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23juin16

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Résumé analytique du Rapport mondial sur les drogues 2016


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"Nous nous engageons de nouveau à redoubler d'efforts pour aborder et combattre le problème mondial de la drogue sous tous ses aspects et avec les dangers et risques nouveaux et persistants qu'il présente [...] et nous recommandons les mesures suivantes: [...] promouvoir, selon qu'il conviendra, l'exploitation et l'analyse des données fiables et objectives pertinentes [...] en vue d'améliorer la mise en œuvre de stratégies, politiques et programmes antidrogue globaux, intégrés et équilibrés [...] et encourager le partage de pratiques optimales et d'enseignements tirés de l'expérience."

Document final de la session extraordinaire de l'Assemblée générale sur le problème mondial de la drogue, intitulé "Notre engagement commun à aborder et combattre efficacement le problème mondial de la drogue"

Le Rapport mondial sur les drogues 2016 s'inscrit dans le sillage de la session extraordinaire de l'Assemblée générale sur le problème mondial de la drogue, moment historique pour la politique mondiale en la matière. Son chapitre premier donne un aperçu global de l'offre et de la demande d'opiacés, de cocaïne, de cannabis, de stimulants de type amphétamine et de nouvelles substances psychoactives, ainsi que de leurs incidences sur la santé. Il passe également en revue les données scientifiques dont on dispose concernant la polytoxicomanie, les demandes de traitement pour usage de cannabis et les faits nouveaux intervenus depuis que la consommation de cannabis à des fins récréatives a été légalisée à certains endroits du monde. Le chapitre II porte sur les mécanismes d'interaction entre le problème mondial de la drogue et tous les aspects du développement durable, analysés dans la perspective des objectifs de développement durable.

L'usage de drogues et ses conséquences sanitaires

  

Prévalence de l'usage de drogues par injection, 2014 ou dernière année pour laquelle on dispose de données


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Note: Les frontières et noms indiqués et les appellations employées sur la carte n'impliquent ni reconnaissance ni acceptation officielles de la part de l'Organisation des Nations Unies. Les tirets représentent les frontières non déterminées. La ligne en pointillé représente approximativement la Ligne de contrôle au Jammu-et-Cachemire convenue par l'Inde et le Pakistan. Le statut définitif du Jammu-et-Cachemire n'a pas encore été arrêté par les parties. La frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud n'a pas encore été définitivement arrêtée. La souveraineté sur les îles Falkland (Malvinas) fait l'objet d'un différend entre l'Argentine et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord.

On estime qu'un adulte sur 20 a consommé au moins une drogue en 2014. Cela représente 250 millions de personnes âgées de 15 à 64 ans, chiffre équivalant approximativement aux populations de l'Allemagne, de la France, de l'Italie et du Royaume-Uni réunies; c'est beaucoup, mais il ne semble pas y avoir eu d'augmentation ces quatre dernières années proportionnellement à la population mondiale. Cependant, étant donné que plus de 29 millions de consommateurs de drogues souffriraient de troubles liés à cet usage, que 12 millions d'entre eux pratiqueraient l'injection et que 14,0 % de ceux-ci vivraient avec le VIH, on peut affirmer que la consommation de drogues continue d'avoir des effets dévastateurs sur la santé.

Selon les estimations, 207 400 décès, ou 43,5 décès par million d'habitants âgés de 15 à 64 ans, auraient été liés à la drogue en 2014. Si ce nombre est également stable, il n'en témoigne pas moins d'une situation inacceptable qui pourrait être évitée. Les morts par surdose représentent entre un tiers et la moitié à peu près des décès liés à la drogue, dont la plupart peuvent être attribués à la consommation d'opioïdes. La période qui suit immédiatement la sortie de prison s'accompagne pour les anciens détenus d'une augmentation significative du risque de décès liés à la drogue (principalement par surdose), le taux de mortalité correspondant étant bien plus élevé que celui enregistré pour toutes les autres causes dans la population générale.


Dans de nombreux pays, la prison reste un milieu où les risques de contraction de maladies infectieuses sont élevés, ce qui constitue une préoccupation majeure pour ce qui est de la santé des détenus. Plusieurs études font apparaître que l'usage de drogues, notamment d'opiacés et de drogues injectables, est très répandu dans les établissements pénitentiaires. En outre, la prévalence de l'infection à VIH, de l'hépatite et de la tuberculose parmi les détenus peut être sensiblement plus élevée que parmi la population générale. Cependant, bien que l'on sache qu'il s'agisse d'un environnement à haut risque et qu'il existe des preuves scientifiques démontrant l'efficacité des interventions sanitaires, d'importantes lacunes demeurent s'agissant des services de prévention et de traitement proposés dans de nombreux établissements pénitentiaires à travers le monde.

  

Les usagers de drogues injectables sont ceux qui s'exposent à certaines des conséquences sanitaires les plus graves qui soient liées aux pratiques de consommation dangereuses, ils sont généralement en mauvaise santé, outre qu'ils courent des risques élevés de surdose, mortelle ou non, et ils sont plus susceptibles que d'autres de mourir prématurément. Un sur sept vit avec le VIH et un sur deux avec l'hépatite C. Les usagers de drogues injectables constituent une population particulièrement à risque s'agissant du VIH et de l'hépatite, étant donné que près d'un tiers des nouvelles infections à VIH survenant hors d'Afrique subsaharienne les concernent. De plus, des études ont montré que les personnes qui s'injectent des stimulants ont des rapports sexuels plus risqués, en conséquence de quoi la probabilité d'infection à VIH est plus élevée parmi elles que parmi les personnes qui s'injectent des opiacés.

En 2014, selon les estimations, 183 millions de personnes auraient consommé du cannabis, drogue qui serait donc toujours la plus couramment consommée à l'échelle mondiale, suivie par les amphétamines. Avec environ 33 millions d'usagers, la consommation d'opiacés et d'opioïdes soumis à ordonnance est moins courante, même si les opioïdes figurent toujours parmi les principales drogues susceptibles d'avoir des effets nocifs et des conséquences sanitaires. La forte augmentation de la consommation d'héroïne constatée sur certains marchés (notamment en Amérique du Nord) où elle était auparavant en baisse indique que cette substance reste l'une des plus préoccupantes du point de vue de la santé publique.

Prévalence estimative de l'usage de drogues, tendances mondiales, 2006-2014


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Source: Réponses au questionnaire destiné aux rapports annuels.
Note: Pourcentage estimatif d'adultes (âgés de 15 à 64 ans) ayant consommé de la drogue au cours de l'année écoulée.

Nombre estimatif d'usagers de drogues, endances mondiales, 2006-2014


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Source: Réponses au questionnaire destiné aux rapports annuels.
Note: Pourcentage estimatif d'adultes (âgés de 15 à 64 ans) ayant consommé de la drogue au cours de l'année écoulée.

  

De façon générale, la consommation de cannabis est restée stable à l'échelle mondiale ces trois dernières années. Elle a cependant augmenté dans certaines sous-régions, particulièrement en Amérique du Nord et en Europe occidentale et centrale. Après une période de stabilité, l'usage de cocaïne a également augmenté depuis 2010, ce qui s'explique avant tout par la hausse observée en Amérique du Sud. À l'inverse, la consommation d'amphétamines semble stable, bien que le manque d'informations récentes sur le phénomène dans certaines sous-régions, notamment en Asie de l'Est et du Sud-Est, puisse conduire à en sous-estimer l'ampleur.

La situation mondiale en matière d'usage de drogues est d'autant plus floue que de nombreux consommateurs, tant occasionnels que réguliers, ont tendance à prendre plusieurs substances simultanément ou successivement. Par exemple, l'usage non médical de médicaments soumis à prescription, de stimulants de synthèse et de nouvelles substances psycho-actives en remplacement ou en sus de drogues plus classiques rend difficile de parler d'usagers d'une substance donnée, du fait qu'on assiste à des consommations épidémiques connexes ou cycliques ayant des conséquences sanitaires depuis quelques années.

Le traitement pour usage de cannabis s'est développé dans de nombreuses régions ces 10 dernières années. En Europe, plusieurs pays ont enregistré une hausse du nombre de patients suivant un tel traitement alors même que le nombre d'usagers fréquents (qui ont une consommation mensuelle) est en baisse. À l'échelle mondiale, les patients qui se soumettent pour la première fois à ce type de traitement représentent toujours une proportion importante des usagers de cannabis faisant l'objet d'un suivi médical, puisque près de la moitié des personnes traitées pour des troubles liés à l'usage de cette substance le sont dans le cadre d'une première admission. Les changements observés dans ce domaine peuvent être attribués à un certain nombre de facteurs, notamment au fait que les systèmes de justice pénale orientent les personnes concernées vers un traitement et à la hausse de l'offre de traitement pour usage de cannabis dans certains pays. S'il est avéré que du cannabis ayant une teneur particulièrement forte en THC est désormais largement disponible en Europe et aux États-Unis, on ne sait pas encore précisément en quoi ces produits pourraient être plus nocifs pour les consommateurs.

Généralement, les jeunes cherchent davantage à se faire traiter pour des troubles liés à l'usage de cannabis et d'amphétamines qu'à celui d'autres drogues. Cette situation reflète la hausse de la consommation de cannabis et d'amphétamines et, partant, celle du nombre de personnes souhaitant se faire soigner pour usage de telles substances. Les personnes suivant un traitement pour troubles liés à la consommation d'opioïdes ou de cocaïne ont le plus souvent une trentaine d'années, ce qui illustre le vieillissement de la cohorte des usagers en cours de traitement et la baisse générale de la proportion des demandes de traitement observés dans de nombreuses sous-régions.

Au total, les hommes sont trois fois plus susceptibles que les femmes de consommer du cannabis, de la cocaïne ou des amphétamines, alors que les femmes sont plus susceptibles que les hommes de prendre des opioïdes et des tranquillisants à des fins non thérapeutiques. Ces disparités tiennent davantage aux possibilités qui s'offrent dans un environnement social donné qu'au fait qu'un sexe serait plus vulnérable que l'autre ou plus susceptible de consommer une drogue donnée. En outre, si la plupart des enquêtes indiquent que la prévalence de l'usage de drogues est plus élevée chez les jeunes que chez les adultes, les disparités entre les sexes sont plus faibles chez les premiers que chez les seconds.

OFFRE ET MARCHÉS

  

Quantités de drogues saisies, tendances mondiales, 1998-2014


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Source: Réponses au questionnaire destiné aux rapports annuels.

Ayant été signalée par 129 pays au cours de la période 2009-2014, la culture du cannabis reste la plus répandue des cultures de plantes servant à produire des drogues, suivie par celles du pavot à opium, signalée par 49 pays (d'Asie et des Amériques principalement), puis de la coca, signalée par sept pays (des Amériques). Si l'on met de côté les disparités nationales, la culture du pavot a globalement diminué au cours de l'année écoulée alors que celle de la coca a augmenté.

S'il y a eu une forte hausse des saisies de drogues de synthèse, le cannabis reste la drogue dont le trafic est le plus répandu dans le monde. Alors que 234 substances étaient placées sous contrôle international en 2014 (elles étaient 244 en janvier 2016), l'essentiel du trafic portait sur un nombre de substances bien plus réduit d'après les informations communiquées au sujet des saisies, qui reflètent à la fois les activités des services de détection et de répression et les flux de drogues. En 2014, du cannabis sous diverses formes avait été intercepté dans 95 % des pays ayant fourni des données et à l'occasion de plus de la moitié des 2,2 millions de saisies de drogues signalées à l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) cette même année; suivaient les stimulants de type amphétamine, les opioïdes et les substances dérivées de la coca.

Dans tous les pays, plus d'hommes (ils représentent 90 % du total, en moyenne) que de femmes ont officiellement affaire au système de justice pénale pour trafic de drogues ou détention de drogues destinées à la consommation personnelle. Cependant, la communication de données ventilées par sexe s'est améliorée au fil des ans, faisant ainsi apparaître une augmentation, en valeur absolue, du nombre de femmes arrêtées pour des infractions liées aux drogues. Il n'en demeure pas moins que la proportion de femmes parmi les personnes arrêtées en rapport avec de la drogue, bien que variable, a connu une tendance à la baisse sur la période 1998-2014; c'est particulièrement vrai en ce qui concerne les infractions liées au trafic.

L'offre de drogues par le biais d'Internet, y compris du "dark net", marché en ligne anonyme, pourrait s'être développée ces dernières années, ce qui est source de préoccupation étant donné que ledit "dark net" est susceptible d'attirer de nouveaux groupes d'usagers en facilitant l'accès aux drogues tant dans les pays développés que dans les pays en développement.

Opiacés

  

Principaux flux du trafic d'héroïne


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Source: ONUDC, réponses au questionnaire destiné aux rapports annuels et base de données sur les opérations de saisie

Notes: Les itinéraires de trafic représentés sur la carte devraient être considérés comme une indication générale, basée sur des analyses de données, plutôt que comme des tracés exacts. Ces analyses s'appuient sur les données relatives aux saisies de drogues officielles effectuées le long des itinéraires de trafic ainsi que sur les rapports officiels de pays et les réponses aux questionnaires destinés aux rapports annuels. Les flux s'écartent parfois vers d'autres pays situés le long des itinéraires, et de nombreux flux secondaires peuvent ne pas être représentés. Les frontières indiquées sur la carte n'impliquent ni reconnaissance ni acceptation officielles de la part de l'Organisation des Nations Unies. Les tirets représentent les frontières non déterminées. La ligne en pointillé représente approximativement la Ligne de contrôle au Jammu-et-Cachemire convenue par l'Inde et le Pakistan. Le statut définitif du Jammu-et-Cachemire n'a pas encore été arrêté par les parties. La frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud n'a pas encore été définitivement arrêtée.

La production mondiale d'opium, qui a lieu principalement en Asie du Sud-Ouest et, dans une moindre mesure, en Asie du Sud-Est et en Amérique latine, a chuté en 2015 de 38 % par rapport à l'année précédente, pour atteindre quelque 4 770 tonnes, c'est-à-dire le niveau enregistré à la fin des années 1990. Cette baisse s'explique notamment par un déclin de la production en Afghanistan (recul de 48 % par rapport à l'année précédente), dû essentiellement aux faibles rendements obtenus dans les provinces du sud. Cependant, avec 183 000 hectares, le pays comptait tout de même pour près des deux tiers de la superficie totale des cultures illicites de pavot à opium, en baisse de 11 % par rapport aux 281 000 hectares environ de l'année précédente.

Selon les estimations de l'ONUDC, le nombre de consommateurs d'opiacés (opium, morphine et héroïne) dans le monde a peu évolué ces dernières années, et les opiacés ont encore touché quelque 17 millions de personnes en 2014. Il semble peu probable que la forte baisse de la production d'opium enregistrée en 2015 entraîne de graves pénuries sur le marché mondial de l'héroïne compte tenu des hauts niveaux de production des années précédentes. En accumulant des stocks d'opium récolté au cours des années précédentes ou en les épuisant, il est possible de lisser les variations annuelles de la production et de maintenir à son niveau l'offre d'héroïne à destination des marchés de consommation. Ce n'est probablement qu'après une période de baisse soutenue que des répercussions se feraient sentir sur le marché de l'héroïne.

En effet, le marché mondial des opiacés semble stable en dépit d'importantes variations régionales. Certains éléments portent à croire que la consommation d'héroïne serait actuellement en pleine recrudescence dans certains pays où elle était auparavant en recul. L'usage d'héroïne a augmenté en Amérique du Nord ces 10 dernières années, ce qui s'est traduit par une augmentation du nombre de décès liés à cette substance. En revanche, les évolutions à long terme sont restées stables ou à la baisse en Europe occidentale et centrale depuis la fin des années 1990. Certains signes laissent toutefois présager une forte reprise, dans la mesure où l'on a observé une hausse de la disponibilité et de la consommation sur certains marchés européens, ainsi qu'une augmentation sensible du volume des saisies individuelles d'héroïne à destination de l'Europe. Parallèlement, si l'on se base sur les tendances perçues dont il a été fait part à l'ONUDC, il semblerait que l'usage d'opioïdes ait progressé en Afrique. Selon les experts, la consommation d'opiacés n'aurait globalement guère évolué au cours de la période 1998-2014 en Asie, tandis qu'elle aurait diminué en Océanie.

À l'échelle mondiale, le volume des interceptions d'opiacés a doublé entre la période 1980-1997 (particulièrement après la session extraordinaire que l'Assemblée générale a consacrée à la lutte commune contre le problème mondial de la drogue en 1998) et la période 2009-2014. Les plus importantes saisies d'opiacés ont eu lieu en Asie du Sud-Ouest, puis en Europe. Avec 75 % des saisies mondiales d'opium, 61 % des saisies mondiales de morphine et 17 % des saisies mondiales d'héroïne, la République islamique d'Iran est le pays ayant signalé les plus grandes quantités cumulées d'opiacés saisis en 2014.

La route dite "des Balkans", qui permet d'approvisionner l'Europe occidentale et centrale en opiacés afghans en passant par la République islamique d'Iran et la Turquie puis l'Europe du Sud-Est, demeure le principal itinéraire suivi pour le trafic d'héroïne. Cependant, la route dite "du Sud", reliant par voie maritime le Pakistan ou la République islamique d'Iran à la région du Golfe, à l'Afrique (particulièrement l'Afrique de l'Est), à l'Asie du Sud et, dans une moindre mesure, à l'Asie du Sud-Est, à l'Océanie et à l'Amérique du Nord, a gagné en importance. Parallèlement, le trafic d'opiacés empruntant la route dite "du Nord", qui part de l'Afghanistan pour rejoindre les États voisins d'Asie centrale, la Fédération de Russie et d'autres pays de la Communauté d'États indépendants, connaît actuellement un regain après avoir diminué sur la période 2008-2012. Par ailleurs, le trafic en provenance du Triangle d'Or est en hausse, ce qui s'explique notamment par l'augmentation des niveaux de production d'opium enregistrée au Myanmar après 2006. En outre, le trafic d'héroïne continue de croître dans les Amériques, où les saisies d'héroïne et de morphine sont passées de 4 tonnes en moyenne sur la période 1998-2008 à 7 tonnes annuelles sur la période 20092014, ce qui concorde avec l'augmentation de la production d'opium signalée en Amérique latine au cours de ces mêmes périodes.

Cocaïne

  

Principaux flux du trafic de cocaïne


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Source: ONUDC, réponses au questionnaire destiné aux rapports annuels et base de données sur les opérations de saisie.

Notes: Les itinéraires de trafic représentés sur la carte devraient être considérés comme une indication générale, basée sur des analyses de données, plutôt que comme des tracés exacts. Ces analyses s'appuient sur les données relatives aux saisies de drogues officielles effectuées le long des itinéraires de trafic ainsi que sur les rapports officiels de pays et les réponses aux questionnaires destinés aux rapports annuels. Les flux s'écartent parfois vers d'autres pays situés le long des itinéraires, et de nombreux flux secondaires peuvent ne pas être représentés. Les frontières indiquées sur la carte n'impliquent ni reconnaissance ni acceptation officielles de la part de l'Organisation des Nations Unies. Les tirets représentent les frontières non déterminées. La ligne en pointillé représente approximativement la Ligne de contrôle au Jammu-et-Cachemire convenue par l'Inde et le Pakistan. Le statut définitif du Jammu-et-Cachemire n'a pas encore été arrêté par les parties. La frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud n'a pas encore été définitivement arrêtée.

Bien qu'en 2014 la culture mondiale du cocaïer ait augmenté de 10 % par rapport à l'année précédente, sa superficie totale était la deuxième des plus petites qui aient été enregistrées depuis la fin des années 1980. La fabrication mondiale de cocaïne était légèrement plus élevée que l'année précédente, mais demeurait tout même inférieure de 24 à 27 % au chiffre record atteint en 2007, retombant ainsi à peu de chose près aux niveaux signalés à la fin des années 1990. Toutefois, certains signes laissent à penser que l'augmentation constatée en 2014 n'est pas une évolution ponctuelle et qu'elle pourrait s'être poursuivie en 2015.

Le trafic de cocaïne passant par l'Afrique semble se développer de nouveau, et on note des indices d'augmentation du trafic à destination de l'Asie, notamment de l'Asie de l'Est et du Sud-Est et du Moyen Orient. En effet, les saisies réalisées en Asie ont triplé, passant de 0,45 tonne annuelle en moyenne sur la période 1998-2008 à 1,5 tonne annuelle au cours de la période 2009-2014. En Océanie, le marché semble se stabiliser, après avoir connu une croissance rapide ces 10 dernières années.

En dépit de ces variations régionales, la prévalence annuelle de l'usage de cocaïne est demeurée pour l'essentiel stable à l'échelle mondiale sur la période 1998-2014, variant entre 0,3 et 0,4 % de la population âgée de 15 à 64 ans. Toutefois, compte tenu de la croissance de la population, le nombre de consommateurs a augmenté, passant de 14 millions environ en 1998 à 18,8 millions en 2014. D'un autre côté, il estprob-able que la consommation de cocaïne par habitant ait diminué, en raison de la baisse de l'offre sur la période 20072014, qui s'explique principalement par une chute de la production dans la région andine. Par ailleurs, le nombre de gros consommateurs a baissé en Amérique du Nord. Au final, on assiste à une contraction globale du marché bien que le nombre de consommateurs (qui font un usage de cocaïne récréatif plutôt que chronique) continue de croître sur plusieurs marchés émergents.

Cannabis

Malgré les changements majeurs qui sont apparus dans certaines régions, la consommation mondiale de cannabis est restée relativement stable ces dernières années. En 2014, quelque 3,8 % de la population mondiale en avaient consommé durant l'année écoulée, une proportion n'ayant guère évolué depuis 1998. Compte tenu de la croissance de la population mondiale, cette situation s'est traduite par une augmentation du nombre total de consommateurs sur la même période. Les Amériques, suivies par l'Afrique, restent les régions où l'on enregistre les plus fortes production et consommation d'herbe de cannabis: en 2014, les trois quarts environ des saisies mondiales d'herbe ont été réalisées dans les Amériques, surtout en Amérique du Nord tandis que 14 % l'ont été en Afrique et 5 % en Europe. En revanche, l'Europe, l'Afrique du Nord, ainsi que le Proche et le Moyen-Orient demeurent les principaux marchés de la résine de cannabis, toujours produite en majeure partie au Maroc et en Afghanistan, comme le montrent les informations fournies par les États Membres concernant la provenance de la résine saisie. En 2014, les plus grandes quantités de résine de cannabis saisies, représentant 40 % du total, l'ont de nouveau été en Europe occidentale et centrale.

Aux États-Unis, s'il est nécessaire de suivre de près les conséquences qu'ont sur la santé et sur les systèmes de justice pénale les mesures prises par les États ayant légalisé la consommation de marijuana à des fins récréatives, les données récentes que ceux-ci ont communiquées indiquent une augmentation de l'usage de cannabis et des valeurs enregistrées pour certains indicateurs de santé et de sécurité publiques, à savoir les consultations d'urgence, les hospitalisations, les accidents de la route et les décès liés à cette substance. En revanche, les arrestations et les procès liés au cannabis ainsi que l'orientation vers des services de traitement par le système de justice pénale ont diminué.

Drogues de synthèse: stimulants de type amphétamine et nouvelles substances psychoactiv

  

Corrientes interregionales de tráfico de metanfetamina, 2011-2014


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Source: ONUDC, réponses au questionnaire destiné aux rapports annuels

Notes: Le point de départ des flèches ne désigne par nécessairement la source/le lieu de fabrication de la méthamphétamine. Les flèches représentent les flux tels qu'ils sont perçus par les pays destinataires. Elles correspondent au sens du trafic de méthamphétamine et ne sont pas une indication de la quantité en jeu. Les frontières indiquées sur la carte n'impliquent ni reconnaissance ni acceptation officielles de la part de l'Organisation des Nations Unies. Les tirets représentent les frontières non déterminées. La ligne en pointillé représente approximativement la Ligne de contrôle au Jammu-et-Cachemire convenue par l'Inde et le Pakistan. Le statut définitif du Jammu-et-Cachemire n'a pas encore été arrêté par les parties. La frontière entre le Soudan et le Soudan du Sud n'a pas encore été définitivement arrêtée.

Après être restées relativement stables pendant trois ans, les saisies de stimulants de type amphétamine ont atteint un nouveau chiffre record de 170 tonnes en 2014. Depuis 2009, les saisies mondiales d'amphétamine ont varié chaque année entre 20 et 46 tonnes environ, alors que celles d'"ecstasy" ont plus que doublé en 2014, atteignant 9 tonnes, à rapprocher des 4 à 5 tonnes saisies annuellement en moyenne depuis 2009. Ces dernières années, les saisies de méthamphétamine ont représenté la part la plus importante des saisies mondiales annuelles de stimulants de type amphétamine et, bien que la méthamphétamine soit présente sur tous les marchés de ces stimulants à travers le monde, elle est particulièrement répandue sur ceux d'Asie de l'Est et du Sud-Est et d'Amérique du Nord. Depuis 2009, prises ensemble, ces sous-régions ont été à l'origine chaque année de la plupart des saisies mondiales de cette substance. Par rapport aux autres sous-régions, l'Amérique du Nord a toujours signalé, chaque année, la plus grosse quantité de méthamphétamine saisie, alors même qu'entre 2009 et 2014, les saisies réalisées en Asie de l'Est et du Sud-Est ont presque quadruplé.

En Océanie, les saisies de méthamphétamine sont en forte hausse depuis 2012. De plus en plus de personnes consomment ce produit sous forme cristalline dans la région. On a également remarqué une consommation plus fréquente chez certains groupes d'usagers, une augmentation de la pureté de la substance et une baisse des prix ajustés en fonction de celle-ci. Tous ces éléments pourraient aggraver les effets néfastes de la méthamphétamine sur la santé des individus et sur la société en général.

De grandes quantités de comprimés d'amphétamine présentés comme étant du "Captagon" auraient été saisies au Moyen-Orient entre mars 2014 et novembre 2015. En 2013 et 2014, l'amphétamine saisie au Moyen-Orient semblait provenir essentiellement du Liban et de la République arabe syrienne. Au cours de la même période, certains pays du Moyen-Orient ayant signalé des saisies ont déclaré que la substance était destinée à être acheminée clandestinement vers d'autres destinations de la région.

Le marché des nouvelles substances psychoactives reste caractérisé par le fait qu'un grand nombre de nouvelles substances sont signalées. Bien que la collecte de données pour l'année 2015 soit encore en cours, 75 nouvelles substances ont été portées à l'attention de l'ONUDC pour la première fois, contre 66 seulement pour toute l'année 2014. Entre 2012 et 2014, la plupart des substances nouvellement apparues appartenaient au groupe des cannabinoïdes de synthèse; en revanche, les données communiquées à ce jour pour l'année 2015 témoignent d'une situation différente: premièrement, presque autant de cathinones de synthèse (20) que de cannabinoïdes de synthèse (21) ont été signalées pour la première fois; deuxièmement, un large éventail de substances (21) n'appartenant à aucun des principaux groupes recensés au cours des années précédentes ont été signalées pour la première fois, parmi lesquelles se trouvaient des opioïdes de synthèse (dérivés du fentanyl par exemple) et des sédatifs (benzodiazépines notamment).

Ces dernières années, de grandes quantités de nouvelles substances psychoactives ont été saisies. Le marché mondial des substances synthétiques entrant dans cette catégorie reste dominé par les cannabinoïdes de synthèse, dont il a été saisi 32 tonnes. En 2014, sur un total de 34 tonnes saisies à l'échelle mondiale, abstraction faite des substances d'origine végétale et de la kétamine, c'est en Amérique du Nord que les plus grandes quantités saisies ont été signalées, celles-ci se montant à 26,5 tonnes aux Etats-Unis. Cependant, les saisies mondiales de cathinones de synthèse n'ont cessé d'augmenter depuis qu'il en a été signalé pour la première fois en 2010; elles ont triplé en 2014 par rapport à l'année précédente, pour atteindre 1,3 tonne.

La surveillance qu'exerce l'ONUDC sur les nouvelles substances psychoactives depuis 2008 lui a permis de constater que, jusqu'à présent, la situation de l'offre était plutôt dynamique et caractérisée à la fois par une certaine persistance (quelques substances font leur apparition, se répandent et se maintiennent pendant plusieurs années) et des variations (de nombreuses substances ne sont disponibles que pour une courte durée ou qu'au niveau local).

LE PROBLÈME MONDIAL DE LA DROGUE ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE

"Nous nous félicitons du Programme de développement durable à l'horizon 2030, et notons que les efforts déployés pour atteindre les objectifs de développement durable et pour traiter efficacement le problème mondial de la drogue sont complémentaires et se renforcent mutuellement. "

Document final de la session extraordinaire de l'Assemblée générale sur le problème mondial de la drogue, intitulé "Notre engagement commun à aborder et combattre efficacement le problème mondial de la drogue"

Le problème mondial de la drogue est étroitement lié à tous les aspects du développement durable. L'analyse qui en est faite et les mesures qui sont prises pour y remédier, dans la perspective des objectifs de développement durable, révèlent les mécanismes de cette interaction. Tous les domaines du développement durable, tels qu'ils sont répertoriés dans les 17 objectifs de développement durable, influent sur la nature et la dynamique du problème de la drogue. Dans le même temps, les conséquences que ce dernier et les politiques antidrogue ont sur le développement se font sentir aux niveaux individuel, collectif et national. À partir de l'analyse de cette interdépendance, les 17 objectifs de développement durable ont été répartis en cinq grands domaines: développement social, développement économique, environnement durable, sociétés pacifiques, justes et inclusives, et partenariats.

Développement social

Objectif 10 de développement durable. Réduire les inégalités dans les pays et d'un pays à l'autre

Ne pas accepter ou comprendre que la toxicomanie est un problème de santé alimente le cycle de la marginalisation dont sont souvent victimes les personnes souffrant de troubles liés à l'usage de drogues et rend ainsi leur rétablissement et leur insertion sociale plus difficiles. Par ailleurs, la stigmatisation envers les toxicomanes, notamment de la part du personnel des services de santé, peut nuire à l'efficacité des traitements prodigués à ceux qui en ont le plus besoin.

  

Les conséquences de l'usage de drogues sur la santé augmentent avec le développement


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Sources: Indice de développement humain du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD); les données relatives à la charge de morbidité (années de vie ajustées sur 'incapacité) proviennent de ITnstitute for Health Metrics and Evaluation de l'Université de Washington, GBD Compare, 201 5. Disponible à l'adresse http://vizhub.healthdata.org/gbd-compare

Santé

Objectif 3 de développement durable. Permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge

Selon l'étude sur la charge mondiale de morbidité, en 2013, les opioïdes, la cocaïne, les amphétamines et le cannabis étaient ensemble la cause de près de 12 millions d'années de vie perdues en raison de décès prématurés ou de handicaps, dont plus de 8 millions en raison de troubles liés à l'usage d'opioïdes. Les conséquences néfastes des drogues sur la santé dépendent entre autres de leur mode d'administration. Les personnes qui pratiquent l'injection, en particulier, sont beaucoup plus exposées au risque d'overdose ou d'infection, y compris de transmission de virus à diffusion hématogène tels que le VIH et le virus de l'hépatite C, que celles qui fument, avalent, sniffent ou inhalent des drogues. La consommation de drogues peut avoir des répercussions sur la santé de la société en général étant donné que les usagers de drogues injectables peuvent transmettre des maladies sexuellement transmissibles à d'autres sous-groupes et à la population dans son ensemble. Plusieurs études corroborent par ailleurs l'hypothèse selon laquelle la consommation de certains stimulants (par injection ou non) peut influencer le comportement sexuel en lui même et augmenter ainsi la probabilité de conduites à haut risque et de transmission par voie sexuelle — un phénomène qui suscite des préoccupations, notamment en ce qui concerne certains groupes à risque tels que les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes.

Parmi ses cibles, l'objectif 3 de développement durable prévoit expressément le renforcement de la prévention et du traitement de l'abus de substances psychoactives. La mise en place de politiques antidrogue fondées sur des données scientifiques peut, grâce à des mesures de prévention et de traitement par exemple, atténuer les conséquences néfastes que la consommation de drogues a pour la santé. Mais lorsque les politiques ne sont pas tout à fait conformes aux principes des conventions internationales relatives au contrôle des drogues, elles peuvent porter atteinte à l'accessibilité des drogues placées sous contrôle aux fins de la recherche et de la médecine. Les trois quarts de la population mondiale n'ont toujours, au mieux, qu'un accès limité aux médicaments contenant des stupéfiants, et les possibilités qu'ils bénéficient d'une prise en charge de la douleur modérée à forte sont faibles. La cible 3.b des objectifs de développement durable donne acte du fait qu'il importe de garantir l'accessibilité des médicaments essentiels, qui comprennent généralement des drogues placées sous contrôle telles que la morphine, la codéine, le diazépam et le phénobarbital.

Les femmes, les filles et les adolescentes

La consommation de drogues compromet la dimension du développement durable relative à l'égalité des sexes et à l'autonomisation des femmes et des filles. Il existe de nettes différences entre les hommes et les femmes pour ce qui est des drogues de prédilection et des vulnérabilités aux drogues. Conjuguée au fait que la majorité des usagers des divers types de drogues sont des hommes, cette situation a pour effet que le système de soins dans son ensemble risque de ne pas être à même de répondre correctement aux besoins des femmes toxicomanes, dont l'accès à ces services est en outre insuffisant.

Le problème mondial de la drogue et le développement durable: une relation complexe

Objectif 5 de développement durable. Parvenir à l'égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles

Les femmes touchées par la toxicomanie et le VIH sont plus vulnérables et plus stigmatisées que les hommes. Elles souffrent plus qu'eux de troubles de santé mentale cooccurrents et sont plus susceptibles d'avoir été victimes de violences et de maltraitances. En outre, ce sont souvent elles qui portent le lourd fardeau de la violence et de la déchéance lié à la toxicomanie de membres de la famille, ce qui entrave la concrétisation de la cible de développement durable visant à éliminer toutes les formes de violence faites aux femmes et aux filles. Les délinquantes et les détenues, surtout celles qui sont atteintes de troubles liés à l'usage de drogues, se trouvent dans des situations particulièrement difficiles du fait que, dans bien des cas, le système de justice pénale n'est pas encore en mesure de répondre aux besoins particuliers des femmes.

La consommation de drogues touche les individus au moment de leur vie où ils sont le plus productifs. Lorsque les jeunes sont pris au piège de cette consommation, voire qu'ils font trafic de drogues, et qu'ils ne peuvent donc pas se consacrer à un travail légitime ou à des études, cela soulève effectivement différents obstacles au développement des personnes et des communautés.

Développement économique

Objectif 1 de développement durable. Éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde

L'ampleur et la nature des dégâts que cause le problème de la drogue varient selon les pays, qu'ils soient développés ou en développement, mais d'une manière ou d'une autre, tout le monde est touché. La vulnérabilité aux drogues, qu'il s'agisse de culture, de production, de trafic ou de consommation, est un fait dans tous les pays quel que soit leur niveau de développement.

  

L'influence du revenu sur l'usage de drogues est fonction du type de drogue considéré


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Source: Banque mondiale (pour les niveaux de revenu) et évaluations de l'ONUDC d'après les réponses au questionnaire destiné aux rapports annuels et d'autres sources officielles (pour les données relatives à l'usage de drogues).
* Y compris les stimulants soumis à prescription.

Le lien entre le développement économique et les drogues est particulièrement manifeste dans le cas de la culture illicite de plantes servant à fabriquer des drogues. Dans les zones rurales, certaines réalités socioéconomiques telles que la pauvreté et le manque de moyens de subsistance durables sont d'importants facteurs de risque qui incitent les agriculteurs à se livrer à la culture illicite. Ces phénomènes témoignent également de faibles niveaux de développement qui, associés à d'autres problèmes de développement touchant à la sécurité et à la gouvernance, favorisent la culture illicite à grande échelle.

Les groupes les plus aisés du point de vue socioéconomique sont plus susceptibles d'entamer une consommation de drogues que les moins favorisés, mais ce sont ces derniers qui paient le prix le plus élevé parce qu'ils sont plus susceptibles de devenir dépendants

La pauvreté est aussi étroitement liée à la consommation de drogues, bien que ce lien soit complexe et produise un effet de synergie. En effet, cette consommation touche avant tout les personnes en situation de pauvreté par rapport à la société dans laquelle ils vivent, comme on le constate clairement dans les pays les plus riches. De façon plus générale, il existe une forte corrélation entre difficultés socioéconomiques et troubles liés à l'usage de drogues. On retrouve cette même relation lorsqu'on observe les diverses répercussions de la marginalisation et de l'exclusion sociale, telles que le chômage et le faible niveau d'instruction.

Outre le développement, de nombreux facteurs, notamment la situation géographique, influent sur le problème de la drogue dans un pays donné. La proximité d'une région productrice de drogues ou d'importants itinéraires de trafic, par exemple, peut expliquer les taux supérieurs à la moyenne qu'atteignent la consommation d'opiacés au Proche et Moyen-Orient et en Asie du Sud-Ouest et celle de cocaïne, notamment de "crack", en Amérique du Sud et en Afrique de l'Ouest. Néanmoins, si l'on répartit les pays par niveau de revenu, on s'aperçoit que ceux qui ont un revenu élevé enregistrent généralement une plus forte prévalence de l'usage de drogues au cours de l'année écoulée, et ce, quel que soit le type de substance considéré. Les drogues susceptibles de se vendre relativement cher et donc de générer plus de profits pour les trafiquants s'implantent plus facilement dans les pays où les niveaux de revenu par habitant sont plus élevés qu'ailleurs. Dans le cas des substances telles que la cocaïne et l'héroïne, le niveau de développement économique contribue à créer des marchés de consommation considérables en termes de nombre de consommateurs et de recettes générées.

Les différents niveaux d'aisance socioéconomique d'un pays à l'autre ont également des conséquences sur le type de drogues consommées. Par exemple, aux États-Unis, le lien entre chômage et usage de drogues est beaucoup plus fort dans le cas du "crack" que d'autres formes de cocaïne.

Les marchés de la drogue tendent à être influencés par les particularités locales, tant dans les pays développés que dans les pays en développement, mais pour certaines substances, notamment la cocaïne et les substances synthétiques, des marchés considérables se sont établis dans les pays développés avant de s'étendre aux pays en développement. L'apparition de l"'ecstasy" et d'autres hallucinogènes en Amérique du Nord et en Europe, ainsi que la progression ininterrompue de la consommation de nouvelles substances psychoactives en Amérique du Nord, en Europe et au Japon en sont des exemples frappants. Le lien entre le développement et le problème de la drogue doit ainsi être envisagé en termes dynamiques.

Environnement durable

Cible 15-5 des objectifs de développement durable. Prendre d'urgence des mesures énergiques pour réduire la dégradation du milieu naturel, mettre un terme à l'appauvrissement de la biodiversité et, d'ici à 2020, protéger les espèces menacées et prévenir leur extinction

Culture de la coca et déforestation: mise en perspective

El cultivo ilícito tiene lugar con frecuencia en zonas boscosas

Les cultures illicites ont souvent lieu en zones forestières et contribuent à la déforestation lorsque des terres boisées sont défrichées. Par ailleurs, elles sont souvent pratiquées dans des zones critiques de biodiversité, qui hébergent de nombreuses espèces à l'habitat naturel limité et qui sont pour certaines protégées. Elles se situent généralement à proximité de la frontière de zones agricoles qui marquent la limite entre la forêt vierge et les zones développées, et elles peuvent engendrer un déboisement. Bien que les données empiriques et l'analyse approfondie de la situation n'étayent pas la thèse selon laquelle les cultures illicites seraient l'un des principaux facteurs de déforestation, les recherches portent à croire que les failles du développement rural n'y sont pas étrangères. En outre, l'étude du problème a révélé que le trafic de drogues pouvait avoir en matière de déforestation des conséquences directes, liées à la construction d'infrastructures telles que des pistes d'atterrissage et des routes illégales, mais aussi indirectes, par la privatisation de terrains publics pour la création de "narcodomaines". La déforestation peut également être provoquée par l'éradication des cultures illicites, qui amène ceux qui les pratiquent à les déplacer dans des lieux qui soient inaccessibles aux services de détection et de répression.

Le rejet de produits chimiques employés dans la fabrication illicite de cocaïne et d'opiacés peut aussi avoir des conséquences néfastes sur l'environnement puisqu'il entraîne une augmentation de la pollution et expose les communautés rurales à des risques sanitaires. Dans le cas des drogues synthétiques, ces conséquences apparaissant en zone urbaine non seulement créent des risques sanitaires mais peuvent aussi avoir des répercussions sur l'environnement urbain et industriel.

Sociétés pacifiques, justes et inclusives

Violence, état de droit, corruption, flux financiers illicites

Objectif 16 de développement durable. Promouvoir l'avènement de sociétés pacifiques et ouvertes à tous aux fins du développement durable, assurer l'accès à tous à la justice et mettre en place, à tous les niveaux, des institutions efficaces, responsables et ouvertes à tous

  

À l'échelle mondiale, il n'existe pas de relation nette entre l'offre de drogues et la violence


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Source: ONUDC, statistiques relatives aux homicides (2015). Disponibles à l'adresse www.unodc.org/unodc/en/data-and-analysis/homicide.html.

Parmi les cibles relatives à l'objectif 16 de développement durable, celles visant à réduire la violence, à promouvoir l'état de droit et l'accès à la justice et à lutter contre la criminalité organisée, la criminalité économique (corruption et pots-de-vin) et les flux financiers illicites entretiennent toutes des liens étroits avec le problème mondial de la drogue et les mesures prises pour y faire face.

Le lien entre trafic de drogues et violence observé dans les pays d'Amérique latinea n'est pas systématique


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Sources: Les estimations du flux de cocaïne proviennent de l'Office of National Drug Control Policy des États-Unis, "Cocaine Smuggling in 2010", janvier 2012; les données relatives aux homicides proviennent de l'ONUDC (2016). Disponibles à l'adresse www.unodc.org/unodc/en/data-and-analysis/homicide.html

ª Des données étaient disponibles concernant 13 pays.
b Tous les flux sont exprimés en quantité par habitant.

  

Différentes formes de violence découlent de différents niveaux d'intensité du problème de la drogue. La consommation de drogues peut provoquer des actes de violence liés aux effets psychoactifs de celles-ci, mais aussi des actes criminels que leurs auteurs commettent en vue de se procurer les fonds nécessaires à l'achat de drogues. Néanmoins, la violence relative aux drogues la plus intense est celle qui est liée au trafic (violence systémique), comme en atteste la situation qui prévaut en Amérique latine. Le traumatisme occasionné par la violence peut aussi augmenter la vulnérabilité face à la consommation de drogues.

Pourtant, la production et le trafic de drogues n'engendrent pas nécessairement la violence, comme il ressort des faibles taux d'homicides constatés dans les pays de transit touchés par le trafic d'opiacés en Asie. Les caractéristiques du marché et des organisations de trafiquants peuvent expliquer ces différences: si la concurrence est parfois source de violence sur les marchés illicites, la structure interne des réseaux de trafic, dont le degré de cohésion et l'organisation hiérarchique varient, est aussi susceptible de jouer un rôle à cet égard.

  

Près d'un détenu sur cinq est emprisonné pour une infraction liée à la drogue


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Source: Note du Secrétariat sur les tendances et les nouveaux problèmes en matière de criminalité dans le monde et les mesures prises dans le domaine de la justice pénale pour y faire face (E/ CN.15/2016/10).

Les profits découlant du commerce de drogues incitent fortement les groupes armés non étatiques, notamment les organisations terroristes, à se livrer au trafic de drogues ou à le faciliter. Dans un certain nombre de pays, les ressources générées sur les marchés illicites tels que les marchés de la drogue ont contribué à compliquer et à prolonger les conflits armés et les ont bien souvent rendus plus meurtriers. En général, le commerce de drogues prospère dans les pays où la présence étatique est faible, où la loi n'est pas appliquée de manière équitable et où le risque de corruption existe. Dans le même temps, la richesse et le pouvoir des organisations de trafiquants de drogues sont tels qu'ils leur permettent d'acheter la protection des services de détection et de répression, des hommes politiques et des entreprises, ce qui contribue à renforcer la corruption.

Des profits sont faits tout au long de la chaîne de production et de distribution de drogue, mais c'est lors de la dernière étape qu'ils sont le plus élevés. Selon une étude récente de l'ONUDC, près de la moitié des profits engrangés sur le principal itinéraire de trafic d'héroïne entre l'Afghanistan et l'Europe provient des quatre plus grands marchés de consommation européens: l'Allemagne, la France, l'Italie et le Royaume-Uni. Néanmoins, comparé à l'économie licite, le poids de l'économie illicite tend à être plus élevé dans les pays producteurs de drogues, en raison notamment de la moindre ampleur du secteur structuré. C'est tout particulièrement le cas en Afghanistan où, selon les estimations de l'ONUDC, la valeur totale de l'économie illicite des opiacés a atteint 2,8 milliards de dollars en 2014, soit un montant correspondant à 13 % du produit intérieur brut (PIB) du pays. Le blanchiment de ces profits illégaux passe par différents canaux, qui vont des techniques décentralisées les plus élémentaires, telles que les mandats postaux ou l'envoi de fonds, à des moyens sophistiqués tels que le recours à des sociétés écrans. Ces différents flux financiers illicites sont essentiels à la survie des groupes criminels et constituent une menace majeure pour le développement durable.

Partenariats

Objectif 17 de développement. Renforcer les moyens de mettre en œuvre le Partenariat mondial pour le développement durable et le revitaliser

L'objectif 17 de développement durable est étroitement lié aux principes de la coopération internationale et de la responsabilité partagée inscrits dans les conventions relatives au contrôle des drogues. Néanmoins, lorsqu'on analyse conjointement l'aide qu'apportent les donateurs dans le domaine du développement et celle qu'ils apportent aux fins de la lutte contre la drogue, des tendances opposées apparaissent. Dans l'ensemble, l'aide publique au développement a augmenté alors que l'assistance en rapport avec la drogue a sensiblement diminué depuis 2008.

Quelles sont les conséquences des mesures antidrogue sur le développement durable?

Efforts de réduction de l'offre et de la demande de drogues

Les mesures prises pour éliminer les cultures illicites peuvent avoir des répercussions sur la source de revenus des agriculteurs et des ouvriers agricoles et sur leurs perspectives d'emploi. Les recherches ont également permis de démontrer qu'elles n'avaient de résultats positifs en matière de développement dans les communautés touchées que lorsqu'elles comportaient des mesures visant à garantir des moyens de subsistance de remplacement et à rétablir la sécurité et l'état de droit. Par exemple, les mesures prises en Colombie ou au Pérou ont montré que les programmes de développement alternatif peuvent contribuer à affaiblir les liens de la population avec les groupes armés et le trafic de drogues.

Les interventions des services de détection et de répression visent à rétablir l'état de droit, qui est le fondement de la gouvernance et du développement durable, et elles peuvent également influencer la disponibilité des drogues sur les marchés illicites, à la fois en ciblant l'offre elle-même pour la réduire, et en augmentant le risque auquel s'exposent les trafiquants, ce qui conduit à une augmentation du prix sur les marchés de consommation. Cependant, les activités de détection et de répression menées par les autorités peuvent également provoquer des actes de violence, notamment lorsqu'elles touchent la structure interne et externe des marchés illégaux. Des recherches laissent à penser que si les services de détection et de répression s'attaquent à la fois aux protagonistes et aux maillons du trafic de drogues qui génèrent le plus de profit et de violence, ils peuvent faire considérablement reculer la violence. Par contre, les stratégies visant à démanteler rapidement les organisations de trafiquants et à réduire la violence à court terme peuvent parfois entraîner une escalade de celle-ci.

Lorsqu'ils sont fondés sur des données scientifiques, les mesures de prévention, d'intervention précoce, de traitement, de prise en charge, de rétablissement, de réadaptation et d'insertion sociale et tout le système de soins destiné aux usagers de drogues permettent de réduire la consommation et de limiter ainsi son impact sur la santé publique, qui est l'un des éléments essentiels au bien-être de la société. Certaines des mesures susmentionnées ont déjà permis de diminuer différentes catégories de comportements à risque, tels que l'agressivité et l'absentéisme scolaire. Ces avancées concernent à la fois les usagers de drogues eux-mêmes et la société en général, et ces mesures se sont révélées efficaces pour prévenir, par exemple, la transmission du VIH et de l'hépatite virale.

Les interventions visant à réduire la demande de drogues donnent de bons résultats lorsqu'elles s'appuient sur des mesures fondées sur des données factuelles, visant notamment à réduire au minimum les conséquences néfastes de l'abus de drogues sur la santé publique et la société, telles que des programmes d'échange d'aiguilles et de seringues adaptés, des traitements de substitution aux opiacés, des traitements antirétroviraux et d'autres interventions propres à prévenir la transmission du VIH, de l'hépatite virale et d'autres maladies à diffusion hématogène associées à l'usage de drogues. Néanmoins, le placement en centre de traitement fermé des usagers de drogues et des toxicomanes, surtout des plus jeunes et des plus vulnérables, ne fait souvent qu'empirer la situation — déjà difficile — dans laquelle ils se trouvent.

Systèmes de justice pénale et coûts des politiques antidro

Comme c'est le cas en matière de détection et de répression en général, les opérations antidrogue contribuent à promouvoir l'état de droit et une justice équitable lorsqu'elles sont mises en œuvre par des institutions impartiales, transparentes et efficaces, dans le respect des normes en matière de droits de l'homme. Mais lorsque les opérations de détection et de répression vont à l'encontre de ces principes, elles peuvent donner lieu à une répression aveugle et à la violation des droits des citoyens.

Il ressort des données limitées dont on dispose que plus des trois quarts des personnes détenues pour des infractions liées à la drogue dans le monde sont condamnées pour trafic, et moins d'un quart pour des infractions liées à la consommation personnelle. Il existe des différences d'une juridiction à une autre en termes de définitions, de pouvoir discrétionnaire en matière de poursuites ou de nature et de sévérité des sanctions applicables en cas d'infractions liées à la drogue. Dans certaines régions, des pays ont des méthodes plus punitives, qui peuvent conduire à l'incarcération, lorsque des personnes sont appréhendées pour des infractions mineures liées à la drogue, telles que la détention de petites quantités de substances destinées à la consommation personnelle. En revanche, plusieurs pays ont décidé de limiter les peines en adoptant des mesures de substitution à l'incarcération ou aux sanctions (amendes, avertissements, mises à l'épreuve ou soutien, par exemple) en cas de consommation personnelle de caractère mineur sans circonstances aggravantes. Le recours excessif à l'emprisonnement pour des infractions de caractère mineur liées aux drogues ne fait pas diminuer la récidive, mais il surcharge les juridictions pénales, qu'il empêche de traiter efficacement la criminalité plus grave. D'après ce qu'on a pu constater, la prestation de services de traitement et de prise en charge fondés sur des données factuelles comme mesure de substitution à l'incarcération pour les auteurs d'infractions usagers de drogues accroît considérablement les chances de rétablissement et réduit de beaucoup les taux de récidive.

Coût des politiques en matière de drogues

De nombreux coûts occasionnés directement ou indirectement par la drogue peuvent être quantifiés en termes monétaires. Plusieurs études économiques ont ainsi été menées, dont les résultats ont révélé que ce coût variait entre 0,07 % et 1,7 % du PIB des pays considérés. En outre, la majorité des pays étudiés présentait un taux élevé de coûts globaux qui s'explique par les interventions de réduction de l'offre et de la demande (prévention, traitement et détection et répression, entre autres) qui sont menées, plutôt que par des pertes en termes de productivité et d'autres coûts indirects. Il importe de garder à l'esprit que, bien que ces études économiques prennent généralement en considération une grande variété de coûts, qui découlent directement ou indirectement du problème de la drogue, elles se limitent souvent à ceux qui peuvent être quantifiés en termes monétaires. Les coûts intangibles, tels que les pertes en vies humaines et la mauvaise qualité de vie, sont rarement quantifiés, et lorsqu'ils le sont, c'est généralement au moyen d'indicateurs non monétaires tels que les années de vie perdues ou les années d'incapacité. Bien que ces études puissent être très utiles pour évaluer les incidences économiques des drogues sur la société, d'autres éléments doivent être pris en compte lorsqu'il s'agit d'évaluer les conséquences du problème mondial de la drogue et de discuter des politiques à suivre pour le combattre.

Effets du développement sur le problème mondial de la drogue

Le développement peut rendre les agriculteurs moins susceptibles de participer à la culture et à la production illicites et peut limiter cette culture de manière durable. Néanmoins, si les efforts de développement ne tiennent pas compte de la vulnérabilité des communautés face à certains phénomènes spécifiques à la drogue, ils pourraient avoir pour effet fortuit de déclencher des dynamiques qui entraîneraient une augmentation de la culture illicite, comme en témoignent les vastes programmes de développement entrepris au début des années 1960 et 1970 dans les Andes.

Des initiatives visant à faciliter le commerce et réduire les obstacles à celui-ci sont mises en place pour promouvoir le développement économique, mais la mondialisation peut également avoir des répercussions sur le trafic de drogues. En encourageant l'expansion du commerce et des réseaux de transport à l'échelle mondiale, l'ouverture commerciale peut aussi faciliter la coopération et la formation d'alliances entre les organisations criminelles de différents pays et, dans certains cas, empêcher les services de détection et de répression de surveiller le commerce international.

La répartition géographique de la consommation de certaines drogues, telles que la cocaïne et les drogues synthétiques, est moins concentrée aujourd'hui que par le passé, tandis que l'Amérique du Nord, l'Europe et l'Océanie sont de plus en plus touchées par l'usage de nouvelles substances psychoac-tives. Dans le même temps, on assiste en de nombreux endroits du monde, où certaines drogues sont encore pratiquement inconnues, à une croissance économique rapide. C'est pourquoi il est essentiel de garder à l'esprit les répercussions que le développement est susceptible d'avoir sur la consommation de drogues, et l'expérience des pays développés peut être instructive à cet égard.

[Source: Office des Nations Unies contre la drogue et le crime - ONUDC, Vienne, 23juin16]

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Corruption and organized crime
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