Informations
Equipo Nizkor
        Bookshop | Donate
Derechos | Equipo Nizkor       

25oct17

Español


L'affaire Claudia Julieta Duque constitue bien un crime contre l'humanité, selon le Parquet colombien


Le Parquet général colombien a qualifié de crime contre l'humanité la torture et la persécution accomplies par le Département administratif de sécurité (DAS) contre la journaliste Claudia Julieta Duque et a émis une résolution d'accusation contre Emiro Rojas Granados, ancien sous-directeur du DAS, et Néstor Pachón Bermúdez, ancien détective du renseignement du même organisme.

Répondant à la requête introduite par l'avocat Jorge Eliécer Molano Rodríguez, qui représente la journaliste dans cette procédure, le parquet 189 de la Direction spécialisée dans les violations des droits de l'homme a établi que les faits auxquels la correspondante de Radio Nizkor en Colombie a été soumise entre 2001 et 2004 réunissent les caractéristiques et les éléments requis pour les qualifier de crimes contre l'humanité et a ainsi dicté l'imprescriptibilité de l'action pénale pour cette affaire.

Il s'agit de l'avancée la plus significative dans ce qui constitue déjà plus de seize années de lutte pour la justice dans cette affaire, et du premier cas contre le DAS à être élevé à la catégorie des crimes les plus graves selon le droit pénal international.

Dans sa résolution d'accusation de 142 pages, le Parquet a estimé que la participation aux faits d'Emiro Rojas Granados, ancien sous-directeur du DAS (2002-2005), était établie et l'a renvoyé en justice pour association de malfaiteurs aggravée et torture aggravée contre la journaliste, qui fut persécutée et soumise à de graves actes de torture psychologique en raison de son enquête sur l'homicide de Jaime Garzón Forero, journaliste lui aussi, survenu en 1999.

Rappelons qu'en ce moment, Rojas Granados fait également l'objet d'une enquête pour sa participation au montage qui a détourné l'instruction pénale dans l'affaire de l'assassinat de Garzón, ce que Claudia Julieta Duque avait démontré dans son travail journalistique. Rojas Granados a également porté plainte contre la journaliste pour injure et calomnie dans un procès qui a duré cinq ans et qui n'a été déclaré sans suite qu'en 2009, après que le scandale du DAS a éclaté.

Ainsi, le Parquet a considéré que les raisons étaient suffisantes pour renvoyer Néstor Pachón Bermúdez devant le tribunal pour le crime de torture aggravée. Pachón Bermúdez était détective pour le bureau de renseignement du DAS et conduisait le taxi immatriculé SHH348 qui filait la journaliste en juillet et en août 2001, juste après que celle-ci a été victime d'un enlèvement sous la modalité de la "promenade millionnaire" à cause de son travail, au cours duquel elle a été intimidée et pressée d'abandonner son enquête sur l'affaire Jaime Garzón. La journaliste l'a identifié comme la personne qui l'a le plus surveillée, persécutée et filée aux abords de l'endroit où elle vivait à l'époque.

Cette nouvelle accusation contre des fonctionnaires du DAS marquera l'ouverture d'un troisième procès contre les actes de torture qualifiés de crimes contre l'humanité commis contre la journaliste.

Comme on le sait, depuis 2014, José Miguel Narváez, lui aussi ancien sous-directeur du DAS, ainsi qu'Enrique Ariza Rivas (qui fut déporté en avril depuis les États-Unis, en vertu précisément d'une procédure entreprise par Claudia Julieta Duque auprès du Département de l'Immigration américain) et Giancarlo Auqué De Silvestri (en fuite depuis janvier 2015), anciens directeurs du renseignement du DAS, se trouvent en phase de jugement. De plus, en 2015, Rodolfo Medina Alemán (lui aussi en fuite), ancien responsable de la contre-intelligence, et Ronal Rivera Rodríguez, ancien détective du même bureau, ont été renvoyés devant la justice. Ces deux affaires sont cependant pour l'instant paralysées en raison des manoeuvres dilatoires entreprises par les avocats de la défense.

Le Parquet a en outre décidé la rupture partielle de la procédure afin de poursuivre l'enquête contre Juan Carlos Sastoque, fugitif ancien coordinateur du Groupe spécial de renseignement (G3), réfugié à Miami, et contre William Merchán López, ancien détective de la contre-intelligence, qui au moment de sa capture travaillait comme fonctionnaire du Bureau de protection des victimes et témoins du Parquet général de la Nation et qui est actuellement détenu à la prison La Picota de Bogota.

Les anciens fonctionnaires Carlos Alberto Arzayús Guerrero (ancien directeur du renseignement), Hugo Daney Ortiz (ancien responsable des opérations) et Jorge Armando Rubiano (ancien responsable du développement technologique), qui avaient reconnu leur responsabilité dans la torture psychologique aggravée contre la journaliste, avaient été condamnés en 2014 et 2015 pour les mêmes faits.

Outre l'affaire Claudia Julieta Duque, le Parquet a aussi qualifié de crimes contre l'humanité les homicides des journalistes Guillermo Cano (directeur de El Espectador, décembre 1987), Eustorgio Colmenares (directeur de La Opinión de Cúcuta, mars 1993), et Jaime Garzón (août 19999 ainsi que l'enlèvement, la torture et les violences sexuelles dont fut victime Jineth Bedoya en mai 2000.

[Source: Equipo Nizkor / Radio Nizkor, Bogota et Charleroi, 25oct17]

Bookshop Donate Radio Nizkor

DDHH en Colombia
small logoThis document has been published on 26Oct17 by the Equipo Nizkor and Derechos Human Rights. In accordance with Title 17 U.S.C. Section 107, this material is distributed without profit to those who have expressed a prior interest in receiving the included information for research and educational purposes.