et les régions de montagne.

3.3 Conséquences économiques, sanitaires et sociales et autres conséquences

La ratification des amendements au Statut de Rome de la Cour pénale internationale par la Suisse ne devrait pas avoir de conséquences économiques, sanitaires et sociales ni d'autres conséquences.

4 Relation avec le programme de la législature et avec les stratégies nationales du Conseil fédéral

4.1 Relation avec le programme de la législature

L'objet n'est annoncé ni dans le message sur le programme de la législature 20112015 du 25 janvier 2012 |77|, ni dans l'arrêté fédéral du 15 juin 2012 |78| sur le programme de la législature 2011 à 2015.

Il est pourtant souhaitable d'approuver et de ratifier les amendements au Statut de Rome de la Cour pénale internationale. La compétence de la Cour à l'égard du crime d'agression ne pourra être activée qu'une fois que l'amendement aura été ratifié par 30 Etats au moins. Pour faire obstacle aux actes d'agression contraires au droit international, il serait bon que l'activation ait lieu au plus tôt, c'est-à-dire en 2017. Une année devant s'écouler entre la ratification et l'entrée en vigueur, il faudrait que les 30 ratifications soient atteintes avant la fin de l'année 2015. La Suisse, qui soutient activement la Cour depuis de longues années, devrait contribuer à la prompte activation de sa compétence en ratifiant elle-même cet amendement. En ce qui concerne l'amendement apporté à l'art. 8 du Statut de Rome relatif aux crimes de guerre, il est là encore important de se prononcer rapidement en faveur de d'un traitement identique des conflits armés internationaux et non internationaux. C'est pourquoi le Conseil fédéral propose d'approuver dès maintenant les amendements apportés au Statut de Rome.

4.2 Relation avec les stratégies nationales du Conseil fédéral

La Stratégie de politique étrangère 2012-2015 (Rapport sur les axes stratégiques de la politique étrangère pour la législature) indique que la justice pénale internationale est une importante préoccupation de la Suisse, qui « s'engage en faveur de la lutte contre l'impunité et d'une Cour pénale internationale (CPI) qui soit en mesure de remplir l'important mandat que les Etats lui ont confié ». |79| Il est primordial, pour la crédibilité et la solidité de la Cour pénale internationale, qu'un nombre maximum d'Etats ratifient les amendements. La ratification sert donc les intérêts de la Suisse et l'aide à atteindre ses objectifs de politique extérieure. L'ouverture de la procédure de consultation sur cet objet figure d'ailleurs parmi les objectifs du Département fédéral des affaires étrangères pour l'année 2013 adoptés par le Conseil fédéral |80|.

5 Aspects juridiques

5.1 Constitutionnalité

Le projet se fonde sur l'art. 54, al. 1, de la Constitution fédérale (Cst.), qui prévoit que les affaires étrangères relèvent de la compétence de la Confédération. D'autre part, l'art. 184, al. 2, Cst. confère au Conseil fédéral la compétence de signer des traités internationaux et de les ratifier. Enfin, l'art 166, al. 2, Cst. confère à l'Assemblée fédérale la compétence de les approuver, sauf si leur conclusion relève de la seule compétence du Conseil fédéral en vertu d'une loi ou d'un traité international (art. 7a, al. 1, LOGA), ou s'il s'agit de traités internationaux de portée mineure (art. 7a, al. 2, LOGA).

En l'espèce, la compétence du Conseil fédéral en vertu de l'art. 7a, al. 1, LOGA n'est pas fondée sur une loi fédérale ou un traité international. Il ne s'agit pas non plus de la conclusion d'un traité de portée mineure visé à l'art. 7a, al. 2, LOGA, et les amendements ne sont en particulier pas de simples dispositions d'exécution visées à l'art. 7a, al. 2, let. b, LOGA : ce sont des dispositions de fond, qui étendent la compétence de la Cour pénale internationale et définissent les actes prohibés.

C'est pourquoi, comme le prévoit l'art. 166, al. 2, Cst., c'est à l'Assemblée fédérale qu'il revient d'approuver les amendements apportés les 10 et 11 juin 2010 au Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

5.2 Forme de l'acte à adopter

En approuvant le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, le 22 juin 2001, l'Assemblée fédérale a assujetti l'arrêté fédéral correspondant au référendum facultatif en matière de traités internationaux puisqu'il prévoyait l'adhésion à une organisation internationale, comme le veut l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 2 de la Constitution fédérale. En l'espèce, il ne s'agit pas de l'adhésion à une organisation internationale, mais simplement d'une modification apportée au Statut. Le Statut de Rome pouvant être globalement dénoncé en vertu de son art. 127, l'art. 141, al. 1, let. b, ch. 1, Cst. ne s'applique pas ici.

Il reste à examiner si les amendements apportés au Statut de Rome seraient sujets au référendum facultatif parce qu'ils contiendraient des dispositions importantes fixant des règles de droit ou dont la mise en œuvre exigerait l'adoption de lois fédérales. Selon l'art. 22, al. 4, de la loi sur l'Assemblée fédérale, sont réputées fixer des règles de droit les dispositions générales et abstraites d'application directe qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences. Sont considérées comme importantes les dispositions qui devraient être édictées sous la forme d'une loi fédérale en vertu de l'art. 164, al. 1, Cst.

Les amendements apportés au Statut de Rome de la Cour pénale internationale étendent la compétence de la Cour à de nouvelles formes de crimes de guerre dans les conflits armés non internationaux ainsi qu'au crime d'agression, et définissent les éléments constitutifs de ces crimes. Si la Suisse ratifie les amendements, il serait théoriquement possible que la Cour exerce un jour sa compétence à l'égard de ces crimes s'ils sont commis sur le territoire suisse ou par un ressortissant suisse (art. 12, par. 2, du Statut de Rome) et si la Suisse n'a pas la volonté ou est dans l'incapacité de mener véritablement à bien l'enquête ou les poursuites (art. 17, par. 1, let. a, Statut de Rome). Il s'agit donc bien de dispositions générales et abstraites, d'application directe, qui créent des obligations, confèrent des droits ou attribuent des compétences, et fixent ainsi des règles de droit. Il convient en outre de les qualifier d'importantes, car elles portent sur le droit pénal et devraient être édictées sous la forme d'une loi fédérale en vertu de l'art. 164, al. 1, Cst.

L'arrêté fédéral portant approbation des amendements au Statut de Rome de la Cour pénale internationale adoptés les 10 et 11 juin 2010 doit donc être soumis au référendum facultatif en vertu de l'art. 141, al. 1, let. d, ch. 3, Cst.

[Source: Conseil Fédéral de la Confédération suisse, Berne, 25jun13]


Notas:

1. RS 0.312.1 [Retour]

2. Pour le Statut de Rome d'une manière générale, voir le message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359). [Retour]

3. Pour la liste actuelle des Etats parties, voir http://www.eda.admin.ch/traites. [Retour]

4. Voir le Préambule de la Charte des Nations Unies du 26 juin 1945 (RS 0.120). [Retour]

5. Art. 2, par. 4, Charte des Nations Unies du 26 juin 1945 (RS 0.120). [Retour]

6. Message relatif à une nouvelle constitution fédérale, 20 novembre 1996 (FF 1997 I 369). [Retour]

7. La Cour internationale de justice (CIJ) ne connaît que des litiges entre Etats, tandis que la Cour pénale internationale (CPI) peut juger des individus pour les crimes les plus graves définis en droit international. [Retour]

8. Art. 54, al. 2, Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101). [Retour]

9. Stratégie de politique étrangère 2012--2015, rapport sur les axes stratégiques de la politique étrangère pour la législature, mars 2012, http://www.eda.admin.ch/eda/fr/home/doc/publi/ppol.html, p. 13-14 (dernière consultation le 7 juin 2013). [Retour]

10. Convention du 18 octobre 1907 concernant les droits et les devoirs des puissances et des personnes neutres en cas de guerre sur terre (RS 0.515.21) ; Convention du 18 octobre 1907 concernant les droits et les devoirs des puissances neutres en cas de guerre maritime (RS 0.515.22). [Retour]

11. Art. 1, Traité du 27 août 1928 de renonciation à la guerre (RS 0.193.311). [Retour]

12. Charte des Nations Unies du 26 juin 1945 (RS 0.120). [Retour]

13. Art. 2, par. 4, Charte des Nations Unies du 26 juin 1945 (RS 0.120). Ne sont pas couverts par l'interdiction le recours à la force autorisé par le Conseil de sécurité (art. 42) et la légitime défense (art. 51). [Retour]

14. Art. 6, let. a, Charte de Londres de 1945, in: Stefan Barriga et Claus Kress (édit.), Crime of Aggression Library - The Travaux Préparatoires on the Crime of Aggression, Cambridge (Cambridge University Press) 2012, p. 131; Art. 5, let. a, Charte de Tokyo de 1946, ibid., p. 134. [Retour]

15. Confirmation des principes de droit international reconnus par le statut de la Cour de Nuremberg, document A/RES/1/95, 11 décembre 1946, OP 2. [Retour]

16. Définition de l'agression, fondée sur la Résolution 3314 (XXIX) de l'Assemblée générale de l'ONU, 14 décembre 1974, document A/RES/29/3314. [Retour]

17. Art. 5, par. 1, let. d, Statut de Rome. [Retour]

18. Art. 5, par. 2, Statut de Rome. [Retour]

19. « 2002 Coordinator's Paper (July) », in: Stefan Barriga et Claus Kress (édit.), Crime of Aggression Library - The Travaux Préparatoires on the Crime of Aggression, Cambridge (Cambridge University Press) 2012, p. 412. [Retour]

20. « 2009 Special Working Group on the Crime of Aggression Report », in: ibid., p. 648; 2009 « Special Working Group on the Crime of Aggression Report », in: ibid., p. 663. [Retour]

21. Pour le déroulement détaillé de la négociation, voir Stefan Barriga, « Negotiating the Amendments on the crime of aggression », in: Stefan Barriga und Claus Kress (édit.), Crime of Aggression Library -The Travaux Préparatoires on the Crime of Aggression, Cambridge (Cambridge University Press) 2012, p. 3-57; Claus Kress / Leonie von Holtzendorff, « The Kampala Compromise on the Crime of Aggression », Journal of International Criminal Justice 8 (2010), p. 1179-1217. [Retour]

22. RS 0.120 [Retour]

23. « Non-paper submitted by the delegations of Argentina, Brazil and Switzerland as of 6 June 2010 », in: Stefan Barriga und Claus Kress (édit.), Crime of Aggression Library -The Travaux Préparatoires on the Crime of Aggression, Cambridge (Cambridge Univer-sity Press) 2012, p. 740. [Retour]

24. Cf. art. 1 et 3 de la définition de l'agression, annexe de la résolution 3314 (XXIX) de l'Assemblée générale des Nations Unies, 14 décembre 1974, document A/RES/29/3314. [Retour]

25. Art. 8bis, par. 2, première phrase, Statut de Rome. [Retour]

26. Art. 8bis, par. 1, Statut de Rome. [Retour]

27. Art. 8bis, par. 1, Statut de Rome. [Retour]

28. Art. 8bis, par. 1, Statut de Rome. [Retour]

29. Art. 6, let. a, Charte de Londres de 1945, in: Stefan Barriga et Claus Kress (édit.), Crime of Aggression Library - The Travaux Préparatoires on the Crime of Aggression, Cambridge (Cambridge University Press) 2012, p. 131; Art. 5, let. a, Charte de Tokyo de 1946, in: ibid., p. 134. [Retour]

30. Art. 13 en relation avec les art. 15bis, par. 1 et 15ter, par. 1, Statut de Rome. [Retour]

31. Art. 15bis, par. 8 et 9, Statut de Rome. [Retour]

32. Art. 15bis, par. 9 et art. 15ter, par. 4, Statut de Rome. [Retour]

33. Il a été d'autant plus difficile de s'entendre sur une solution que la lecture des dispositions concernées peut déboucher sur des réponses contradictoires. [Retour]

34. Art. 15bis, par. 5, Statut de Rome. [Retour]

35. Art. 15bis, par. 4, Statut de Rome. [Retour]

36. Sur la compétence, se reporter également au tableau ci-dessous en 2.1. [Retour]

37. Art. 15ter, par. 1, en relation avec l'art. 13, let. b, Statut de Rome. [Retour]

38. Art. 15bis, par. 2 et 3, et art. 15ter, par. 2 et 3 en relation avec l'art. 121, par. 3, Statut de Rome. [Retour]

39. Art. 128, Statut de Rome. [Retour]

40. « International Military Tribunal (Nuremberg), Goering and Others, 1st October 1946 », in: Annual Digest and Reports of Public International Law Cases, nº 13, p. 203, ici p. 207. [Retour]

41. Art. 264, art. 264a et art. 264b-264j, Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP, RS 311.0); art. 108, art. 109, art. 110-114, Code pénal militaire du 13 juin 1927 (CPM, RS 321.0). [Retour]

42. Cf. par. 6 du préambule et art. 17, par. 1, let. a, Statut de Rome. [Retour]

43. Voir également le message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 417). Fait exception l'art. 70, par. 4, let. a., Statut de Rome sur les atteintes à l'administration de la justice. [Retour]

44. Résolution RC/Res.6, annexe III, élément 5: « Il est entendu que les amendements ne doivent pas être interprétés comme créant un droit ou une obligation d'exercer la compétence nationale à l'égard d'un acte d'agression commis par un autre Etat. » [Retour]

45. Art. 16-28, LCPI. [Retour]

46. Lorsqu'un Suisse est remis à la Cour, le service central demande à celle-ci de le rapatrier à l'issue de la procédure (art. 16, al. 2, LCPI). Voir à ce sujet le message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 404-405). [Retour]

47. Cf. art. 17, par. 1, let. a, Statut de Rome. [Retour]

48. Art. 2 et 3 communs des Conventions de Genève du 12 août 1949 (RS 0.518.12; RS 0.518.23; RS 0.518.42; RS 0.518.51). A propos de cette distinction, voir également le message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 500-501). [Retour]

49. Art. 8, par. 2, let. b, ch. xvii, xviii, xix, Statut de Rome. [Retour]

50. Cf. message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 505 et 506). [Retour]

51. Paragraphe opérationnel 3 et annexe III de la résolution ICC-ASP/8/Res.6, 26 novembre 2009 (proposition d'amendement de l'art. 8 du Statut de Rome); paragraphe opérationnel 9 et annexe VIII de la résolution ICC-ASP/8/Res.9, 25 mars 2010 (projet d'éléments de crime). [Retour]

52. Se reporter par conséquent aux explications données dans le message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 499-500). [Retour]

53. Voir ci-dessus en 1.2.4. [Retour]

54. Règles 72, 74 et 77 de la banque de données de droit international humanitaire coutumier du CICR, http://www.icrc.org/customary-ihl/eng/docs/home (dernière consultation le 7 juin 2013). [Retour]

55. Art. 8, par. 2, let. a ch. i)-viii) et let. b ch. i)-xxvi), Statut de Rome. [Retour]

56. Art. 8, par. 2, let. c ch. i)-iv) et let. e ch. i)-xv), Statut de Rome. [Retour]

57. L'art. 264b CP et l'art 110 CPM prévoient que les dispositions correspondantes « sont applicables dans le contexte d'un conflit armé international, y compris en situation d'occupation, et, si la nature de l'infraction ne l'exclut pas, dans le contexte d'un conflit armé non international ». [Retour]

58. RS 311.0. Voir à ce sujet le message relatif à la modification de lois fédérales en vue de la mise en œuvre du Statut de Rome de la Cour pénale internationale du 23 avril 2008 (FF 2008 3461, ici 3538-3539). [Retour]

59. RS 321.0. Voir à ce sujet le message relatif à la modification de lois fédérales en vue de la mise en œuvre du Statut de Rome de la Cour pénale internationale du 23 avril 2008 (FF 2008 3461, ici 3553). [Retour]

60. Sur l'obligation générale de coopération, voir le message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 397402). [Retour]

61. RS 351.6. Sur les particularités de la coopération prévues dans la LCPI, se reporter au message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 422-445). [Retour]

62. Le crime d'agression est donc une infraction de résultat. [Retour]

63. Cf. article premier, définition de l'agression, annexe de la résolution 3314 (XXIX) de l'Assemblée générale des Nations Unies du 14 décembre 1974, document A/RES/29/3314. [Retour]

64. Cf. art. 2, par. 4 Charte des Nations Unies du 26 juin 1945, RS 0.120. [Retour]

65. Cf. art. 42 Charte des Nations Unies du 26 juin 1945, RS 0.120. [Retour]

66. Cf. art. 51 Charte des Nations Unies du 26 juin 1945, RS 0.120. [Retour]

67. Cf. art. 3, définition de l'agression, annexe de la résolution 3314 (XXIX) de l'Assemblée générale des Nations Unies du 14 décembre 1974, document A/RES/29/3314. [Retour]

68. Art. 14, Statut de Rome. [Retour]

69. Art. 15, Statut de Rome. [Retour]

70. Pour plus de détails sur l'art. 12 du Statut de Rome, se reporter au message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 382-385). [Retour]

71. Message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 499). [Retour]

72. Message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 499). [Retour]

73. Message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 500). [Retour]

74. Message du 15 novembre 2000 relatif au Statut de Rome de la Cour pénale internationale, à la loi fédérale sur la coopération avec la Cour pénale internationale ainsi qu'à une révision du droit pénal (FF 2001 359, ici 448-450). [Retour]

75. Art. 115, let. a, en relation avec l'art. 117, Statut de Rome. [Retour]

76. Art. 3, al. 1, LCPI. [Retour]

77. FF 2012 349 [Retour]

78. FF 2012 6667 [Retour]

79. Stratégie de politique étrangère 2012--2015, rapport sur les axes stratégiques de la politique étrangère pour la législature, mars 2012, http://www.eda.admin.ch/etc/medialib/downloads/edazen/doc/publi/aussen.Par.0023.File.tmp/Aussenpolitische%20Strategie%2020122015%20FR%20lowres.pdf (dernière consultation le 7 juin 2013), p. 15. [Retour]

80. Objectifs 2013 du Conseil fédéral, volume II, p. 10, http://www.bk.admin.ch/dokumentation/publikationen/00290/00928/index.html?lang=fr (dernière consultation le 7 juin 2013). [Retour]


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