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19jan19


La crise syrienne face à la question kurde : Ankara hostile à la présence des troupes d'Al Assad à Minbej


La Turquie a exprimé hier son opposition à toute présence du régime syrien dans la ville de Minbej, rapporte l'AFP. Ville du Nord syrien où la milice kurde Unités de protection du peuple (YPG), à laquelle Ankara est hostile, a invité l'armée syrienne à se déployer.

«Les efforts des YPG pour faire entrer le régime à Minbej ne sauraient être permis», a déclaré à la presse le porte-parole du ministère turc des Affaires étrangères, Hami Aksoy. Minbej est actuellement sous contrôle des Forces démocratiques syriennes (FDS), une force arabo-kurde dominée par les YPG et soutenue par la coalition internationale antidjihadiste, dirigée par Washington.

La ville a été reprise au groupe Etat islamique (EI) en 2016. Les YPG sont considérés comme un groupe «terroriste» par Ankara en raison de leurs liens avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui mène une guérilla sur le territoire turc depuis 1984.

Après l'annonce par les Etats-Unis du prochain retrait de leurs troupes de Syrie, les combattants kurdes, redoutant une offensive turque, ont appelé, fin décembre, le régime syrien à déployer son armée à Minbej. Damas a annoncé le jour même un déploiement de ses forces dans la région.

La Turquie, soutien des rebelles qui cherchent à renverser le président syrien Bachar Al Assad, voit d'un mauvais œil toute tentative du régime de gagner du terrain dans des zones qui échappent à son contrôle dans le nord de la Syrie à la faveur du retrait américain attendu.

Minbej fait par ailleurs l'objet d'une feuille de route arrêtée en mai par Washington et Ankara pour apaiser les tensions, prévoyant notamment le retrait des YPG de Minbej et la mise en place de patrouilles conjointes américano-turques, qui ont démarré en novembre. «L'objectif de la feuille de route de Minbej est clair», a relevé H. Aksoy. «Les YPG se retirent de Minbej, les armes seront récupérées par les Etats-Unis et Minbej sera gouvernée par ses résidants.» Il a aussi annoncé que le chef de la diplomatie turc, Mevlüt Cavusoglu, se rendra à Washington pour une réunion de la coalition internationale contre l'EI le 6 février prochain.

Depuis 2011

Depuis le début du conflit en Syrie, la Turquie réclame l'établissement d'une zone tampon ou de sécurité dans le Nord syrien, pour faire face à l'afflux de réfugiés et empêcher toute possibilité d'émergence d'une région autonome kurde à sa frontière. Ainsi, le 29 novembre 2011, le ministre des Affaires étrangères turc à l'époque, Ahmet Davutoglu, affirme que la Turquie pourrait décider, en coordination avec la communauté internationale, d'imposer une zone tampon à sa frontière avec la Syrie en cas d'afflux massif de réfugiés fuyant le conflit.

Pays avec lequel elle partage une frontière de 900 kilomètres. L'idée d'une zone tampon a été évoquée par les médias turcs pour protéger les populations civiles face à la répression du président Al Assad. Principale coalition de l'opposition, le Conseil national syrien (CNS) a de son côté évoqué une aide extérieure pouvant prendre la forme d'une zone tampon ou d'une zone d'exclusion aérienne pour protéger les civils.

Le 26 juillet 2012, l'actuel président turc, Recep Tayyip Erdogan, alors Premier ministre, accuse Damas d'avoir «confié» cinq zones du Nord syrien au PKK et à sa branche syrienne, le Parti de l'union démocratique (PYD), pour nuire aux intérêts turcs. «Une zone de sécurité, une zone tampon, tout cela fait partie des alternatives que nous avons», déclare-t-il. A la mi-juillet, l'armée syrienne se retire, sans combattre, de certaines régions kurdes où des militants proches du PKK se sont déployés, provoquant l'ire de la Turquie.

Le 30 août 2012, Ahmet Davutoglu demande au Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies (ONU) la création de «camps pour personnes déplacées à l'intérieur de la Syrie» afin de retenir les candidats à l'exil. Mais sa demande est accueillie avec réserve. Le 9 octobre 2014, Mevlüt Cavusoglu réclame «une zone de sécurité, une zone d'exclusion aérienne». «C'est important pour des raisons humanitaires et pour le succès de l'opération» contre l'EI, soutient-il.

La diplomatie russe réagit en indiquant que l'idée d'une «zone tampon» doit être soumise au Conseil de sécurité de l'ONU. Le 11 novembre 2015, le président Erdogan réitère l'option d'une «zone sécurisée» : «Proclamons une zone nettoyée des terroristes, une zone d'exclusion aérienne, réglons cette affaire.»

Et d'observer le 13 février 2017 : «Notre objectif, ici, c'est une zone de 4000 ou 5000 km2 nettoyée des terroristes.» Le 25 janvier 2017, le nouveau président américain, Donald Trump, évoque l'idée de zones de sécurité, dans un entretien à ABC News. L'établissement de telles zones a déjà été discuté sous l'administration de Barack Obama. Mais les militaires américains ont relevé qu'il faudrait des moyens militaires importants pour les faire respecter.

Le 19 décembre 2018, D. Trump ordonne le retrait des troupes américaines de Syrie. L'annonce intervient alors que la Turquie menace les YPG. Le 13 janvier 2019, Donald Trump appelle à la création d'une «zone de sécurité» de 30 km en Syrie, sans plus de précisions. Pour son homologue turc Erdogan, l'idée est de laisser la Turquie se charger de cette initiative.

Mercredi dernier, le ministre des Affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, affirme que le nord de la Syrie doit passer sous contrôle du régime syrien. De leur côté, les Kurdes rejettent une «zone de sécurité» sous contrôle turc.

[Source: El Watan, Alger, 19jan19]

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