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Rapport du Secrétaire général sur la Mission d'appui des Nations Unies en Libye
(août 2015 - fév. 2016)


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Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2016/182

Distr. générale
25 février 2016
Français
Original : anglais

Rapport du Secrétaire général sur la Mission d'appui des Nations Unies en Libye

I. Introduction

1. Établi en application des résolutions 2238 (2015), en date du 10 septembre 2015, et 2259 (2015), en date du 23 décembre 2015, du Conseil de sécurité, le présent rapport retrace les principaux faits survenus sur les plans politique et de la sécurité en Libye, fait le point sur la situation humanitaire et des droits de l'homme dans le pays et décrit les activités menées par la Mission d'appui des Nations Unies en Libye (MANUL) depuis la publication de mon rapport du 13 août 2015 (S/2015/624).

II. Situation politique et conditions de sécurité

2. Malgré la persistance des divisions politiques et institutionnelles, la poursuite des affrontements armés dans le pays et l'expansion des groupes terroristes, le processus politique organisé sous l'égide de l'Organisation des Nations Unies avec le concours des acteurs régionaux et internationaux a progressé. L'instabilité et le conflit ont continué d'aggraver le sort de la population civile dans de nombreuses parties du pays, en particulier à Benghazi. L'attentat-suicide à la voiture piégée perpétré à Zlitan le 7 janvier, l'attaque la plus sanglante depuis la révolution de 2011, illustre la menace croissante que font peser la présence et l'influence grandissantes des affiliés de l'État islamique d'Iraq et du Levant (EIIL) et des autres groupes terroristes.

3. Le 17 décembre, le dialogue politique a franchi une étape décisive avec la signature de l'Accord politique libyen à Skhirat (Maroc). Cet accord a institué le Conseil présidentiel du Gouvernement d'entente nationale, instance composée de neuf membres et dirigée par le Premier Ministre désigné Fayez el-Serraj. Un mois plus tard, le Conseil présidentiel a constitué un gouvernement d'entente nationale et l'a soumis à l'approbation de la Chambre des représentants. Le 25 janvier, la Chambre des représentants a approuvé l'Accord politique libyen, à l'exception de l'article 8 de ses dispositions additionnelles, et demandé au Conseil présidentiel de lui proposer un nouveau gouvernement, ce qu'il a fait le 14 février. Parallèlement, la crise institutionnelle qui voit le Congrès général national et la Chambre des représentants se disputer la légitimité du pouvoir législatif continue d'entraver le processus politique.

Dialogue politique

4. Pendant toute la durée de la période considérée, la MANUL a continué d'œuvrer activement à faciliter la formation d'un gouvernement d'union nationale soutenu par des dispositions de sécurité afin de mettre un terme à la crise institutionnelle et au conflit armé. Si des progrès importants ont été accomplis avec la signature de l'Accord politique libyen et l'annonce de la formation du Gouvernement d'entente nationale, il reste beaucoup à faire pour mettre en œuvre l'Accord, notamment élargir les assises des nouvelles institutions de transition, assurer le transfert pacifique du pouvoir, mettre en place les mesures de sécurité devant permettre au gouvernement de bien fonctionner à Tripoli, capitale du pays, et répondre aux besoins humanitaires de la population libyenne.

5. Dans le prolongement de la dynamique créée par la signature de l'Accord politique libyen le 11 juillet à Skhirat, la MANUL a continué de travailler en étroite collaboration avec les principales parties en Libye en août et en septembre pour favoriser la formation d'un consensus sur les annexes de l'Accord, notamment la composition du Conseil présidentiel et les priorités du Gouvernement d'entente nationale, le règlement intérieur du Conseil d'État, un projet de révision de la Déclaration constitutionnelle, les principes de la politique budgétaire et les dispositions de sécurité.

6. Le dialogue politique a franchi une nouvelle étape le 21 septembre, lorsque les participants sont parvenus à un consensus sur l'ensemble des annexes à l'Accord, à l'exception de la liste des membres du Conseil présidentiel. À la suite d'une réunion de haut niveau en Libye en marge de l'Assemblée générale à New York le 2 octobre, les participants au dialogue se sont retrouvés à Skhirat le 7 octobre pour discuter de la composition du Conseil présidentiel. Le 8 octobre, au terme d'intenses consultations entre les participants au dialogue, une liste de six candidats ayant recueilli le plus large soutien a été annoncée. Trois autres membres ont par la suite été ajoutés après des consultations avec les principaux acteurs politiques dans le but d'améliorer l'équilibre politique et géographique.

7. Malgré l'établissement d'une liste consensuelle de candidats au Conseil présidentiel, ni le Congrès général national ni la Chambre des représentants n'ont fait d'annonces officielles sur l'Accord politique libyen dans les mois qui ont suivi. Lorsque les participants au dialogue politique se sont réunis à Tunis les 10 et 11 décembre, ils ont décidé de procéder à la signature de l'accord.

8. Le 17 décembre, les participants au dialogue politique, dont les vice -présidents du Congrès général national et de la Chambre des représentants, ont signé l'Accord politique libyen à Skhirat. Même si le texte a été signé sans l'approbation officielle du Congrès général national et de la Chambre des représentants, mon Représentant spécial a réaffirmé la volonté de l'Organisation des Nations Unies d'aider le Conseil présidentiel à répondre aux préoccupations de toutes les parties concernées à l'heure de la formation du Gouvernement d'entente nationale, et souligné que la porte restait ouverte à tous ceux qui voudraient rejoindre le chemin de la paix.

9. Parallèlement au volet politique principal, dans le but d'élargir l'assise du processus politique, la MANUL a également réuni des représentants des municipalités libyennes. Après la cérémonie de signature le 17 décembre, mon Représentant spécial a organisé une réunion entre les représentants de 36 municipalités et le Premier Ministre désigné. Le 21 décembre, les représentants de 23 municipalités se sont réunis à Tunis pour signer l'Accord en qualité de témoins. De leur côté, les neuf membres du Conseil présidentiel ont pris leurs fonctions conformément à l'Accord et décidé le 13 janvier de mettre en place le Comité temporaire de sécurité afin de favoriser la mise en œuvre des dispositions de sécurité prévues par l'Accord.

10. Le 18 janvier, le Conseil présidentiel a constitué un Gouvernement d'entente nationale composé de 32 membres. Comme le prévoit l'Accord politique libyen, le Premier Ministre a soumis l'équipe gouvernementale à l'approbation de la Chambre des représentants. Le 25 janvier, la Chambre des représentants a approuvé l'Accord politique libyen, à l'exception d'un article des dispositions additionnelles relatif aux hauts responsables de l'armée et des services de sécurité. Par ailleurs, la Chambre a rejeté le gouvernement proposé et demandé au Conseil présidentiel d'en présenter un nouveau composé de 17 ministres au plus. Le 14 février, le Conseil présidentiel a constitué un nouveau gouvernement composé de 13 ministres et de 5 ministres d'État et l'a soumis à l'approbation de la Chambre.

11. En marge du volet politique principal, la délégation au dialogue de la Chambre des représentants a tenu des discussions avec un groupe de députés qui boycottent le Parlement à Skhirat en septembre. Le 18 septembre, un accord provisoire a été trouvé, qui doit permettre aux boycotteurs de participer à la nouvelle phase de transition au sein de la Chambre. La MANUL a continué de faciliter les pourparlers pour permettre aux anciens boycotteurs de rejoindre la Chambre. Le 17 janvier, mon Représentant spécial a accompagné deux anciens boycotteurs à une réunion organisée à Chahat avec le Président de la Chambre, Agila Saleh Essa Gwaider, pour discuter de la convocation d'une séance plénière de la Chambre consacrée à l'approbation du Gouvernement d'entente nationale.

Action régionale et internationale

12. Les pays voisins ont apporté une grande contribution au processus politique en Libye. Mon Représentant spécial a participé à la septième conférence ministérielle des pays voisins de la Libye à Alger le 1er décembre. Cette réunion a été l'occasion d'échanger des vues avec les représentants de l'Union africaine, de l'Union européenne et de la Ligue des États arabes sur la progression du dialogue politique et sur les problèmes communs résultant de la situation en Libye.

13. L'appui et l'action positive des acteurs régionaux et internationaux ont également joué un rôle essentiel dans l'avancée du processus politique. Le 13 décembre, mon Représentant spécial a participé à une réunion ministérielle à Rome, qui a rassemblé un certain nombre d'États Membres et d'organisations régionales et à l'occasion de laquelle les participants se sont déclarés très favorables au processus politique organisé sous l'égide de l'ONU et ont appelé à la formation d'un gouvernement d'union nationale. Le 19 janvier, mon Représentant spécial a également participé à une réunion de hauts fonctionnaires à Rome, qui a associé un éventail plus large d'acteurs internationaux et à l'occasion de laquelle un plus grand nombre d'États Membres ont pu évoquer, avec les représentants du Comité temporaire de sécurité, les différents moyens d'apporter un appui international à la Libye.

14. Le 28 janvier, mon Représentant spécial a fait un exposé à la cinquième réunion du Groupe international de contact pour la Libye, organisée par l'Union africaine au sommet des chefs d'État et de gouvernement à Addis-Abeba.

Situation dans l'ouest

15. La sécurité dans l'ouest de la Libye demeure précaire. L'activité croissante de l'EIIL et la flambée de la criminalité ont accentué encore les menaces qui pèsent sur des conditions de sécurité déjà complexes. Si nombre de groupes armés qui contrôlent l'ouest de la Libye ont annoncé leur intention de soutenir l'Accord politique libyen, certains sont restés fidèles à la direction du Congrès général national et à son gouvernement autoproclamé de salut national. Au sein de la coalition Fajr Libya, de nouvelles lignes de fracture politiques et géographiques sont apparues.

16. La période considérée a également été marquée par la montée des tensions et par des poussées sporadiques de violence entre les différents groupes armés opérant à Tripoli. Début novembre, la Brigade des révolutionnaires de Tripoli a pris d'assaut et occupé brièvement le siège du Conseil des ministres dans la ville. Dans le sud-ouest de Tripoli, des affrontements ont éclaté en novembre entre les milices Abou Salim et les groupes armés de Ghariyan et de Misrata. En décembre, dans l'est de Tripoli, des combats entre groupes armés rivaux de la région ont fait au moins 10 morts, dont des civils.

17. Dans l'ouest de la Libye, les accords locaux de cessez-le-feu conclus début 2015 ont été suffisamment solides et permis de contenir toute escalade dans la région. Le cessez-le-feu entre les Zaouïa et les Warchefana a été mis à rude épreuve fin octobre lorsqu'un hélicoptère militaire s'est écrasé à proximité de Zaouïa, tuant au moins 15 personnes à bord, dont des militaires de haut rang et des commandants de la coalition Fajr Libya. L'accident a provoqué une forte mobilisation des forces dans les deux camps. Au bout de quelques jours de face à face et d'affrontements sporadiques, des intermédiaires locaux sont parvenus à convaincre les deux camps à réaffirmer leur attachement à l'accord de cessez-le-feu.

Situation dans l'est

18. Dans l'est de la Libye, les affrontements ont persisté pendant la majeure partie de la période considérée. Les accrochages à Benghazi ont opposé un ensemble complexe d'acteurs, notamment les forces fidèles au général Khalifa Haftar, les milices de quartier, les groupes armés salafistes, les brigades révolutionnaires islamistes ainsi que des entités terroristes comme Ansar el-Charia et l'EIIL.

19. Les combats se sont notamment poursuivis entre les unités de l'armée loyales au général Haftar et la Choura des révolutionnaires de Benghazi. Aucune des deux parties n'est parvenue véritablement à gagner du terrain. Mi-septembre, le général Haftar a lancé une offensive aérienne contre la Choura sans obtenir de résultats visibles. Même si l'on ne dispose d'aucun bilan officiel, quelque 150 combattants de part et d'autre auraient été tués au cours de la période considérée. L'opération la plus sanglante menée à Benghazi a eu lieu mi -octobre lorsqu'une attaque au mortier a frappé un rassemblement public, faisant neuf morts et une cinquantaine de blessés.

20. En décembre, Ajdabiya a vu les conditions de sécurité se détériorer gravement à la suite d'affrontements opposant, d'un côté, plusieurs groupes armés islamistes, dont la Choura des révolutionnaires d'Ajdabiya - qui regroupe des révolutionnaires islamistes et des membres d'Ansar el-Charia -, et, de l'autre, les milices salafistes locales et les forces loyales au général Haftar. Au moins 23 personnes ont été tuées et 60 autres blessées, dont des civils, au cours de 10 jours d'affrontements. Les chasseurs de combat fidèles au général Haftar ont procédé à des frappes aériennes contre des cibles de la Choura le 26 décembre.

Situation dans le sud

21. La période considérée a été marquée par la persistance des tensions intercommunautaires et la montée de la criminalité à Sabha et à Aoubari. À Sabha, les affrontements entre les Aoulad Souleïman d'un côté et les Qadhadfa et les Tébou de l'autre, notamment la multiplication des meurtres motivés par la vengeance, ont contribué à la montée des tensions dans la ville. La situation a encore été aggravée par un certain nombre d'assassinats à motivation politique et d'enlèvements de responsables de l'État. En octobre, le chef de la police judiciaire et le sous-secrétaire municipal de Sabah ont ainsi été enlevés par des groupes non identifiés.

22. À Aoubari, la mise en œuvre de l'accord de cessez -le-feu conclu le 22 novembre à Doha entre les représentants des Touareg et des Tébou a stagné après que les représentants des Tébou ont mis en doute la neutralité de la force chargée de surveiller le cessez-le-feu. L'accord, qui avait été négocié sous les auspices du Qatar, prévoyait la cessation de toutes les hostilités, un échange de prisonniers et la création d'un comité des anciens pour superviser la mise en œuvre du texte. Surtout, l'accord prévoyait également le déploiement d'une force neutre de la tribu des Hasawna chargée de surveiller le cessez-le-feu et placée sous la direction de la Troisième Force. Les tensions se sont encore exacerbées lorsque des affrontements entre groupes armés tébou et touareg ont éclaté le 10 janvier puis à nouveau le 16 janvier. Neuf personnes auraient été tuées dans la deuxième série de heurts. Les efforts de médiation engagés par les représentants des deux camps ont permis de faciliter le déploiement d'une force de surveillance à compter du 6 février.

23. Les tensions entre les Tébou et les Zwaya ont contribué à la situation actuelle à Koufra dans le sud-est. En représailles contre le siège imposé par des éléments armés zwaya aux quartiers tébou, les milices tébou ont continué d'encercler Koufra, entravant les déplacements de la population et l'accès aux produits de base. La période considérée a également été régulièrement marquée par des enlèvements et des meurtres de civils des deux tribus.

Expansion de l'EIIL

24. L'expansion de l'EIIL est venue compliquer encore des conditions de sécurité déjà difficiles. Le groupe est parvenu à renforcer son emprise sur Syrte et les environs et contrôle désormais une bande de plus de 250 kilomètres. Il a mis en place une infrastructure militaire composée de camps d'entraînement, de zones d'entreposage et de fortifications, ainsi que des institutions de gouvernance rudimentaires dites « tribunaux islamiques » et « police islamique ». Depuis l'échec du soulèvement des Fourjan à Syrte en août, au cours duquel l'EIIL a tué un grand nombre de combattants et de sympathisants fourjan, le groupe n'a rencontré aucune opposition véritable dans la région.

25. À partir de ses bases à Syrte et à Naoufaliyé, l'EIIL a tenté à plusieurs reprises d'élargir sa mainmise, en particulier vers l'est dans la région du croissant pétrolier. Le groupe a mené plusieurs assauts contre des installations pétrolières avant de lancer début janvier une attaque contre les terminaux pétroliers de Sidra et de Ras Lanouf qui a donné lieu à de violents affrontements avec les forces de surveillance des champs pétrolifères. Au moins 30 combattants de l'EIIL et 10 membres des forces de surveillance ont été tués dans les heurts qui ont duré plusieurs jours et au cours desquels le groupe terroriste a commis plusieurs attentats-suicides à la voiture piégée. Plusieurs réservoirs de pétrole ont été incendiés pendant les combats. Même si les forces de l'EIIL ne sont pas parvenues à saisir les deux ports pétroliers, elles ont néanmoins réussi à se rendre maîtresses de la ville de Ben Jawad. Mi-janvier, le groupe a attaqué des installations pétrolières à Marada, à environ 150 kilomètres au sud de Ras Lanouf.

26. L'EIIL a également intensifié ses attaques dans la région occidentale. Le 7 janvier, un attentat-suicide à la voiture piégée visant le camp d'entraînement de la police de Jahfal à Zlitan, à une cinquantaine de kilomètres à l'ouest de Misrata, a fait au moins 59 morts et plus de 180 blessés, ce qui en fait l'attaque terroriste la plus sanglante commise en Libye depuis la révolution de 2011. En novembre, à un point de contrôle près de Khoms, huit personnes ont été tuées dans un autre attentat-suicide à la voiture piégée.

27. Par ailleurs, l'EIIL a multiplié les opérations à Tripoli et Sabrata et dans leurs environs. En septembre, le groupe a attaqué la prison de la Force spéciale de dissuasion à l'aéroport Mitiga de Tripoli, attaque qui a coûté la vie à au moins cinq membres de l'EIIL et trois gardiens. À Sabrata, le groupe a organisé un défilé de plus de 30 véhicules début décembre et a installé temporairement des points de contrôle dans la partie sud de la ville. Le 19 février, les États -Unis d'Amérique ont annoncé avoir bombardé plusieurs cibles de l'EIIL dans la région de Sabrata.

28. À Derna, les affrontements se sont poursuivis entre les combattants de l'EIIL et la Choura des moujahidin de Derna. La plupart des combats ont éclaté dans la région de Fataeh et du quartier nº 400 au sud de la ville, où les combattants de l'EIIL avaient installé leurs quartiers après avoir été expulsés en juin 2015. En décembre, des avions de chasse des forces du général Haftar ont mené une série de frappes contre les positions occupées par l'EIIL dans les environs de la ville.

29. À Benghazi, les unités locales de l'armée et les groupes armés de quartier se sont battus contre de nouveaux éléments de l'EIIL, notamment dans le quartier de Leithi. Ailleurs dans l'est, Ajdabiya a été le théâtre de plusieurs assassinats de prédicateurs salafistes et de responsables militaires pendant la période considérée, dont une partie a été revendiquée par l'EIIL.

III. Rédaction de la Constitution

30. La commission composée de 12 membres à laquelle l'Assemblée chargée de la rédaction de la Constitution avait confié l'élaboration d'un premier projet de constitution a rendu ses travaux le 6 octobre. La création de cette commission avait poussé deux représentants tébou de l'Assemblée à suspendre leur participation pour protester contre leur exclusion de la commission.

31. Le projet de constitution est vu comme un bon point de départ pour jeter les bases d'une constitution permanente. Toutefois, le texte est insuffisant au regard du droit international et des normes internationales, en particulier ses dispositions relatives à la forme de l'État, à la séparation des pouvoirs, à la suprématie de la Constitution dans l'ordre interne, aux droits et libertés, au pouvoir judiciaire et à la Cour constitutionnelle. Il est également lacunaire dans le domaine des droits des femmes et des garanties contre les détentions arbitraires, la torture et les procès inéquitables.

32. Après avoir analysé le texte en détail, la MANUL a formulé un certain nombre de recommandations tendant à l'améliorer à l'Assemblée chargée de la rédaction de la Constitution. À la lumière de ces observations et d'autres problèmes soulevés au sein de l'Assemblée, cette dernière a demandé à la commission de revoir le projet de texte en conséquence et de parvenir à un consensus sur les questions en suspens.

IV. Autres activités de la Mission d'appui des Nations Unies en Libye

A. Appui électoral

33. Du fait de l'instabilité de la situation politique et des conditions de sécurité, il a été difficile pour l'Équipe des Nations Unies pour l'appui électoral, gérée conjointement par la MANUL et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), de mener les activités prévues pour soutenir la Haute Commission électorale nationale. Néanmoins, les 17 bureaux électoraux de district de la Haute Commission sont restés opérationnels dans tout le pays. L'Équipe pour l'appui électoral a principalement aidé la Haute Commission à mettre en œuvre les activités visant à renforcer les capacités techniques et à améliorer la maîtrise et la connaissance des questions électorales chez les principaux décideurs. Elle a également continué de coordonner l'assistance électorale internationale et a facilité les relations entre la Haute Commission et ses homologues de la région arabe, lui permettant ainsi de rester en contact avec les institutions électorales de la région.

B. Droits de l'homme, justice transitionnelle et état de droit

34. Toutes les parties au conflit en Libye ont continué de commettre des violations généralisées du droit international humanitaire et des violations du droit international des droits de l'homme (meurtres, enlèvements, prises d'otage, disparitions forcées et actes de torture). Les civils sont les premières victimes d'un grand nombre de ces violations, dont certaines sont de nature à constituer des crimes de guerre. La MANUL a continué de demander à ce qu'il soit mis fin à de telles violations et à ce que leurs auteurs soient amenés à en répondre.

35. La poursuite des combats et les bombardements aveugles dans les quartiers résidentiels ont continué de faire des morts et des blessés parmi les civils, y compris des enfants et des membres du personnel médical, tout en causant des dommages aux infrastructures civiles. Ajdabiya, Benghazi, Derna, Koufra et Warchefana ont été particulièrement touchées. Les bombardements et les attentats-suicides ont également coûté la vie à des dizaines de personnes, dont un grand nombre de civils.

36. La période considérée a été marquée par une augmentation des assassinats à motivation politique, en particulier à Benghazi et Ajdabiya. La MANUL a recensé au moins six cas dans lesquels des responsables de la sécurité et des salafistes ont ainsi été pris pour cible à Ajdabiya.

37. Les zones contrôlées par l'EIIL, principalement dans le centre de la Libye, ont été le théâtre de violations flagrantes des droits de l'homme (exécutions sommaires, enlèvements et actes de torture notamment). À la suite de trois jours d'affrontements dans le troisième arrondissement de Syrte provoqués par le meurtre imputé à l'EIIL d'un imam local ayant manifesté ouvertement son opposition au groupe, des témoins ont déclaré avoir vu quatre corps pendus à des poteaux dans la ville. Entre le 14 et le 18 octobre, au moins six exécutions, dont deux de personnes accusées de sorcellerie, ont été recensées à Syrte et dans l'est de la Libye.

38. Le sort des personnes se trouvant aux mains de l'EIIL, notamment de quatre hommes de Ben Jawad capturés le 4 janvier, reste très préoccupant. Le groupe a également procédé à des flagellations à Syrte, y compris de ressortissants étrangers accusés de boire, après des condamnations prononcées par des « tribunaux islamiques » autoproclamés. Les femmes et les filles ne peuvent plus se déplacer sans être accompagnées par un homme et doivent désormais porter un voile intégral.

39. La publication en janvier par le Congrès général national de la décision nº 2 relative à l'application des dispositions de l'état d'alerte et de la mobilisation publique a renforcé les craintes que l'ancien Parlement tente de limiter les libertés civiles à Tripoli et ailleurs dans l'ouest de la Libye. Les dispositions qui restreignent les déplacements des fonctionnaires et autres responsables et celles qui font obligation aux partis politiques de divulguer des informations sur leurs adhérents et leurs ressources financières sont particulièrement inquiétantes. La décision prévoit en outre de surveiller les ressortissants étrangers et d'obliger les missions diplomatiques étrangères à avertir à l'avance de leurs déplacements.

Enlèvements et torture

40. Les groupes armés de toutes les parties au conflit ont continué à enlever des civils du seul fait de leur identité, de leurs liens de parenté ou de leurs affiliations politiques supposées. Des personnes sont restées détenues dans des lieux de détention officiels et non officiels, souvent privées de contact avec le monde extérieur ou d'accès aux autorités judiciaires.

41. Dans l'est de la Libye, des opposants à l'opération Dignité et des individus accusés de terrorisme, entre autres, ont été enlevés. On ignore ce qu'il est advenu des personnes capturées par le Conseil consultatif des révolutionnaires de Benghazi et l'endroit où elles se trouvent, notamment celles qui ont été enlevées à la prison militaire de Boudheima en octobre 2014, et ne pas savoir s'ils sont sains et saufs est source de vives préoccupations.

42. Au cours de la période considérée, le nombre d'enlèvements à motivations criminelles contre rançon a augmenté et des enfants ont parfois été pris pour cibles, en particulier dans l'ouest et le sud-est de la Libye. Trois enfants membres de la famille Alshirshari qui ont été kidnappés le 2 décembre à Sorman sont toujours captifs.

43. Tout au long de la période considérée, la MANUL a rassemblé des éléments permettant d'établir qu'il était fait usage de la torture et d'autres mauvais traitements dans plusieurs sites officiels et non officiels partout en Libye. Dans l'est du pays, il s'agissait notamment des sites dépendant du Département de la lutte contre le terrorisme à Barses et Boudezira; des prisons de Koueïfiya et Gernada; du centre de détention de Toukra; et des sites dépendant du Département des enquêtes judiciaires à Benghazi et Marj. Dans l'ouest, les sites incluaient le centre de détention de Mitiga, dépendant de la Force spéciale de dissuasion et des centres de détention sous le contrôle des groupes armés d'Abou Salim, Salah el-Burki, Abou Bakr el-Siddiq et Awlad Issa.

44. Plusieurs échanges et libérations de prisonniers ont eu lieu au cours de la période à l'examen. En septembre, 61 hommes détenus depuis le conflit de 2011 sont sortis des prisons de Misrata. En novembre, 51 autres hommes ont été libérés à l'occasion d'échanges de prisonniers entre Zaouïa, Warchefana et Abou Salim.

Groupes en situation de vulnérabilité

45. Les défenseurs des droits de l'homme restent exposés aux actes de violence et d'intimidation. En août, la MANUL a organisé une réunion de deux jours qui a rassemblé défenseurs des droits de l'homme et acteurs de la société civile afin de leur donner un rôle accru dans le dialogue politique libyen et les efforts de consolidation de la paix.

46. Les migrants, les demandeurs d'asile et les réfugiés risquent toujours d'être placés en détention prolongée dans des conditions laissant à désirer, soumis à la torture, aux agressions violentes, au travail forcé, au viol et à d'autres actes de violence sexuelle et sexiste, et exploités par les membres de groupes armés, de bandes criminelles et de la police. La MANUL a reçu des informations faisant état de deux viols collectifs sur la personne de migrantes dans l'ouest de la Libye au mois de novembre. Des milliers de ressortissants étrangers étaient toujours détenus au motif qu'ils ont commis des infractions liées à la migration, sans possibilité de recours juridiques, dans des locaux dépendant du Ministère de l'intérieur ou directement contrôlés par des groupes armés et dans des conditions déplorables. En partenariat avec International Medical Corps, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a institué un système de visites et de contrôles hebdomadaires dans 8 des 18 centres de détention gérés par l'État.

47. Quelque 435 000 personnes sont toujours déplacées en conséquence du conflit depuis la mi-2014 et du fait de l'insécurité qui règne actuellement. Le 9 janvier, les Taourgha déplacés installés dans la cité sportive de Benghazi ont subi à deux reprises des bombardements, qui ont fait deux morts et six blessés parmi les habitants du camp.

48. À Tripoli, le Congrès général national a modifié les dispositions relatives aux droits des femmes énoncées dans la loi de 1984 sur le statut personnel. Cette décision, aussi contestable soit-elle sur le plan juridique étant donné le statut du Congrès général national, restreindrait en particulier les droits des femmes en matière de divorce et de polygamie, et ouvrirait la voie aux mariages d'enfants.

49. Les journalistes et autres membres des médias ont été la cible d'attaques, notamment d'enlèvements, d'actes de torture, d'agressions violentes et de menaces dirigées contre eux ou contre leurs proches. Plusieurs journalistes qui ont par la suite été libérés ont dit avoir été interrogés sur leur travail, leurs affiliations politiques et leurs liens avec des organisations internationales.

50. En partenariat avec le Ministère espagnol des affaires étrangères et de la coopération, l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) a organisé un atelier à l'intention des hauts responsables de plusieurs organes de presse libyens afin de discuter de la violence croissante dont sont victimes les journalistes et les professionnels des médias. L'atelier s'est conclu avec une déclaration dans laquelle les participants ont rejeté le discours de haine et se sont engagés à appliquer les normes déontologiques et professionnelles de base.

Justice transitionnelle

51. Faisant fond sur les engagements pris antérieurement par les municipalités de Misrata et Taourgha, un comité mixte s'est réuni à plusieurs reprises au cours de la période considérée pour examiner les modalités du retour chez eux des Taourghas déplacés. Avec le concours de la MANUL, les deux parties ont arrêté une feuille de route présentant dans leurs grandes lignes les dispositions relatives au retour librement consenti et en toute sécurité des Taourghas déplacés. Ce document, en date du 18 décembre, énonce aussi des mesures relatives au dédommagement des victimes d'atteintes aux droits de l'homme, à la responsabilité des auteurs de ces atteintes, aux dispositions en matière de sécurité ainsi qu'à la reconstruction de Taourgha et des zones touchées de Misrata.

52. Le procès de Kadhafi, accusé d'avoir ordonné l'assassinat du joueur de football Bashir el-Rayani en 2006, s'est ouvert en novembre. Des séquences vidéo prises dans la prison d'al-Hadhba et diffusées en août montraient M. Kadhafi agressé physiquement et contraint d'assister à ce qui semblait être le passage à tabac de deux détenus. Le parquet a annoncé l'ouverture d'une enquête et, suite à l'intervention de la Mission, a confirmé qu'il avait été procédé à des arrestations sans donner davantage de précisions.

53. Le dossier des 32 responsables de l'ancien régime de Kadhafi condamnés par la Cour d'assises de Tripoli en juillet 2015, à l'issue d'un procès qui était loin d'avoir respecté les normes internationales d'équité, était toujours pendant devant la Cour de cassation, suite à l'appel interjeté par les avocats des intéressés. Seif el-Islam Kadhafi, fils de Moammar Kadhafi, a été jugé et condamné à mort par contumace alors qu'il restait aux mains d'un groupe armé à Zintan. Le Procureur de la Cour pénale internationale a continué de demander instamment qu'il soit remis à la Cour.

Systèmes judiciaire et pénitentiaire

54. La persistance des combats et de l'insécurité ont continué d'entraver le fonctionnement des tribunaux, en particulier à Syrte, Derna et Benghazi. Le 29 décembre, le Bureau du Procureur général de Chahat a annoncé la suspension de ses activités, des hommes armés ayant lancé une attaque contre ses locaux. Les employés du secteur judiciaire ont continué à être la cible d'assassinats, d'enlèvements et d'autres attaques violentes.

55. Le Congrès général national, par une décision largement perçue comme une tentative de politiser le système judiciaire, a nommé 36 nouveaux juges à la Cour suprême. Il s'agit là du plus grand nombre de nominations depuis 2011.

56. Les heurts entre groupes armés survenus à Tajoura le 14 décembre ont incité le personnel du bâtiment B de la prison de Tajoura à évacuer vers un lieu plus sûr 364 prisonniers, dont beaucoup se sont évadés lors de l'évacuation; 226 sont toujours en fuite et le bâtiment lui-même n'est plus utilisable.

57. En novembre, la MANUL a organisé à Tunis une réunion à l'intention des directeurs de prison libyens. Quatorze directeurs, venus de toute la Libye, y ont participé et ont adopté un « code de déontologie et de conduite ». En décembre, la MANUL et l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime ont organisé à Amman pour les agents de l'administration pénitentiaire un atelier consacré à la promotion des droits de l'homme et des principes de l'état de droit.

C. Secteur de la sécurité

Appui au plan libyen en vue d'arrangements de sécurité provisoires

58. L'un des principaux axes de l'action de la Mission en matière de sécurité est l'élaboration d'un plan de mise en œuvre des arrangements des dispositions de sécurité énoncées dans l'Accord politique libyen. Ce plan repose notamment sur les éléments suivants : conseils relatifs à un plan de sécurité pour Tripoli, y compris différentes options pour le retrait des groupes armés et la remise sur pied de l'armée libyenne et des institutions chargées de la sécurité; plan global de collaboration avec des acteurs très divers du secteur de la sécurité en Libye; définition pour la communauté internationale d'une vision commune du volet du dialogue politique consacré à la sécurité; recommandations à l'intention du Conseil de la présidence au sujet du volet consacré à la sécurité; et recommandations concernant la réorganisation et la modernisation de l'armée libyenne.

59. La constitution du Comité temporaire de sécurité par le Conseil de la présidence, le 13 janvier, a marqué une étape importante. Avec l'assistance de la MANUL, le Comité devrait formuler un plan détaillé en vue de parvenir à l'objectif stratégique de la mise en place du Gouvernement d'entente nationale à Tripoli. Cette initiative est considérée comme une première avancée vers le règlement effectif d'autres questions fondamentales touchant la situation à Benghazi et les efforts déployés pour lutter contre l'EIIL.

60. Conformément à la stratégie de collaboration élaborée en 2015, la MANUL s'est concertée avec des groupes armés libyens très divers au sujet des arrangements de sécurité provisoires. Les discussions ont privilégié quatre aspects majeurs : l'assurance d'un engagement solide en faveur des arrangements de sécurité provisoires et de leur mise en œuvre par l'intermédiaire du Comité temporaire de sécurité; le cantonnement des armes; le rôle futur des groupes armés; et la réorganisation et la modernisation de l'armée libyenne.

61. Parallèlement, la MANUL a fourni au Conseil de la présidence un appui et des conseils techniques concernant le volet du dialogue politique consacré à la sécurité. Il s'est principalement agi de l'élaboration et de la concrétisation du concept de sécurité qui sous-tend les arrangements de sécurité provisoires, et de la coordination de l'aide internationale dans le domaine de la sécurité.

62. L'engagement de la communauté internationale en faveur du volet sécurité est une démarche essentielle de la MANUL qui a été entreprise avec la collaboration constante des représentants de la communauté internationale, notamment grâce à la planification conjointe et à la mise en commun des compétences et des pratiques optimales. Les réunions internationales tenues à Rome les 12 et 13 décembre et les 18 et 19 janvier ont été l'occasion très attendue de souligner qu'il était urgent de coordonner le soutien international et de l'adapter aux besoins immédiats du Gouvernement d'entente nationale en matière de sécurité.

63. Au cours de la période considérée, la MANUL s'est félicitée de la détermination du Conseil de la présidence à s'occuper des questions liées à la réorganisation et à la modernisation de l'armée libyenne, et l'a encouragée. Le Conseil de la présidence a progressé dans la conceptualisation d'une approche progressive, privilégiant d'abord les arrangements de sécurité provisoires, puis la reconnaissance de l'armée libyenne et, à terme, sa modernisation. Le moment venu, la réorganisation et la modernisation de l'armée libyenne exigeront un appui considérable de la part de la MANUL et de la communauté internationale, à l'instar du renforcement des forces nationales de sécurité, notamment la police.

Gestion des armes et des munitions

64. Le Service de la lutte antimines de l'ONU a facilité les échanges entre l'autorité nationale de lutte antimines et un certain nombre de conseils municipaux libyens en vue de procéder à des relevés non techniques pour évaluer l'ampleur de la tâche à entreprendre afin de permettre le retour dans leurs villages respectifs des communautés Qawalich et Taourgha. Le Service a par ailleurs organisé à l'intention de 50 agents de l'Autorité nationale de sécurité trois cours de formation spécialisée à la neutralisation des explosifs et munitions et a poursuivi son programme de sensibilisation afin de réduire le danger auquel sont exposés les civils qui vivent dans des zones polluées par des restes explosifs de guerre.

65. Le Service de la lutte antimines a également lancé un projet pilote destiné à promouvoir une approche du contrôle des armes légères soucieuse de la parité des sexes, en mettant l'accent sur la sensibilisation et l'éducation à la réduction des risques. Étant donné l'intense prolifération des armes légères dans la région, ce projet donnera aux femmes davantage de moyens de sensibiliser leurs communautés au risque élevé lié aux armes et munitions. L'initiative est menée en coopération avec l'Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR).

D. Autonomisation des femmes

66. La Mission a également continué d'entreprendre et d'appuyer les activités visant à accroître la participation des femmes au processus politique. Du 26 au 28 août, elle a facilité la tenue à Tunis d'une réunion de femmes libyennes venues de tous les horizons politiques et originaires de toutes les régions et de tous les groupes culturels et ethniques. Les participants ont arrêté des recommandations relatives à des dispositions sexospécifiques devant être inclues dans l'Accord politique libyen. En novembre, la MANUL a aidé à organiser à Genève une réunion de représentantes libyennes en vue de l'élaboration d'un programme pour la paix en Libye. Mon Représentant spécial a maintenu un dialogue permanent avec les participants au processus politique afin d'encourager un meilleur équilibre dans la représentation des deux sexes. Le 11 janvier, il a exprimé son ferme appui à l'appel en faveur d'un quota de 30 % de femmes au sein du Gouvernement d'entente nationale lancé par les responsables de groupes de femmes et des militantes rassemblées à Tunis.

E. Coordination de l'aide internationale

67. La MANUL a proposé une nouvelle structure de coordination de l'aide internationale à la Libye, qui reflèterait les priorités du Gouvernement d'entente nationale telles qu'énoncées dans l'Accord politique libyen. Cette proposition a été élaboré en étroite consultation avec la communauté internationale et les parties prenantes libyennes et a été soumise pour examen au Conseil de la présidence, en même temps qu'un tableau recensant les offres d'assistance.

68. Les avancées dans le dialogue politique libyen et la signature de l'Accord politique libyen qui en est résulté ont donné un nouvel élan à l'action menée par les Nations Unies et d'autres acteurs internationaux pour favoriser le relèvement et la transition en Libye après le conflit. Au cours de la période à l'examen, la MANUL, le PNUD, la Commission économique et sociale pour l'Asie occidentale, le Fonds monétaire international et la Banque mondiale ont conjointement créé le Forum d'experts libyens pour la coopération en matière de développement, appelé à servir de tribune propice à une action ciblée dans les domaines prioritaires pour le fonctionnement du Gouvernement, le relèvement et la transition après le conflit. Le Forum contribuera aussi à l'institutionnalisation du dialogue national sur le développement après le conflit en Libye et à la formulation d'options et de stratégies socioéconomiques à l'appui de l'élaboration du programme national pour le développement intégré de la Libye. Le Forum s'est réuni en octobre et en décembre à Tunis.

F. Aide humanitaire

69. Consciente de la nécessité d'intensifier l'action humanitaire en Libye, l'équipe de pays pour l'action humanitaire a lancé en novembre le Plan d'aide humanitaire pour la Libye (2016). Le document est conçu de manière à s'adapter au contexte opérationnel fluide et volatile et à mobiliser une intervention propre à permettre l'acheminement de l'aide là où les besoins sont les plus grands et où l'efficacité sera la plus sensible. Le montant des crédits nécessaires atteint 165 600 000 dollars, dont 2,2 % seulement sont financés. Environ 2,44 millions de personnes sont considérées comme ayant besoin d'une protection et d'une aide humanitaire sous une forme ou une autre.

70. Il ressort des chiffres communiqués par le HCR que le nombre de déplacés en Libye avoisine désormais 435 000 personnes, dont 290 000 femmes et enfants. Selon les estimations, 146 275 personnes se trouvent dans l'est du pays (dont 117 275 rien qu'à Benghazi), les 288 725 autres étant dans l'ouest et le sud-ouest de la Libye, mais essentiellement à Tripoli et aux alentours. L'expansion de l'EIIL et les opérations militaires à Adjabiya ont entraîné des déplacements répétés depuis Syrte, Ben Jawad et Ajdabiya vers d'autres régions, principalement Tripoli, Misrata, Bani Walid et Tarhouna.

71. En octobre, le HCR a repris les activités d'enregistrement des nouveaux demandeurs d'asile dans toute la Libye. Le pays accueille actuellement environ 100 000 réfugiés et demandeurs d'asile, dont 36 868 sont immatriculés auprès du HCR.

72. Au cours de la période considérée, l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) a aidé 2 167 familles déplacées et 5 206 migrants sauvés en mer, détenus ou résidant illégalement en Libye. En outre, 439 migrants venus de 12 pays différents ont bénéficié d'un rapatriement pour raisons humanitaires vers leur pays d'origine.

73. Entre septembre et décembre, 37 695 réfugiés et migrants au total ont gagné l'Italie par bateau depuis le continent africain, principalement depuis les côtes libyennes. Entre la fin août et le mois de décembre, plus de 7 600 personnes ont été interceptées ou secourues par les garde-côtes libyens, dont 434 femmes et 70 enfants. Quelque 3 700 personnes ont été déclarées mortes ou portées disparues en mer Méditerranée. Un mécanisme interministériel libyen d'échange d'information, dont fait également partie le Croissant-Rouge libyen, a été mis en place pour mieux venir en aide aux passagers des embarcations en détresse au large des côtes libyennes.

74. La Libye demeure un pays à la fois de transit et de destination pour les migrants, en dépit de l'insécurité. Selon les chiffres de l'OIM, elle accueille actuellement un million de migrants, essentiellement originaires du Bangladesh, d'Égypte, du Mali, du Niger, du Nigéria, du Soudan et d'autres pays d'Afrique subsaharienne et d'Afrique de l'ouest. L'importance du nombre de migrants et de déplacés en Libye en conséquence du conflit qui sévit mettent à rude épreuve les communautés d'accueil locales.

75. Selon les estimations, 682 000 libyens, principalement des déplacés, n'ont pas suffisamment accès à l'eau potable et aux services d'hygiène et d'assainissement, ce qui crée de graves risques sanitaires. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a donné à quelque 1 700 familles déplacées un accès à des services d'assainissement.

76. Les ressources financières limitées et le manque d'accès aux hôpitaux et aux établissements de santé, lesquels sont aussi fermés, combinés aux graves pénuries de médicaments essentiels, continuent d'avoir une lourde incidence sur le secteur de la santé. L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a fourni des lots considérables de médicaments et de fournitures essentielles à Tripoli, Baida, Zlitan et Benghazi. Du matériel de traumatologie et des trousses sanitaires d'urgence ont été expédiés à Zlitan après l'attentat à la bombe de janvier. En coopération avec l'UNICEF, le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) a soutenu l'élaboration d'une stratégie nationale en matière de santé procréative, maternelle, infantile, néonatale et des adolescents.

77. En dépit d'un financement limité, le Programme alimentaire mondial (PAM) continue d'apporter une aide alimentaire qui fait cruellement défaut aux populations les plus vulnérables et les plus touchées par l'insécurité alimentaire en Libye. Depuis décembre 2015, le PAM a distribué des vivres à 102 000 personnes dans l'ouest et le sud du pays, et à quelque 78 000 bénéficiaires à Benghazi et aux alentours.

78. Selon une estimation de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) du mois de septembre, la détérioration des services vétérinaires a intensifié le risque d'épidémie de maladies transfrontières des animaux. En décembre, la FAO a commencé à aider l'administration libyenne chargée de l'agriculture à lutter contre une épidémie de grippe aviaire détectée fin septembre.

79. Il est ressorti d'une estimation approfondie effectuée avec le concours de l'UNICEF que 65 % des 1 600 enfants examinés dans les camps de déplacés montraient des signes de stress post-traumatique modéré ou grave, beaucoup de ces enfants ayant été déplacés de force et ayant assisté à la destruction d'infrastructures ou perdu des membres de leur famille ou des amis. L'UNICEF et ses partenaires ont procuré un soutien psychologique à 6 000 filles et garçons dans huit espaces adaptés aux besoins des enfants. L'inquiétude liée à la protection des enfants s'est considérablement accrue depuis l'exacerbation du conflit en Libye en 2014.

80. L'UNESCO et les autres partenaires internationaux ont intensifié l'appui et la formation liés à la gestion des urgences et à la protection des musées et des biens culturels, la capacité des institutions et partenaires nationaux concernés d'intervenir efficacement est de plus en plus restreinte par l'instabilité généralisée et le manque de bonne gouvernance.

V. Déploiement de la Mission d'appui des Nations Unies en Libye

81. Du fait de l'insécurité dans le pays, la majorité du personnel international de la MANUL reste déployé à Tunis, où la Mission a établi un siège provisoire. Au 31 décembre, au total, 169 agents de la MANUL recrutés sur les plans national et international et des membres du personnel fourni par les gouvernements avaient été déployés à Tunis. La Mission dispose en outre de 3 fonctionnaires au Siège et de 11 à la Base de soutien logistique des Nations Unies à Brindisi (Italie).

82. Au sujet de la présence de la Mission en Tunisie, l'ONU a conclu avec le Gouvernement tunisien un accord relatif au déménagement d'urgence de la MANUL du pays, à titre provisoire, afin qu'elle puisse continuer d'exécuter son mandat depuis la Tunisie.

83. Du 11 au 16 janvier, une mission d'évaluation des besoins s'est rendue à Tunis et à Tripoli. Ses membres étaient chargés spécifiquement d'examiner les conditions d'emploi et de sécurité du personnel de la MANUL à Tunis, les besoins de la Mission en matière de flotte aérienne et la possibilité d'établir à nouveau une modeste présence de la Mission à Tripoli. Au nombre des principales recommandations formulées par la Mission figurent : la réévaluation de la dotation en effectifs; la mise en œuvre des mesures destinées à améliorer la sécurisation des périmètres pour le bâtiment de la MANUL à Tunis et la poursuite de la recherche d'autres locaux; la concrétisation de l'une des deux options proposées en matière de moyens aériens; un examen du Groupe des services de protection. La mission a également évalué des sites potentiels à Tripoli, présenté son appréciation des risques et avantages de chaque option et recommandé que la MANUL redéploie son personnel à Tripoli de manière progressive, la première phase consistant en une petite équipe technique accompagnée d'éléments d'appui et d'agents de sécurité armés des Nations Unies, et la seconde phase supposant la présence du Représentant spécial du Secrétaire général et de hauts responsables de l'ONU. La mission d'évaluation a indiqué que la mise en œuvre de cette approche dépendrait du déploiement d'un groupe de gardes des Nations Unies et a suggéré d'engager immédiatement les procédures relatives à la constitution d'un tel groupe, y compris, avec la plus grande urgence, une évaluation des risques de sécurité conduite par le Conseiller en chef pour la sécurité.

VI. Sûreté et sécurité

84. Les conditions de sécurité en Libye sont restées extrêmement précaires et plusieurs incidents majeurs ont marqué la période considérée. Des attentats terroristes, des enlèvements et d'autres atteintes à la sécurité visant les étrangers en général, et spécifiquement dirigés contre la communauté internationale, ont continué de se produire. Des diplomates et des ressortissants étrangers ont été pris pour cibles et enlevés par des militants, contre rançon ou pour obtenir la libération de combattants détenus par des gouvernements étrangers. Plusieurs ressortissants étrangers ont été exécutés ou enlevés pour obtenir une récompense financière, soit par des groupes extrémistes violents, soit par des bandes criminelles.

85. Le 31 août, un véhicule piégé a explosé à l'extérieur des locaux de la société Mellittah Oil and Gas, à Tripoli. Le 8 septembre, à Tripoli également, des miliciens ont physiquement agressé un membre du personnel du HCR recruté localement, à la suite d'un accident de voiture. Le 1er octobre, un engin a explosé au consulat de Turquie à Misrata et une autre explosion s'est produite au même endroit quelques jours après. Le 8 novembre, deux agents de l'ambassade de Serbie ont été enlevés à Sabratha lors d'une attaque visant le convoi à destination de la frontière tunisienne dans lequel ils se trouvaient. Le 14 décembre, à Tripoli, des assaillants non identifiés ont enlevé un directeur d'hôpital maltais. Le 12 janvier, un groupe armé non identifié à lancé une attaque contre les locaux de la Melittah Oil and Gas Company à Zuwara.

VII. Aspects financiers

86. Le montant total des crédits approuvés au titre de la MANUL pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2016 s'élève à 41 181 500 dollars, montant qui avait été avalisé par l'Assemblée générale dans sa résolution 70/249 A à C.

VIII. Observations et recommandations

87. La signature de l'Accord politique libyen le 17 décembre a marqué une avancée importante dans le dialogue politique national et dans l'action menée par la communauté internationale pour mettre fin à la crise institutionnelle et au conflit armé qui ont ravagé le pays et sa population. Le succès du dialogue doit beaucoup au courage, au dévouement et à la détermination de tous les participants soucieux de réunifier leur pays et d'épargner à leur peuple d'autres bains de sang et de nouvelles souffrances. L'Accord politique libyen offre un cadre permettant au peuple libyen de concrétiser les perspectives ouvertes par la révolution de 2011 et notamment de bâtir un État démocratique fondé sur l'état de droit et le respect des droits de l'homme.

88. Je trouve encourageant que la Chambre des représentants ait approuvé le principe de l'Accord politique libyen et du Conseil présidentiel qui en émane. En plus d'avoir pris des mesures pour surmonter les divisions internes au sein du Parlement, les élus libyens ont fait preuve d'une grande détermination pour s'acquitter de leurs responsabilités envers leur pays et envers leur peuple après des mois d'incertitude politique. L'établissement par le Conseil présidentiel le 14 février d'une nouvelle liste de ministres devant composer le Gouvernement d'entente nationale constitue également un pas en avant. Je saisis cette occasion pour rappeler à toutes les parties que la Libye ne pourra ouvrir une nouvelle page de la transition vers la stabilité et la sécurité que si l'Accord politique libyen est respecté dans sa lettre et son esprit. Conformément à la résolution 2259 (2015) du Conseil de sécurité, la pleine mise en œuvre de toutes les dispositions correspondantes de l'Accord signé par les parties à Skhirat le 17 décembre sera essentielle à cet égard.

89. Malgré les progrès tangibles accomplis, l'avenir politique de la Libye reste lourd d'incertitudes. De nombreux dirigeants politiques et militaires continuent de s'opposer à l'action menée pour faire entrer le pays dans la phase suivante de sa transition démocratique. La porte doit rester ouverte à toutes les parties qui souhaitent rejoindre le processus politique. Pour parvenir à une paix, une sécurité et une prospérité viables et durables, il faut que toutes les parties s'unissent et s'engagent à placer les intérêts nationaux de la Libye au-dessus de toute autre considération. Les dirigeants politiques libyens doivent prendre en main l'avenir de leur pays. Ils doivent également faire clairement comprendre à tous les acteurs sur le terrain que la poursuite des violences, les enlèvements et les déclarations visant manifestement à intimider ceux qui cherchent à promouvoir la mise en œuvre de l'Accord politique libyen sont inacceptables.

90. Progresser vers la reprise de la transition démocratique en Libye est également indispensable pour lutter contre les forces du terrorisme et de l'extrémisme violent. La relative facilité avec laquelle les groupes comme l'EIIL ont élargi leur secteur de contrôle et d'influence au cours des derniers mois est très préoccupante. J'exhorte toutes les parties à redoubler d'efforts pour éliminer le vide politique et sécuritaire créé par l'absence d'institutions nationales unifiées, qui a permis aux groupes terroristes de renforcer leur présence et de poser de plus en plus une menace directe pour la Libye et la région. Les événements qui se déroulent ailleurs dans la région rappelle avec force qu'il n'y a pas de temps à perdre et que si l'on ne parvient pas à constituer rapidement un front uni sur le plan politique et de la sécurité sous l'autorité d'un État libyen unifié, la bataille contre le terrorisme risque fort d'être perdue. Les dirigeants libyens de tous les camps ont le devoir de sauver leur pays et les générations futures du fléau du terrorisme et de l'extrémisme violent.

91. Alors que le conflit armé se poursuit sans relâche dans différentes parties du pays, des centaines de milliers de Libyens ordinaires continuent de subir les terribles conséquences de la crise humanitaire. Près d'un demi-million de personnes ont été déplacées, certaines à de multiples reprises. Plusieurs centaines de milliers de Libyens n'ont pas accès aux services de base, notamment à l'eau potable et aux services d'hygiène et d'assainissement. Je demande à la communauté internationale, au nom des plus vulnérables en Libye, de remédier d'urgence au sous -financement du plan d'intervention humanitaire afin que l'on puisse venir au secours des quelque 2,44 millions de personnes ayant besoin d'une protection et d'une aide humanitaire.

92. Les appels répétés de mon Représentant spécial et des organisations humanitaires internationales en faveur d'un cessez-le-feu humanitaire sont restés sans suite, en particulier à Benghazi, une ville qui a subi de très lourdes pertes matérielles et humaines. Absolument rien ne justifie de continuer à priver d'une aide humanitaire d'urgence les populations qui vivent dans des conditions désespérées.

93. Par ailleurs, le conflit reste marqué par de graves violations du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme. J'exhorte les autorités libyennes et tous ceux qui exercent un contrôle effectif sur le terrain à mettre fin à ces atteintes. J'engage également les dirigeants politiques et les chefs militaires à déclarer publiquement que ces actes ne seront plus tolérés et que leurs auteurs auront à en répondre. À cet égard, il sera important que le nouveau Gouvernement libyen renforce en priorité les capacités du système judiciaire national. Je demande en outre instamment à la communauté internationale de mettre à disposition les moyens dont la Procureure de la Cour pénale internationale a besoin pour enquêter sur les crimes de guerre et autres crimes de droit international commis en Libye.

94. Il est rappelé aux parties qui participent actuellement aux hostilités qu'il leur incombe de prendre toutes les précautions nécessaires pour éviter les pertes en vies humaines dans la population civile, les blessures aux personnes civiles et les dommages aux biens de caractère civil. Elles doivent mettre fin immédiatement à toutes les attaques menées sans discrimination ou dirigées directement contre les civils, protéger les hôpitaux, les installations médicales et le personnel médical civils, et garantir l'acheminement sans entrave de l'aide humanitaire aux populations qui en ont besoin. De même, rien ne saurait justifier l'enlèvement de civils sur le fondement de l'appartenance tribale, familiale ou politique. Toutes les personnes ainsi enlevées doivent être remises en liberté sans délai et sans condition.

95. La persistance du recours à la torture et autres mauvais traitements dans les centres de détention est inacceptable. Je rappelle instamment à toutes les parties concernées les obligations que leur imposent le droit international humanitaire et le droit international des droits de l'homme. Je les engage en outre à veiller à ce que des mesures soient prises pour permettre à tous les détenus de communiquer avec leur famille et leur avocat et à ce qu'une procédure régulière soit engagée à leur encontre ou à ce que les dispositions soient prises pour les remettre en liberté.

96. Le conflit en Libye et l'absence persistante d'autorité effective de l'État continue d'avoir des conséquences dévastatrices pour les habitants du sud du pays. La criminalité endémique et la montée de la violence politique, la persistance des tensions intercommunautaires et la concurrence entre groupes rivaux pour les ressources ont été alimentées par des années d'abandon et de marginalisation de la part des autorités centrales. La situation actuelle est encore aggravée par le peu voire l'absence de contrôles aux frontières, ce qui a permis un afflux sans précédent de très nombreux migrants et mis à rude épreuve des communautés d'accueil dans le sud qui ont déjà du mal à subvenir à leurs besoins.

97. Je note avec une vive inquiétude que les autorités de facto à Tripoli cherchent à restreindre les libertés politiques et civiles et que mon Représentant spécial et son équipe se sont vu à maintes reprises refuser l'accès à l'ouest de la Libye. À cet égard, je rappelle aux dirigeants du Congrès général national l'obligation qui leur est faite par le paragraphe 18 de la résolution 2259 (2015) du Conseil de sécurité de coopérer pleinement aux opérations de la MANUL, notamment en permettant à la Mission d'interagir librement avec tous ses interlocuteurs, et de prendre les mesures voulues pour garantir la sécurité ainsi qu'une totale liberté de circulation et un accès immédiat au personnel des Nations Unies et au personnel associé. Pour pouvoir mettre en œuvre le mandat confié à la MANUL par le Conseil, le personnel des Nations Unies doit être en mesure de discuter librement, sans être menacé ou intimidé, avec toutes les parties prenantes politiques et tous les acteurs de la sécurité.

98. L'Accord politique libyen offre une feuille de route viable permettant de mettre fin au conflit en Libye et de favoriser la transition démocratique du pays. Beaucoup dépendra de la mise en œuvre de l'Accord ainsi que de la bonne volonté et de la détermination de toutes les parties concernées à faciliter le transfert pacifique du pouvoir. La mesure dans laquelle le Gouvernement d'entente nationale pourra effectivement exercer son autorité à partir de la capitale du pays, Tripoli, avec le soutien des autres institutions de l'État, déterminera l'aptitude des autorités libyennes à faire face aux autres grandes priorités, notamment la situation à Benghazi et la menace posée par l'EIIL et les autres groupes terroristes.

99. La situation politique et les conditions de sécurité sur le terrain rendent difficile le travail de la MANUL. Je ne doute pas que mon Représentant spécial et ses collaborateurs continueront de rechercher des moyens créatifs et innovants d'apporter leur appui.

100. Dans ce contexte et en réponse à la demande de la Mission tendant à ce que les préparatifs de sa réinstallation à Tripoli commencent, le Siège de l'Organisation des Nations Unies, en particulier le Département des affaires politiques, a déployé une mission d'évaluation des besoins du 11 au 16 janvier. S'il est essentiel que la MANUL puisse apporter un appui immédiat au Gouvernement d'entente nationale dès son installation à Tripoli, la mission d'évaluation des besoins a néanmoins constaté que les conditions de sécurité dans la ville restaient très instables en raison de l'absence actuelle d'autorité centrale et, partant, de la fragilité des structures de sécurité. Par conséquent, dans l'immédiat, la mission a recommandé le déploiement d'une petite équipe technique accompagnée d'éléments d'appui et d'un groupe de gardes des Nations Unies. Les préparatifs liés à la mise en œuvre de ces recommandations sont en cours.

101. Dans ce contexte, l'Organisation des Nations Unies continuera d'aider à mettre en œuvre l'Accord politique libyen et se tient prête à soutenir et à aider les autorités libyennes dans le respect des principes de l'appropriation nationale. Pour veiller à la pleine application de l'Accord et élargir la base de soutien, une action concertée est nécessaire. Je recommande à cette fin que le Conseil de sécurité proroge le mandat de mission politique spéciale intégrée de la MANUL qui est défini dans la résolution 2238 (2015) du Conseil. Cette nouvelle période permettra à la Mission de continuer à aider le Conseil présidentiel à mettre en place le Gouvernement d'entente nationale, d'élaborer son plan de travail et ses priorités et de prendre les mesures de sécurité nécessaires pour faciliter sa présence en Libye. La création du Gouvernement d'entente nationale donnera la possibilité d'engager un dialogue avec les autorités libyennes sur la vision stratégique globale de l'appui devant être apporté par l'ONU dans la phase ultérieure de la transition.

102. Je voudrais exprimer ma gratitude à l'Union africaine, à la Ligue des États arabes, à l'Union européenne ainsi qu'à tous les États Membres qui accompagnent et soutiennent le processus politique libyen. Pour finir, je tiens à remercier sincèrement le personnel de la MANUL et des organismes des Nations Unies de tout ce qu'il fait pour appuyer la transition en Libye et je félicite mon Représentant spécial, Martin Kobler, de son action à la tête de la Mission et de son travail inlassable en faveur de la poursuite du processus politique et de la mise en œuvre de l'Accord politique libyen.


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