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12jan16

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Vues de Cuba concernant la réunion sur la responsabilité de protéger et les acteurs non étatiques tenue par le Conseil de sécurité des Nations Unies selon la formule Arria


Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2016/29

Distr. générale
12 janvier 2016
Français
Original : espagnol

Notes verbales identiques datées du 8 janvier 2016, adressées au Secrétaire général et au Président du Conseil de sécurité par la Mission permanente de Cuba auprès de l'Organisation des Nations Unies

La Mission permanente de Cuba auprès de l'Organisation des Nations Unies présente ses compliments au Secrétaire général et au Président du Conseil de sécurité et a l'honneur de leur faire tenir ci -joint les vues de Cuba concernant la réunion sur la responsabilité de protéger et les acteurs non étatiques que le Conseil de sécurité a tenu le 14 décembre 2015 selon la formule Arria.

La Mission cubaine demande que le texte de la présente note verbale et de son annexe soit diffusé comme document du Conseil de sécurité.


Annexe aux notes verbales identiques datées du 8 janvier 2016 adressées au Secrétaire général et au Président du Conseil de sécurité par la Mission permanente de Cuba auprès de l'Organisation des Nations Unies

Vues de Cuba concernant la réunion sur la responsabilité de protéger et les acteurs non étatiques tenue par le Conseil de sécurité le 14 décembre 2015 selon la formule Arria

C'est à l'Assemblée générale qu'il incombe d'examiner les questions relatives au thème de la « responsabilité de protéger ». Cuba considère que l'Assemblée est le seul organe des Nations Unies où peuvent se dérouler des débats transparents et ouverts à tous au cours desquels les opinions et les préoccupations légitimes de tous les États Membres sur un thème qui a des incidences pour tous sont dûment prises en compte.

La question de la responsabilité de protéger continue de susciter de profondes interrogations parmi de nombreux pays, en particulier les petits États en développement, en raison de l'absence de consensus et de définitions concernant les divers aspects d'un concept qu'il serait facile de manipuler à des fins politiques.

Avant que le concept de la responsabilité de protéger puisse être mis en application, l'Assemblée générale doit impérativement s'entendre sur sa portée et ses incidences, unifier son interprétation, veiller à ce qu'il soit universellement reconnu et accepté, et garantir la légitimité des mesures proposées pour sa mise en œuvre.

Le consensus international sur cette question se limite aux dispositions des paragraphes 138 et 139 de la résolution 60/1 de l'Assemblée générale, intitulée « Document final du Sommet mondial de 2005 ». Il serait inexact de prétendre que le principe de la responsabilité de protéger a été adopté dans ce document. Cette « responsabilité » n'est pas tant un principe qu'un concept dont les caractéristiques, règles d'application et mécanismes d'évaluation sont loin d'être définis ou approuvés. La résolution susmentionnée reconnaît uniquement la responsabilité qui incombe à chaque État de protéger ses populations du génocide, des crimes de guerre, du nettoyage ethnique et des crimes contre l'humanité, et celle qui incombe à la communauté internationale d'inciter et d'aider les États à s'acquitter de cette responsabilité.

Les crimes énumérés aux paragraphes 138 et 139 de la résolution 60/1 de l'Assemblée générale sont des actes que tout État doit empêcher, réprimer et dénoncer, qu'ils soient commis dans le cadre de conflits armés internes dans des pays en développement ou, comme ce fut le cas récemment, qu'ils soient le fait de forces d'occupation, de forces de l'ordre ou de forces militaires de pays développés. Cet équilibre, que seul un monde moins sélectif et une Organisation des Nations Unies plus démocratique peuvent maintenir, est bien loin de la réalité actuelle.

Les efforts internationaux déployés pour empêcher ces crimes doivent contribuer à renforcer les buts et principes de la Charte des Nations Unies et du droit international, en particulier l'égalité souveraine, l'intégrité territoriale et l'autodétermination. Cependant, les ambiguïtés inhérentes au concept de la responsabilité de protéger et les conséquences de la mise en œuvre de ses trois piliers contredisent ces buts et principes. C'est pourquoi la primauté des principes d'acceptation volontaire, de demande préalable et de consentement des États doit être reconnue dans le contexte de la responsabilité de protéger.

Certains prétendant par ailleurs élargir la portée de la responsabilité de protéger à des situations que le Document final du Sommet mondial de 2005 ne prévoit pas, il convient de rappeler que ce concept s'applique uniquement aux actes de génocide, aux crimes de guerre, au nettoyage ethnique et aux crimes contre l'humanité.

Certains ont également mis en avant des termes ambigus qui ne figurent pas dans le Document final et ne font pas partie du consensus minimal qui existe sur la responsabilité de protéger. C'est le cas par exemple des termes « atrocités criminelles », « facteurs de risque » et « risques imminents », qui doivent encore être expliqués et approuvés par les mécanismes et bureaux des Nations Unies chargés de leur définition et de leur classification.

Un autre sujet de préoccupation est le manque de clarté concernant les questions suivantes : qui décide de la nécessité de protéger; qui détermine qu'un État manque au devoir de protéger sa population; qui détermine les mesures à prendre, et selon quels critères; comment éviter que la question de la responsabilité de protéger soit utilisée à des fins interventionnistes. La façon dont le consentement de l'État intéressé doit être obtenu avant de prendre des mesures, afin d'éviter que le concept ne serve à justifier un « droit d'ingérence » supposé mais non existant, reste également floue.

Il est inacceptable que des organes tels que le Conseil de sécurité se voient confier des fonctions qui ne leur ont pas été attribuées. Il est tout aussi inacceptable de réinterpréter le concept de sécurité collective entériné dans la Charte des Nations Unies, qui ne s'applique que dans le contexte de menace à la paix et à la sécurité internationales, pour protéger l'État d'une attaque extérieure.

Bon nombre de ceux qui défendent l'élargissement du concept de la responsabilité de protéger, même sans consensus, mettent moins d'enthousiasme à promouvoir la nécessité urgente d' examiner et de traiter les causes profondes de ces situations, comme le sous-développement et la pauvreté, et ne prêtent pas plus attention aux problèmes systémiques qui sont à l'origine des conflits et mènent souvent à des situations extrêmes.

Il est donc préoccupant que les mesures proposées pour prévenir et limiter les risques de crime contre l'humanité se concentrent sur les droits politiques et les libertés fondamentales, sans tenir compte de la précieuse contribution apportées par les initiatives visant à promouvoir les droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que les droits de la troisième génération tels que le droit au développement.

S'évertuer à faire en sorte que la communauté internationale ne reste pas impassible face au génocide, aux crimes de guerre, au nettoyage ethnique et aux crimes contre l'humanité est une noble cause. Il n'en reste pas moins que, dans de nombreux cas, la promotion de la responsabilité de protéger est un moyen détourné de s'approprier un nouvel outil pour s'ingérer dans les affaires intérieures ou cache des tentatives de changement de régime et de subversion visant des pays tiers, qui sont des petits États en développement pour la plupart.


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