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25oct16

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Rapport du Secrétaire général sur les progrès accomplis par la MANUI (juil.-oct.16)


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Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2016/897

Distr. générale
25 octobre 2016
Français
Original : anglais

Rapport du Secrétaire général présenté en application de la résolution 2299 (2016)

I. Introduction

1. Le présent rapport est soumis en application de la résolution 2299 (2016) du Conseil de sécurité, par laquelle celui-ci m'a prié de lui rendre compte tous les trois mois des progrès accomplis par la Mission d'assistance des Nations Unies pour l'Iraq (MANUI) dans l'accomplissement de toutes les tâches dont elle est chargée. Il fait le point des principaux faits nouveaux ayant trait à l'Iraq et des activités menées par les organismes des Nations Unies dans ce pays depuis la publication de mon rapport du 5 juillet 2016 (S/2016/592).

II. Résumé des principaux faits politiques récents concernant l'Iraq

A. Situation politique

2. Le 15 août, à la suite de la reprise de ses travaux, le Conseil des représentants a approuvé la nomination de cinq nouveaux ministres à la tête des Ministères iraquiens du pétrole, des transports, des ressources hydrauliques, de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique ainsi que de la construction et du logement. D'autres nominations doivent encore être confirmées, notamment aux fonctions clefs de Ministre de l'intérieur, Mohammed el-Ghabban ayant démissionné le 5 juillet, et à celles de Ministre de la défense et de Ministre des finances, le Conseil des représentants ayant retiré sa confiance à Khaled el-Obeidi et Hoshyar Zebari les 25 août et 21 septembre respectivement. La nomination d'An Nafi Aoussi aux fonctions de Ministre de la construction et du logement porte le nombre de femmes au Conseil des ministres à deux sur les 17 ministres dont la nomination a été approuvée par le Conseil des représentants.

3. Les 30 juillet et 25 août, respectivement, le Conseil des représentants a adopté deux lois importantes (une loi sur l'interdiction du Parti baas et une loi d'amnistie générale), toutes deux s'inscrivant dans le cadre de l'accord politique national de 2014 et du programme du Gouvernement iraquien. La première porte interdiction du Parti baas et de tout autre parti ou entité qui incite au racisme, au terrorisme, à l'idéologie takfiriste ou à l'épuration confessionnelle, en fait leur apologie ou les encourage. La seconde prévoit l'amnistie d'un certain nombre d'infractions mineures et porte création d'un mécanisme d'examen judiciaire qui, à la demande, peut permettre la révision d'un procès ou l'ouverture d'une nouvelle enquête si les procédures pénales initiales ont été engagées sur la base de témoignages anonymes, ou en cas d'aveux obtenus par la force. L'adoption de la loi d'amnistie générale a tout particulièrement prêté à controverse, d'importants désaccords ayant opposé les partis politiques quant à l'exemption des crimes terroristes et aux restrictions supplémentaires limitant la possibilité de rouvrir une enquête au titre du mécanisme d'examen judiciaire. Les compromis de dernière minute entre l'Alliance nationale et la Coalition des forces iraquiennes ont permis d'amender les articles les plus litigieux et d'adopter la loi. Un certain nombre de partis au sein de l'Alliance nationale continuent de critiquer la loi, affirmant qu'elle conduira à la libération de terroristes condamnés.

4. Le Conseil des représentants a continué d'examiner les allégations de corruption et de mauvaise gestion portées contre de hauts fonctionnaires du Gouvernement. Le 1er août, le Ministre de la défense qui était alors en fonctions, Khaled el-Obeidi, a été interrogé par des parlementaires au sujet d'allégations de corruption et de concussion, notamment dans le cadre de contrats de défense. Au cours de cet interrogatoire, le Ministre a réfuté les accusations portées contre lui et accusé plusieurs parlementaires éminents, notamment Salim el-Jubouri, le Président du Conseil des représentants, de corruption dans le cadre de contrats militaires. En date du 2 août, le Premier Ministre Haider al-Abadi a demandé à la Commission pour l'intégrité d'enquêter sur ces allégations. Le Président du CDR a, quant à lui, prié, le 9 août, le Conseil de lever son immunité pour qu'il puisse comparaître devant le tribunal d'instruction chargé d'examiner les accusations portées par le Ministre de la défense. À l'issue de la comparution du Président du Parlement devant le tribunal d'instruction, l'action engagée contre lui a été abandonnée. Le 29 août, après la destitution du Ministre de la défense en date du 25 août, le chef d'état-major par intérim de l'armée iraquienne, Othman el-Ghanimi, a été nommé aux fonctions de Ministre de la défense par intérim.

5. Le 25 août, le Ministre des finances qui était alors en fonctions, Hoshyar Zebari, a été interrogé par le Conseil des représentants au sujet d'allégations de détournement de fonds publics à des fins personnelles et de versement de fonds à la Région du Kurdistan, en violation de la loi de 201 5 sur le budget fédéral. Le 27 août, le Conseil des représentants a jugé que les réponses fournies par Hoshyar Zebari ne suffisaient pas. Le 6 septembre, le Premier Ministre a déclaré que le Conseil avait outrepassé son rôle d'examinateur en tentant de destituer le Ministre des finances. Toutefois, le 21 septembre, le Conseil a adopté, par un vote au scrutin secret, une motion de défiance à l'égard de M. Zebari. Celui-ci a annoncé qu'il ferait appel de cette décision devant la Cour suprême fédérale.

6. Les récentes manifestations en faveur de la réforme et de la lutte contre la corruption ont perdu en intensité par rapport à celles qui avaient eu lieu au début de 2016, ce qui est probablement dû à l'essoufflement du mouvement de protestation et aux chaleurs record. Le 15 juillet, tous les regards se sont dirigés vers Bagdad lorsque Moqtada el-Sadr a appelé à organiser « une manifestation populaire pacifique de 1 million d'hommes » à la fin du ramadan. Cependant, le nombre de manifestants, compris selon les estimations, entre 50 000 et 70 000, a été plus faible que prévu.

7. À mesure des progrès militaires réalisés dans la lutte contre l'État islamique d'Iraq et du Levant (EIIL) dans la province de Ninive, on a observé un regain de l'intérêt manifesté par la communauté internationale et en Iraq à l'égard de l'élaboration d'un programme politique, humanitaire et de stabilisation visant à préparer la période qui suivra la libération de la ville de Mossoul et de la province de Ninive. En outre, des discussions politiques et militaires entre Bagdad et Erbil ont abouti à un accord sur la conduite des opérations militaires et la composition des forces militaires en vue de la reprise de la province et de la ville.

8. Le Président iraquien, Mohammed Fouad Massoum, a usé de ses bons offices pour convoquer des réunions de haut niveau avec un petit nombre d'acteurs politiques clefs afin de surmonter les dissensions et de susciter des progrès sur les grands dossiers politiques, notamment en ce qui concerne les questions politiques et administratives qui devront être réglées après la libération de Mossoul et Ninive, la réforme du cadre juridique électoral et le calendrier des élections. Ces efforts se poursuivent.

9. S'agissant des élections, les discussions se sont intensifiées entre les divers partis politiques au sujet du calendrier des élections aux conseils de province, prévues en avril 2017, et des élections au Conseil des représentants, prévues en avril 2018. Alors que certains partis soutenaient que les élections aux conseils de province devaient avoir lieu comme prévu en avril 2017, de nombreux autres ont proposé qu'elles soient reportées et éventuellement tenues en même temps que les élections au Conseil des représentants en 2018 au nom de considérations sécuritaires, opérationnelles et budgétaires. Les débats sur la question se poursuivent.

10. L'Iraq a réalisé des progrès notables dans le renforcement des finances publiques. Le 19 juillet, le Conseil des ministres a approuvé la loi sur la gestion financière, qui est conforme au programme économique du Fonds monétaire international (FMI) dont l'objectif est de stabiliser l'économie iraquienne. Le Conseil des représentants a examiné cette loi en première lecture le 22 septembre. Le 10 septembre, la première revue de l'accord de confirmation approuvé par le Conseil d'administration du FMI le 7 juillet 2016 s'est achevée à Amman. Au terme des discussions, l'équipe du FMI et la délégation du Gouvernement iraquien, composée de représentants des Ministères des finances, du plan et du pétrole ainsi que de la Banque centrale d'Iraq, ont conclu que des progrès suffisants avaient été accomplis dans différents domaines, notamment la réduction des dépenses, l'amélioration de la transparence, la rationalisation des coûts et l'exploitation de certaines ressources non pétrolières.

11. Le 27 septembre, le Conseil des ministres a révisé le projet de budget pour 2017, le ramenant de 100 000 milliards de dinars iraquiens (quelque 83 milliards de dollars) à 90 224 milliards de dinars (quelque 75 milliards de dollars). Il a porté le volume prévu des exportations de pétrole de 3,6 millions de barils par jour à 3,75 millions de barils par jour et leur prix, de 35 à 42 dollars le baril, ce qui reste inférieur de 1 dollar au prix recommandé par le FMI. Le déficit budgétaire prévu pour 2017 est évalué à 5 608 milliards de dinars (quelque 4,5 milliards de dollars), ce qui est inférieur aux 12 000 milliards de dinars (quelque 10 milliards de dollars) estimés par le FMI.

12. Les relations entre le Gouvernement fédéral et le Gouvernement de la Région du Kurdistan se sont améliorées. Le 29 août, le Premier Ministre du Gouvernement de la Région du Kurdistan, Nechirvan Barzani, a conduit une délégation à Bagdad et s'est entretenu avec le Premier Ministre iraquien au sujet de la reprise des exportations de pétrole et du partage des recettes y afférentes. Dans une déclaration publiée le 9 septembre, le Ministère iraquien du pétrole a précisé que la reprise convenue des exportations de pétrole s'inscrivait dans le cadre de l'accord pétrolier initialement conclu entre le Gouvernement fédéral et le Gouvernement de la Région du Kurdistan en décembre 2014, relatif aux exportations de pétrole de la province de Kirkouk à destination du port de Ceyhan (Turquie). Le 28 septembre, le Président de la Région du Kurdistan, Massoud Barzani, s'est rendu à Bagdad pour la première fois depuis juillet 2013 et s'est entretenu avec le Premier Ministre, le Président, le Président du Conseil des représentants et les chefs des formations politiques de l'Iraq. Des questions d'intérêt commun ont été examinées lors d'une réunion avec le Premier Ministre iraquien, notamment les préparatifs de la libération de Mossoul et des questions financières bilatérales.

13. Les travaux en faveur de la reprise des activités du Parlement de la Région du Kurdistan, inactif depuis le 12 octobre 2015, n'ont guère progressé et les différends politiques dans la région n'ont pas cessé. Le 10 août, le Parti démocratique du Kurdistan a proposé une initiative visant à relancer les négociations avec l'Union patriotique du Kurdistan, l'Union islamique du Kurdistan et le Groupe islamique du Kurdistan, initiative dont les résultats restent à démontrer. Dans le même temps, l'Union patriotique du Kurdistan et le Mouvement Gorran ont poursuivi la mise en œuvre de leur accord sur le renforcement de la coopération signé en mai 2016. Le 10 septembre, les deux partis ont annoncé leur intention de constituer une formation unique au Conseil des représentants.

B. Sécurité

14. Avec l'appui de la coalition internationale contre l'EIIL, les forces de sécurité iraquiennes, les peshmergas, les forces de mobilisation populaire et des combattants locaux ont fait de nouveaux progrès vers la reprise du territoire occupé par l'EIIL en Iraq. Ils ont notamment remporté plusieurs victoires militaires dans la province d'Anbar et le long de l'axe traversant verticalement l'Iraq, en direction de Mossoul. Entre le 23 et le 25 août, les forces de sécurité iraquiennes ont lancé une vaste opération de reconquête de la ville de Qayyara, au sud de Mossoul, et l'ont mené à bonne fin le 10 septembre. Les autorités iraquiennes ont annoncé le 20 septembre le lancement d'une offensive ciblée en vue de reprendre la ville de Chirqat, dans la province de Salaheddin. Cette opération a été couronnée de succès deux jours plus tard. Malgré ces avancées, l'EIIL demeure actif à plusieurs endroits dans les zones alentour, du nord de Tikrit à Qayyara, notamment dans les faubourgs de Chirqat et de Beiji.

15. Au cours de la période considérée, la situation en matière de sécurité était instable dans l'ensemble de l'Iraq. L'EIIL, dont les ressources et le territoire n'ont cessé de se réduire, a commis en retour un nombre accru d'attentats terroristes. Au total, 44 attentats à la voiture piégée et attentats-suicides à l'explosif ont été perpétrés contre les forces de sécurité iraquiennes, faisant parmi elles 346 morts et 249 blessés. L'EIIL a continué de prendre quotidiennement pour cible des civils : on dénombre à cet égard plus de cinq incidents par jour en moyenne dans le pays. Dans la seule province de Bagdad, 297 attaques à l'explosif ont été signalées, tuant 427 civils et en blessant 1 658 autres.

16. Durant la même période, les attaques visant les personnes déplacées ont été fréquentes. Ainsi, 83 civils sont morts et 100 ont été blessés lors de 23 attentats à la bombe perpétrés dans les provinces de Ninive, de Kirkouk et de Salaheddin. Le 27 juillet, quatre personnes déplacées ont trouvé la mort lors d'une attaque au mortier dirigée contre le camp de Salam, dans le quartier de Dora du sud de Bagdad.

C. Évolution de la situation aux niveaux régional et international

17. L'Iraq a continué de coopérer avec ses voisins, avec la coalition internationale contre l'EIIL ainsi qu'avec l'ensemble de la communauté internationale en vue d'obtenir un appui politique, économique, humanitaire et militaire dans la lutte qu'il mène contre l'EIIL. Par ailleurs, le Gouvernement a continué d'œuvrer à la réalisation de ses objectifs de réconciliation nationale et de réforme, en se saisissant notamment de la question de ses contraintes budgétaires. L'Iraq a gardé un rôle actif au sein d'organisations multilatérales telles que la Ligue des États arabes et l'Union parlementaire des États membres de l'Organisation de la coopération islamique, dont l'Iraq assume la présidence en 2016.

18. Plusieurs hauts responsables du Gouvernement iraquien se sont rendus dans des pays de la région afin d'y approfondir les relations bilatérales de l'Iraq et de solliciter auprès de ces pays un appui politique et militaire. Le Conseiller pour la sécurité nationale iraquien, Faleh Fayad, s'est rendu en République islamique d'Iran le 16 août afin de prendre part à un échange de vues sur les questions bilatérales de sécurité et d'autres questions y afférentes. Peu après, le 21 août, une délégation parlementaire dirigée par le Président du Conseil des représentants a rencontré le Président de la Choura islamique et le Ministre iranien des affaires étrangères afin de s'entretenir avec eux de questions de souveraineté et du combat contre l'EIIL.

19. Après la tentative de coup d'État en Turquie, le Président iraquien a exprimé le soutien de l'Iraq aux institutions démocratiquement élues en Turquie et a dit espérer un retour de la paix et de la stabilité dans ce pays. Le 25 août, le Ministre syrien des affaires étrangères, Walid al -Mouallem, s'est rendu à Bagdad où il a rencontré son homologue iraquien, Ibrahim al-Jaafari, ainsi que le Président et le Premier Ministre iraquiens, pour discuter de la situation en République arabe syrienne et de la lutte contre le terrorisme. En sa qualité de Président de l'Union parlementaire des États membres de l'Organisation de la coopération islamique, le Président du Conseil des représentants a participé au Sommet de la démocratie et de la solidarité à Ankara, le 1er septembre, et s'est entretenu à cette occasion avec son homologue turc Ismail Kahraman et le Président de la Turquie, Recep Tayyip Erdogan, des préparatifs de la libération de la province de Ninive et de la ville de Mossoul, entre autres sujets. Ces efforts visant à améliorer les relations avec les pays voisins ont toutefois enregistré un contretemps lorsque Bagdad a officiellement demandé le remplacement de l'Ambassadeur d'Arabie saoudite à la suite de certaines déclarations de ce dernier concernant les forces de mobilisation populaire iraquiennes.

20. Le 8 août, une délégation de l'Union patriotique du Kurdistan s'est rendue en République islamique d'Iran afin de poursuivre les discussions sur un éventuel accord de construction d'un oléoduc. À la suite des affrontements armés qui ont eu lieu à plusieurs reprises entre le Corps des gardiens de la révolution islamique et le Parti démocratique du Kurdistan à la frontière entre l'Iran et l'Iraq, une délégation du Gouvernement de la Région du Kurdistan dirigée par son Ministre de l'intérieur, Karim Sinjari, s'est rendue le 14 août à Téhéran, où elle a rencontré le Secrétaire du Haut Conseil de la sécurité nationale de la République islamique d'Iran, Ali Shamkhani, afin de s'entendre avec lui sur les moyens à mettre en œuvre pour mettre fin à ces accrochages, lesquels ont pour l'instant cessé.

21. Les 23 et 24 août, le Président de la Région du Kurdistan s'est entretenu à Ankara avec le Président de la Turquie ainsi que son Premier Ministre, Benali Yildrim, de questions bilatérales relatives à l'économie et à la sécurité, ainsi que de la lutte contre l'EIIL. La Turquie a fait savoir lors de ces entrevues qu'elle entendait élargir son appui économique à la Région du Kurdistan et promouvoir son partenariat avec cette dernière dans le secteur de l'énergie.

22. Il a été fait état, au cours de la période considérée dans le présent rapport, d'une baisse de l'activité militaire turque, y compris des frappes aériennes contre les positions du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) dans la Région du Kurdistan. Ces frappes visaient principalement certains districts des provinces de Dohouk et d'Erbil. Si aucune victime n'a été signalée, des bâtiments et exploitations agricoles ont été endommagés.

23. Au Sommet de la Ligue des États arabes, qui s'est tenu le 31 juillet à Nouakchott, le Ministre iraquien des affaires étrangères a demandé le retrait des troupes turques d'Iraq. Dans le communiqué publié à l'issue du Sommet, la Ligue a souligné son attachement à l'unité et à l'intégrité territoriale de l'Iraq, auquel elle a offert de l'aider dans sa lutte contre l'EIIL alors que le Ministre iraquien de la défense qui était alors en fonctions venait d'exprimer des préoccupations au sujet de la présence de troupes turques dans le nord du pays au moment des préparatifs de la libération de Mossoul et de la province de Ninive. La coalition internationale contre l'EIIL a par la suite précisé que, d'une part, la participation de troupes turques à la bataille pour la reconquête de Mossoul n'était pas prévue et que, d'autre part, elle respectait la souveraineté de l'Iraq et n'y enverrait aucune troupe étrangère sans l'accord du Gouvernement iraquien.

24. À l'occasion d'une réunion avec son homologue turc, tenue le 18 août en marge de la dix-septième Conférence des chefs d'État et de gouvernement des pays non alignés, tenue sur l'île de Margerita (République bolivarienne du Venezuela), du 13 au 18 septembre 201 6, le Ministre iraquien des affaires étrangères a réaffirmé l'importance du retrait des troupes turques du territoire iraquien. Le 22 septembre, lors de son allocution devant la soixante et onzième session de l'Assemblée générale des Nations Unies à New York, le Premier Ministre iraquien a appelé la Turquie à retirer ses forces armées du territoire iraquien, leur présence empêchant selon lui la libération de la province de Ninive. L'Iraq et la Turquie ont entamé des consultations et un dialogue bilatéral afin de parvenir à une solution.

25. Le 17 août, le Président iraquien a fait observer que la Fédération de Russie avait reçu l'autorisation d'utiliser sous certaines conditions l'espace aérien iraquien dans le cadre de ses frappes aériennes contre l'EIIL en République arabe syrienne. Par la suite, lors du point de presse organisé après chaque réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, le Premier Ministre iraquien a précisé que les forces aériennes russes emprunteraient des couloirs frontaliers et qu'il leur serait défendu de survoler les villes iraquiennes.

26. Le 20 juillet, mon Représentant spécial et ma Représentante spéciale adjointe, Coordonnatrice résidente et Coordonnatrice de l'action humanitaire ont assisté à une conférence d'annonce de contributions pour l'Iraq à Washington. Le Ministre iraquien des affaires étrangères représentait son pays à cette conférence, présidée par le Secrétaire d'État des États-Unis d'Amérique, John Kerry, et organisée conjointement avec l'Allemagne, le Canada, le Japon, le Koweït et les Pays -Bas. Mon Représentant spécial et ma Représentante spéciale adjointe, Coordonnatrice résidente et Coordonnatrice de l'action humanitaire ont également assisté à la réunion plénière des ministres des affaires étrangères et de la défense de la coalition internationale contre l'EIIL, tenue le 21 juillet, où les participants ont réaffirmé leur détermination à ébranler puis à vaincre l'EIIL et cherché à affiner leur stratégie commune concernant les personnes ou groupes affiliés à l'EIIL. L'Iraq était représenté à cette réunion par ses Ministres des affaires étrangères et de la défense.

III. Bilan des activités de la Mission d'assistance des Nations Unies pour l'Iraq et de l'équipe de pays des Nations Unies

A. Activités politiques

27. Mon Représentant spécial a poursuivi ses contacts avec des représentants du Gouvernement, des parlementaires, des partis politiques, des représentants de la société civile et des chefs religieux et communautaires afin de favoriser la tenue d'un dialogue politique sans exclusive et la réconciliation nationale. Au cours de réunions avec ses interlocuteurs iraquiens, il a rappelé que la tolérance, la coopération et la réconciliation nationale fondée sur l'égalité et la justice pour tous étaient indispensables pour que la paix et la sécurité soient durables. Il a appelé tous les acteurs politiques à redoubler d'efforts pour surmonter les divisions et à collaborer sans attendre dans le cadre d'un processus politique sans exclusive en vue de réaliser des réformes de fond destinées à renforcer la gestion des affaires publiques, à lutter contre la corruption et à améliorer les conditions de vie de tous les Iraquiens. Afin d'encourager le dialogue et une collaboration plus étroite entre le Gouvernement fédéral iraquien et le Gouvernement de la Région du Kurdistan, il a régulièrement rencontré des représentants des deux gouvernements pour les engager vivement à avancer sur les questions en suspens, telles que les exportations de pétrole et le partage des recettes.

28. Mon Représentant spécial s'est entretenu avec des dirigeants politiques et des chefs de communautés ethniques et religieuses de leurs préoccupations quant aux graves conséquences du conflit en cours contre l'EIIL pour les civils, en particulier les différentes communautés ethniques et religieuses d'Iraq. Il a continué de prier le Gouvernement iraquien et la communauté internationale de faire tout ce qui est en leur pouvoir, dans le plein respect des dispositions applicables du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme, pour mettre fin aux violations généralisées et systématiques perpétrées par l'EIIL, qui peuvent constituer des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité et des actes de génocide, et pour obtenir la libération en toute sécurité des civils encore retenus captifs par l'EIIL, y compris les femmes et les filles issues de communautés minoritaires. Il a souligné la nécessité de fournir un soutien d'ordres psychosocial, médical et autres, en particulier aux personnes ayant subi des violences sexuelles et l'esclavage sexuel. Il a également encouragé le Gouvernement iraquien à examiner les possibilités d'amener l'EIIL à répondre de ses actes aux niveaux national et international et à garantir la préservation des preuves pour qu'elles puissent un jour être présentées devant une juridiction.

29. Des atteintes aux droits de l'homme commises par les forces progouvernementales au cours d'opérations de libération ayant été signalées, mon Représentant spécial a continué d'appeler le Gouvernement iraquien à mener des enquêtes impartiales et efficaces sur les allégations de violence et à amener ceux qui ont commis des violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire à rendre des comptes. Il a en outre souligné que les organes et institutions étatiques compétents étaient tenus de faire régner et de garantir l'ordre public et la sécurité pour l'ensemble des citoyens iraquiens et qu'ils devaient continuer d'assumer cette obligation.

30. En prévision des opérations de libération de la ville de Mossoul et de la province de Ninive, mon Représentant spécial a rencontré des représentants du Gouvernement fédéral iraquien et du Gouvernement de la Région du Kurdistan, des parlementaires de la province de Ninive, des représentants de la communauté turkmène et d'autres communautés ethniques, ainsi que des chefs religieux et communautaires afin d'insister sur la nécessité pour les autorités et les acteurs au niveau local d'accélérer la planification politique pour la période qui suivra la libération. Il a souligné qu'il importait de protéger les civils et leurs biens au cours des opérations militaires et a exhorté toutes les parties au conflit à tout faire pour respecter scrupuleusement le droit international humanitaire et permettre aux civils de quitter les zones concernées en toute sécurité et dans la dignité.

31. Au cours de la réunion plénière conjointe des ministres des affaires étrangères et de la défense des pays membres de la coalition mondiale contre l'EIIL qui s'est tenue le 21 juillet, mon Représentant spécial a invité la communauté internationale à fournir en même temps que l'assistance militaire un appui adéquat aux opérations humanitaires. Il a en outre souligné que des efforts bien dirigés dans les domaines de l'aide humanitaire, de l'atténuation des risques liés aux explosifs, de la stabilisation et de la remise en état pouvaient aider à remporter une victoire durable sur l'EIIL. La protection des civils doit être l'élément prioritaire de cette action.

32. Le 10 août, mes Représentants spéciaux adjoints ont pris la parole à la deuxième Conférence internationale sur les moyens psychologiques et médiatiques de combattre Daech, organisée à Bagdad par le Gouvernement iraquien. Mon Représentant spécial adjoint aux affaires politiques a mis en avant le fait que la menace mondiale que représente l'EIIL continuait de se diversifier. Il a également rappelé qu'il importait de combattre l'idéologie et les activités de l'EIIL en menant une action sur plusieurs fronts et en diffusant des messages de contre-propagande en vue de lutter contre la radicalisation et l'extrémisme violent. Ma Représentante spéciale adjointe, Coordonnatrice résidente et Coordonnatrice de l'action humanitaire, a présenté les mesures concrètes que les forces de sécurité et les forces armées peuvent adopter pour protéger les civils dans les opérations militaires à venir, notamment dans la ville de Mossoul.

33. Le 11 août, ma Représentante spéciale adjointe, Coordonnatrice résidente et Coordonnatrice de l'action humanitaire et le Bureau du Premier Ministre ont signé un accord dont l'objet est d'aider à renforcer les moyens dont dispose le Gouvernement pour déceler les affaires de corruption complexes impliquant des personnalités de haut rang, mener des enquêtes à ce sujet et poursuivre en justice les personnes impliquées. Des progrès ont été accomplis vers la création de deux mécanismes de financement pour les réformes économiques, qui serviront à mobiliser le soutien des donateurs internationaux à l'appui des réformes au sein du Gouvernement fédéral iraquien et du Gouvernement de la Région du Kurdistan. Le 26 septembre, le Gouvernement de la Région du Kurdistan et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) ont signé un accord visant à activer le mécanisme de financement pour la réforme économique dans la Région du Kurdistan. À la date d'établissement du présent rapport, un accord analogue n'avait pas encore été conclu avec le Gouvernement fédéral.

34. Le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) et le PNUD travaillent avec le Gouvernement à l'élaboration de programmes spécialisés de « déradicalisation » des jeunes. Sous la conduite du FNUAP, ces organismes mettent au point un projet pilote dont l'objectif est de former des jeunes influents à la résolution des conflits et aux techniques de médiation.

35. Le 23 septembre, mon Représentant spécial pour l'Iraq a prononcé une allocution à la cérémonie de signature du communiqué conjoint du Gouvernement et de l'Organisation des Nations Unies sur la prévention des violences sexuelles liées aux conflits et la manière d'y remédier. Ma Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles en période de conflit, Zainab Bangura, et le Ministre des affaires étrangères, M. el-Jaafari, en étaient les signataires; les États-Unis étaient représentés par Sarah Sewall, Sous-Secrétaire chargée de la sécurité des civils, de la démocratie et des droits de l'homme. Mon Représentant spécial a souligné qu'il incombait au premier chef au Gouvernement iraquien d'éliminer les violences sexuelles en période de conflit et d'amener leurs auteurs à répondre de leurs actes. Il a également souligné qu'il incombait à l'Iraq d'élaborer un plan d'action afin de mettre en œuvre l'accord et a appelé à la création d'un organe interministériel de haut niveau qui pourrait être un partenaire de l'Organisation des Nations Unies, compte tenu, en particulier, de la suppression du Ministère des affaires féminines en 2015.

36. Le 19 septembre, mon Représentant spécial a participé à la manifestation parallèle au niveau ministériel intitulée « Lutter contre l'impunité : traduire Daech en justice », organisée conjointement par les Gouvernements de l'Iraq, de la Belgique et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord au cours du débat de haut niveau de l'Assemblée générale à New York. Au cours des rencontres qu'il a organisées en marge de la session de l'Assemblée générale, il n'a eu de cesse de souligner qu'il serait essentiel d'amener les auteurs des crimes commis par l'EIIL en Iraq à rendre des comptes pour rendre justice aux victimes et appuyer les efforts de réconciliation.

37. Mon Représentant spécial a collaboré étroitement avec le bloc majoritaire au Parlement, l'Alliance nationale, et son président nouvellement élu, Amar el-Hakim, afin de faire progresser la réconciliation nationale. Le 2 octobre, le Conseil suprême de l'Alliance nationale s'est réuni pour approuver un document portant sur l'initiative pour un compromis national historique sur la paix sociale, rédigé par un comité composé de cinq membres de l'Alliance, et a demandé au Conseil politique de l'Alliance d'examiner à son tour ce document. Le 5 octobre, mon Représentant spécial a fait un exposé au Conseil politique, à sa demande, dans le cadre du processus d'examen que ce dernier a engagé. L'ambiance générale de la réunion était positive et propice au dialogue.

B. Assistance électorale

38. La MANUI a continué de fournir un appui technique à la Haute Commission électorale indépendante dans le cadre des préparatifs des élections aux conseils provinciaux en 2017, notamment pour soutenir le processus de mise à jour des listes électorales. La Haute Commission a créé 683 centres d'inscription sur les listes électorales dans 13 provinces aux fins de ce processus de mise à jour. Au cours de cette période, elle a enregistré et mis à jour les données biométriques de 1 237 118 électeurs. En outre, conformément à la loi sur les partis politiques (loi 36 de 2015), elle a entamé la procédure d'enregistrement des partis politiques pour les prochaines élections. Au 25 septembre, 100 partis politiques (57 ayant participé aux élections de 2014 et 43 ayant été fondés depuis lors) avaient déposé une demande d'enregistrement.

39. Les dirigeants politiques iraquiens ont continué de débattre des réformes à apporter au cadre juridique électoral. Ils ont exprimé, en public et en privé, leur avis sur les domaines susceptibles de réforme, y compris les modifications à apporter au système électoral, la Haute Commission électorale indépendante et la diminution du nombre de sièges dans les conseils provinciaux. Il a également été recommandé à l'occasion de plusieurs colloques sur le rôle des femmes, qui ont donné lieu à des rencontres et à des ateliers, de renforcer les dispositions actuelles de la Constitution afin de garantir qu'au moins 25 % des membres des organes élus soient des femmes. À cet égard, il a été proposé de réserver des sièges aux femmes candidates, en plus des quotas obligatoires. Le calendrier des élections aux conseils provinciaux et au Conseil des représentants a lui aussi fait l'objet d'un important débat.

40. La MANUI a coordonné la tenue d'une rencontre entre des représentants de la Haute Commission électorale indépendante et des membres des cercles diplomatiques à Bagdad le 21 juillet dans les locaux de la Haute Commission. Mon Représentant spécial adjoint aux affaires politiques a représenté la MANUI à cette réunion, au cours de laquelle la Haute Commission a exposé les préparatifs en cours en vue des élections aux conseils provinciaux. Les membres des cercles diplomatiques ont quant à eux réaffirmé leur détermination de soutenir le processus démocratique en Iraq.

C. Faits nouveaux et activités se rapportant aux droits de l'homme

41. Le conflit armé, les actes de violence et le terrorisme ont continué d'imposer un lourd tribut à la population civile iraquienne. Pendant la période considérée, la Mission a recensé au moins 3 001 victimes civiles (967 morts et 2 034 blessés), ce qui porte le nombre total de victimes civiles en Iraq depuis le début du conflit armé en janvier 2014 à au moins 71 123 (23 952 morts et 47 171 blessés).

42. L'Iraq continue de subir des attaques terroristes et autres actes de violence, à un rythme aussi soutenu que lors de la période couverte par mon précédent rapport. Nombre de ces attaques ont été le fait d'inconnus, mais l'EIIL en a revendiqué plusieurs. On peut citer, à titre d'exemple, l'attentat-suicide à la bombe du 24 juillet qui a causé la mort de 14 personnes et en a blessé 22 autres dans le quartier de Khadimiya à Bagdad. Le 28 août, des individus portant des gilets d'explosifs ont visé un mariage célébré à Aïn el-Tamr dans la province de Karbala, faisant au moins 17 morts et 25 blessés, tous issus de la population civile. Le 5 septembre, 13 personnes ont été tuées et 18, blessées, lors d'un attentat-suicide à la voiture piégée mené à Bagdad dans le quartier de Karrada.

43. La MANUI a reçu de nombreuses informations faisant état de graves violations du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire commises contre des civils, notamment par l'EIIL. Les membres de diverses communautés ethniques et religieuses, les femmes, les enfants, les personnes handicapées et les personnes âgées demeurent particulièrement vulnérables.

44. La Mission a continué de recevoir des informations selon lesquelles l'EIIL enlevait, assassinait et persécutait ceux qui s'opposaient à son idéologie ou à son régime. Ainsi, le 30 juillet dernier, l'EIIL aurait enlevé 15 civils du district de Haouija dans la province de Kirkouk au motif qu'ils auraient coopéré avec les forces de sécurité iraquiennes et aidé des civils à fuir les zones qu'il contrôlait. Le 31 août, l'EIIL aurait décapité neuf civils au moyen d'une tronçonneuse dans le district de Tell Afar (province de Ninive) après qu'un tribunal autoproclamé les a accusés d'avoir rejoint un mouvement de résistance. L'EIIL a continué de prendre pour cible les personnes tentant de fuir les zones qu'il contrôle. On estime par exemple à plusieurs centaines le nombre de personnes déplacées qui ont essayé, les 3 et 4 août, de quitter les villages tenus par l'EIIL dans le district de Haouija. Au moins 60 personnes auraient trouvé la mort dans leur tentative de fuite ou après avoir été rattrapés par le groupe.

45. Il a de nouveau été signalé que, pendant la période considérée, l'EIIL pourrait avoir utilisé des agents chimiques militarisés. Le 22 juillet, par suite d'attaques au mortier menées par l'EIIL dans la région de Tell Afar, trois combattants peshmerga auraient souffert de difficultés respiratoires et de douleurs oculaires, l'un d'entre eux s'étant également plaint de brûlures. Les 22 et 23 août, l'EIIL aurait bombardé un village du sous-district de Qayyara dans la province de Ninive. Parmi les habitants du village, 20 personnes auraient souffert de difficultés respiratoires. La MANUI n'a pu vérifier si des agents chimiques militarisés avaient été utilisés.

46. La MANUI a continué de recevoir des informations selon lesquelles des violations des droits de l'homme auraient été commises par des groupes armés liés aux forces de sécurité iraquiennes, des membres des Peshmergas et de groupes apparentés. Le comité créé en juin par le Premier Ministre pour enquêter sur des disparitions qui auraient été constatées à Fallouja n'a toujours donné aucune information quant à ses activités.

47. Les autorités locales iraquiennes ont pris des mesures concernant les expulsions et les obstacles faits au retour des personnes déplacées dans les régions dont ils sont originaires. Ainsi, le 26 juillet, le conseil provincial de Babel a pris la décision de démolir les lieux de résidence des personnes condamnées pour appartenance à l'EIIL, et d'expulser par la force les membres de leur famille de la province. Le 30 août, le conseil provincial de Salaheddin a décidé d'expulser de la province, pour une durée de 10 ans, toutes les familles de personnes soupçonnées d'être liées à l'EIIL et d'empêcher le retour des familles résidant hors de la province dès lors qu'un seul de leurs membres est associé au groupe. La MANUI a écrit au Premier Ministre pour lui faire part de son inquiétude face à cette évolution, soulignant que l'Iraq, en tant que signataire du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ne peut agir en violation du droit humanitaire et des normes impératives du droit international ni donc imposer de telles peines collectives.

48. Les frappes aériennes et les tirs d'artillerie ont continué de faire des victimes parmi la population civile. La MANUI n'a cependant pu établir avec certitude ni le nombre exact de victimes, ni la responsabilité de ces bombardements. Le 15 août, deux frappes aériennes ont visé les quartiers nord de Mossoul. La première a causé la mort de 8 personnes, dont 1 enfant, et fait 12 blessés; 8 membres de l'EIIL ont également été tués. La deuxième, ayant touché un immeuble, a entraîné la mort de 5 civils et causé des blessures à 35 autres, parmi lesquels 3 enfants. L'EIIL disposait d'un bureau dans cet immeuble, qui abritait aussi des bureaux civils et des commerces.

49. L'Iraq a continué d'appliquer la peine de mort aux personnes condamnées pour divers crimes qui en sont passibles. Des exécutions ont eu lieu à la prison centrale de Nassiriya dans la province de Dhi Qar. Quatre détenus auraient été exécutés le 17 août. Le 21 août, les autorités iraquiennes ont procédé à l'exécution de 36 hommes condamnés pour avoir participé au massacre du camp Speicher en juin 2014. Le 31 août, sept étrangers condamnés pour appartenance à Al-Qaida ont eux aussi été exécutés. Selon des informateurs et les médias locaux, trois autres étrangers auraient été exécutés le 8 septembre à la prison centrale de Nassiriya. L'Organisation des Nations Unies a demandé à maintes reprises au Gouvernement iraquien d'imposer un moratoire sur toutes les condamnations à mort et exécutions, compte tenu en particulier des failles du système de justice pénale iraquien et du risque de non-respect des normes internationales en matière de régularité des procédures et de droit à un procès équitable.

50. La MANUI a continué d'être informée ponctuellement de cas de recrutement et d'emploi d'enfants par des groupes armés. Le 31 août, après que des cas de recrutement d'enfants dans au moins un camp de déplacés lui ont été signalés, ma Représentante spéciale adjointe pour les affaires humanitaires a rappelé dans une déclaration qu'il est absolument inacceptable que des enfants participent à des combats armés. L'Équipe spéciale pour la question du sort des enfants en temps de conflit armé, qui est coprésidée par la Mission et le Fonds des Nations Unies pour l'enfance, a reçu des informations faisant état de 62 cas de violation des droits fondamentaux des enfants au cours de la période allant du 1er juillet au 25 septembre, qui concerneraient 151 enfants. La plupart des faits signalés auraient eu lieu dans les provinces de Bagdad, d'Anbar et de Ninive au cours d'opérations militaires. Seules 29 de ces allégations, concernant 42 enfants, avaient pu être vérifiées à la date d'établissement du présent rapport.

51. Les meurtres et les atteintes à l'intégrité physique sont restés les violations les plus fréquemment signalées; il a été confirmé que 23 enfants avaient été tués et 15 autres, mutilés. Des informations selon lesquelles 89 autres enfants auraient été tués et 18, mutilés, restent encore à vérifier. Les décès d'enfants ont pour la plupart été causés par des attentats à la bombe, principalement dans les provinces de Bagdad, Ninive et Salaheddin. L'Équipe spéciale a également reçu des informations faisant état d'un attentat contre une école et de quatre autres perpétrés contre des hôpitaux pendant la période considérée, et a pu vérifier quatre cas présumés de recrutement et d'emploi d'enfants.

52. Le 3 août 2016, ma Représentante spéciale chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit a publié une déclaration marquant le deuxième anniversaire des événements tragiques survenus à Sinjar, où l'EIIL a pris pour cible des civils, qui comprenaient de nombreux membres des communautés yézidies, ainsi que des membres des communautés turkmène et shabak chiites et de la communauté chrétienne, et soumis des centaines de femmes et de filles à des violences sexuelles, les ont réduites en esclavage, les ont enlevées ou en ont fait des victimes de la traite; le groupe poursuit encore ces activités à ce jour. Elle a exhorté tous les responsables religieux et communautaires de la région à faire usage de leur autorité morale pour aider les familles et les communautés à comprendre que l'opprobre et la honte liés au viol ne doivent jamais frapper la victime mais bien l'agresseur.

53. Le FNUAP a continué d'aider le Centre du Département de la santé de la province de Dahouk à fournir l'assistance médicale nécessaire, notamment en matière de santé mentale et de soutien psychosocial, aux personnes ayant subi des violences sexuelles. Il a fait état, à cet égard, d'une augmentation du nombre des signalements enregistrés dans les lieux qui proposent ces services. Plus de 600 personnes ont déjà pu en bénéficier, ce qui s'explique notamment par l'amélioration de la sécurité des services, la mise en place de moyens de transport, la participation de membres de la communauté yézidie au système de prise en charge et l'amélioration des dispositifs d'orientation.

54. Le 20 juillet, l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes a lancé, conjointement avec le Gouvernement de la Région du Kurdistan, un programme en faveur des femmes, de la paix et de la sécurité destiné à intensifier les efforts déployés pour mettre en œuvre le plan d'action national relatif à la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité. Dans le cadre de ce programme, les personnes ayant subi des violences sexuelles et sexistes auront accès aux services de protection disponibles dans les 26 bureaux locaux de la Direction générale de la lutte contre les violences faites aux femmes, relevant du Ministère de l'intérieur du Gouvernement de la Région du Kurdistan. Le 1er septembre, le Gouvernement fédéral iraquien et le Gouvernement de la Région du Kurdistan ont organisé conjointement une conférence à Erbil pour présenter les programmes d'application élaborés par les différents ministères concernant le plan d'action national. Ont assisté à la conférence des représentants du Gouvernement iraquien, du Gouvernement de la Région du Kurdistan, des organisations de la société civile et de la communauté internationale. Les participants ont souligné que le manque de moyens financiers constituait l'un des principaux obstacles à la pleine application du plan d'action national.

D. Camp Nouvel Iraq et camp Hourriya

55. L'Organisation des Nations Unies a continué de suivre la situation humanitaire des résidents du camp Hourriya. Les derniers résidents du camp ont quitté l'Iraq le 21 septembre 2016, date qui marque l'achèvement du processus de réinstallation de 3 072 personnes hors de ce pays. La réinstallation de l'ensemble de la population du camp a été possible grâce à un accord et à l'octroi de fonds aux fins de la réinstallation de tous les résidents hors d'Iraq en 2016.

E. Aide humanitaire, stabilisation et développement

56. La crise humanitaire qui sévit en Iraq reste l'une des plus complexes et des plus vastes du monde. Plus de 10 millions d'Iraquiens ont actuellement besoin d'être aidés d'une manière ou d'une autre. Chaque mois, les partenaires humanitaires fournissent une aide à 1 million de personnes en moyenne partout dans le pays. D'ici à la fin de l'année, selon l'ampleur et la durée des opérations militaires à Ninive, on estime que 12 à 13 millions d'Iraquiens auront besoin d'une aide humanitaire.

57. Les combats restent synonymes de déplacement massif et de grave danger pour les civils. Depuis la mi-juin, plus de 100 000 civils ont été déplacés et l'on estime que des centaines de milliers d'autres fuiront leur foyer dans les mois à venir. De nombreuses familles déplacées se sont vues contraintes de parcourir de longues distances sous une chaleur extrême et dans des conditions éprouvantes afin de gagner un lieu sûr. Lors de l'une des plus grandes vagues de déplacement au cours de la période à l'examen, plus de 40 000 personnes ont cherché refuge au camp de Debaga, dans la province d'Erbil. Toutefois, des milliers d'hommes et de garçons qui ont été soumis à des contrôles de sécurité ne peuvent pas rejoindre leur famille dans les sections principales du camp du fait du surpeuplement alarmant. Les familles qui fuient les zones contrôlées par l'EIIL font l'objet de contrôles de sécurité exercés par les autorités gouvernementales, et souvent aussi par des forces affiliées. Les informations provenant de sources fiables selon lesquelles des garçons et des hommes séparés de leur famille et retenus dans des conditions pénibles sur certains sites sont extrêmement préoccupantes. Les civils restent exposés aux tirs d'artillerie et aux feux croisés. Le 18 août, des obus de mortier ont touché un site de contrôle de sécurité au nord de Beiji, tuant 14 personnes et en blessant 35 autres, dont plus de 20 déplacés, d'après les informations disponibles.

58. Fait encourageant, les familles qui étaient bloquées depuis novembre 2015 entre les lignes de front à l'est du mont Sinjar (province de Ninive) ont été autorisées à quitter cette zone en juillet et réinstallées dans le camp de Debaga. Le retour des personnes déplacées dans leur foyer d'origine s'accélère. Sur les plus de 3,4 millions de personnes déplacées depuis la montée en puissance de l'EIIL, près de 900 000 sont désormais de retour chez elles. Quelque 8 000 personnes ont déjà regagné Fallouja, même si la majorité des plus de 85 000 personnes qui avaient fui la ville en mai et en juin restent tributaires de l'aide humanitaire pour leur survie et vivent dans des camps et des sites à Amiriyet el-Fallouja, Habbaniya et Khalidiya (province d'Anbar).

59. Sous la direction de mon Représentant spécial adjoint, Coordonnateur résident et Coordonnateur de l'action humanitaire, et en en étroite concertation avec les autorités gouvernementales à Bagdad et Erbil, les partenaires humanitaires se préparent aux conséquences humanitaires des opérations militaires qui vont être lancées pour reprendre la ville de Mossoul. Dans le pire des cas, 1,2 à 1,5 million de personnes pourraient être touchées pendant cette campagne militaire. En fonction de l'ampleur des destructions et du nombre de personnes déplacées, l'opération humanitaire menée à Mossoul pourrait être la plus vaste menée dans le monde en 2016.

60. En juillet, afin de préparer l'opération de Mossoul, les partenaires humanitaires ont lancé un appel éclair visant à recueillir 284 millions de dollars, la moitié seulement de ce montant ayant été reçue à la fin du mois de septembre. Le financement d'éléments clefs du plan de Mossoul, à savoir la construction de camps d'urgence, l'approvisionnement en eau et l'assainissement et les soins de santé, fait cruellement défaut. L'opération humanitaire dans son ensemble reste gravement sous-financée. En janvier 2016, l'Organisation des Nations Unies et ses partenaires ont lancé un appel de fonds de 861 millions de dollars pour porter secours à 7,3 millions de personnes dans tout le pays. Jusqu'à présent, 54 % des fonds nécessaires, soit 463 millions de dollars, ont été reçus. Plus de la moitié des programmes prévus en 2016 dans le cadre du plan d'action humanitaire ont été supprimés ou n'ont pas du tout commencé. Au cours des trois prochains mois, il sera mis fin à 64 autres programmes d'urgence humanitaire, à moins que les moyens nécessaires ne soient mobilisés. À la conférence d'annonce de contributions pour l'Iraq organisée le 20 juillet pour lever des fonds en faveur de l'aide humanitaire, de l'atténuation des risques liés aux explosifs et de la stabilisation, les promesses de contributions se sont élevées à plus de 2 milliards de dollars.

61. Plus de 850 000 personnes déplacées depuis le début du conflit avec l'EIIL sont rentrées chez elles dans les zones nouvellement libérées, dont 200 000 à Ramadi (province d'Anbar), libérée à la fin de l'année 2015. Le mécanisme de financement du PNUD pour la stabilisation immédiate a été autorisé à mener des activités dans 17 villes et districts libérés et a étendu ses opérations aux zones récemment libérées de Ramadi, Fallouja et Karma dans la province d'Anbar, ainsi qu'à Qayyara dans la province de Ninive. Des milliers d'hommes et de jeunes gens récemment rentrés sont employés dans des brigades chargées de dégager les décombres et de remettre en état les bâtiments et voies publics. Des subventions ont été allouées à des centaines d'entreprises et des infrastructures publiques essentielles, notamment des centrales électriques, des réseaux électriques et des usines de traitement des eaux, ont été remises à neuf. Une deuxième série de projets de stabilisation, axée sur des projets de moyenne envergure, a été lancée, ce qui permettra de générer un grand nombre d'emplois dans les villes récemment libérées et de stabiliser les passages entre les districts libérés.

62. La présence d'un nombre élevé de munitions non explosées et d'engins explosifs improvisés continue de peser sur le rythme de la stabilisation. En faisant fond sur les priorités convenues dans le cadre du Groupe de travail gouvernemental pour la stabilisation, le Service de la lutte antimines de l'ONU a procédé à des évaluations de la menace et effectué des opérations de déminage dans les infrastructures principales, accélérant ainsi les opérations de stabilisation à Fallouja et à Karma. Dans les centres d'accueil, il sensibilise les familles déplacées au danger des mines pour garantir leur sécurité lorsqu'elles retournent dans les zones nouvellement libérées. En tant que chef de file du sous-groupe sur la lutte antimines, le Service a mis au point pour Mossoul un plan humanitaire de lutte antimines qui s'inscrit dans le cadre de l'action humanitaire à plus grande échelle.

63. Le 17 juillet, le Comité du patrimoine mondial de l'UNESCO a inscrit les marais de Mésopotamie du sud de l'Iraq et les trois sites sumériens d'Our, Warka et Erido sur la liste du patrimoine culturel et naturel de valeur universelle exceptionnelle. Cette désignation, qui couronne les efforts déployés pendant plus de 10 ans par le Gouvernement iraquien, avec le concours de l'UNESCO, constitue un pas important pour ce qui est de garantir l'engagement national et l'aide internationale en vue de concilier la préservation d'un patrimoine fragile d'un point de vue environnemental et archéologique d'une part et le développement économique d'une région pauvre d'autre part.

F. Sécurité et questions opérationnelles

64. Le système des Nations Unies continue d'intervenir dans un environnement très dangereux et de mettre en œuvre des programmes et des activités en donnant la priorité aux plus importants. À mesure que davantage de zones sont reprises à l'EIIL, les demandes adressées aux organismes des Nations Unies en matière d'aide à la stabilisation et d'aide humanitaire continueront à augmenter. L'EIIL pratique une guerre de plus en plus asymétrique en attaquant des forces de sécurité et des cibles civiles partout en Iraq, et les programmes et le personnel des Nations Unies restent fortement exposés aux dommages collatéraux.

65. Le système de gestion de la sécurité des Nations Unies fonctionne toujours en collaboration étroite avec les organismes de sécurité de l'administration iraquienne afin de garantir le maintien des mesures de sécurité appropriées pour le personnel humanitaire pendant les opérations de libération du territoire tenu par l'EIIL.

66. La construction à Bagdad d'un nouveau complexe intégré à l'usage du personnel de la MANUI et de l'équipe de pays des Nations Unies est en cours. Plusieurs centaines de bureaux et de logements supplémentaires devraient être disponibles d'ici à juin 2017, qui permettront d'accueillir davantage de personnel à Bagdad et de mieux exécuter le mandat prescrit.

IV. Observations

67. Le peuple iraquien continue d'exiger de façon claire des réformes politiques et économiques et la fin de la corruption. J'appuie les efforts que ne cessent de déployer à cet égard le Premier Ministre et le Gouvernement. Je salue les récentes nominations ministérielles visant à améliorer la gouvernance et les services à la population et demande instamment que les portefeuilles qui restent à attribuer le soient dans les meilleurs délais. Je demande que ces changements soient effectués d'une manière qui garantisse la continuité des institutions publiques et conformément à la Constitution ainsi qu'aux règles et procédures parlementaires. Ils doivent également donner lieu à un dialogue ouvert à tous et à des consultations avec les partenaires politiques, et avant tout répondre aux intérêts et aux besoins du peuple iraquien.

68. Malgré les progrès encourageants qui ont été accomplis, le morcellement des forces politiques, les querelles qu'elles se livrent et leurs luttes intestines continuent d'entamer la capacité des dirigeants nationaux de s'unir pour le bien du peuple iraquien. Je me félicite des efforts que déploie le Président pour forger l'unité et le consensus parmi les dirigeants politiques du pays et je demande à ces derniers de mettre de côté leurs divergences pour agir dans l'intérêt national.

69. Je note avec satisfaction les progrès récemment accomplis dans l'exécution du calendrier législatif du Parlement, avec notamment l'adoption d'une loi portant interdiction du Parti baas et d'une loi d'amnistie générale, qui sont toutes deux conformes à l'accord politique national et au programme du Gouvernement. Cela constitue un pas de plus vers le renforcement de l'État. J'appelle de mes vœux l'adoption d'autres textes fondamentaux, notamment la loi sur la justice et la responsabilité.

70. J'engage de nouveau les dirigeants politiques de la Région du Kurdistan à surmonter leurs dissensions par le dialogue et à s'entendre pour mettre fin à l'impasse politique et normaliser rapidement le fonctionnement du Parlement régional. Il est par ailleurs absolument nécessaire que le Gouvernement fédéral et le Gouvernement de la Région du Kurdistan poursuivent leur dialogue constructif en vue de parvenir à s'entendre durablement sur les exportations de pétrole et le partage des recettes y afférentes, la solde des peshmergas et d'autres questions pendantes. Un tel terrain d'entente permettra aux deux gouvernements de s'attaquer conjointement et efficacement aux problèmes qu'ils partagent aujourd'hui et à ceux qui se feront jour après la libération de l'ensemble du territoire occupé par l'EIIL. Je demande en outre aux deux parties de proposer conjointement des solutions viables pour l'après-EIIL, notamment en ce qui concerne la question des frontières internes contestées, qui soient avantageuses pour l'ensemble des communautés iraquiennes et respectent leurs droits constitutionnels. L'Organisation des Nations Unies reste disposée à prêter son assistance à cet égard.

71. Le Gouvernement iraquien continue de remporter régulièrement des victoires militaires et de regagner du terrain sur l'EIIL, tout en affirmant l'autorité de l'État. En même temps que la planification des opérations militaires, le Gouvernement et les acteurs locaux doivent accélérer la planification politique en prévision de la période qui suivra la libération du territoire occupé par l'EIIL, en s'attelant aux questions de gouvernance, de maintien de l'ordre public et de gestion politique de la ville de Mossoul et du reste de la province de Ninive. Je demande à toutes les forces engagées dans la campagne de Mossoul de donner l'exemple en traitant les prisonniers et les civils conformément aux normes internationales des droits de l'homme, créant ainsi un climat propice à la réconciliation pour l'après-EIIL.

72. J'exhorte les dirigeants de l'ensemble des groupes et communautés à tourner une nouvelle page de l'histoire de l'Iraq, pour faire de la réconciliation nationale et de la paix une priorité absolue. Il reste urgent de parvenir à un compromis politique national. La paix et la sécurité ne pourront être durablement obtenues que si un dialogue sérieux est engagé, pour aboutir à un compromis historique auquel adhéreront, dans un esprit d'égalité, de justice, de tolérance et de coopération, les différents groupes et les différentes composantes du pays.

73. J'invite instamment les dirigeants politiques iraquiens à se concerter en vue d'établir un calendrier définitif pour la tenue des consultations électorales à venir et à donner des précisions sur le cadre juridique régissant ces consultations. C'est indispensable, car il faut que la Haute Commission électorale indépendante dispose de suffisamment de temps pour préparer les élections et que des indications claires soient données à cet égard au peuple iraquien. Je suis convaincu que les dirigeants iraquiens respecteront leurs engagements nationaux et internationaux, notamment en ce qui concerne la tenue d'élections crédibles qui reflètent la volonté du peuple, en adhérant au principe de non-exclusion et en favorisant la participation et la représentation des femmes dans la vie politique. L'Organisation des Nations Unies se tient prête à apporter à cet égard l'assistance technique nécessaire.

74. Tout en reconnaissant qu'il convient, compte tenu de l'évolution des réalités, de réexaminer périodiquement les régimes et les cadres juridiques électoraux, je mets en garde contre un recours à de telles mesures en vue d'obtenir des gains à court terme, qui risquerait de déstabiliser le système politique ou de marginaliser les petits partis politiques. Des débats pertinents, tenant compte des souhaits véritables du peuple iraquien, devraient se tenir en vue de déterminer s'il est réellement nécessaire de modifier l'actuel cadre juridique électoral et, si tel est le cas, quelle forme devrait prendre cette modification.

75. La situation des droits de l'homme en Iraq reste d'une manière générale préoccupante. Les civils subissent chaque jour les effets du conflit armé, du terrorisme et des autres actes de violence. Ils sont toujours les principales victimes de la violence et le nombre de morts et de blessés reste élevé. Je continue de déplorer cette situation inacceptable et l'incessante effusion de sang en Iraq. Je demande à nouveau à toutes les parties de ne ménager aucun effort pour protéger la vie des civils et j'exhorte les Iraquiens à démontrer leur force en restant unis.

76. Je suis préoccupé par l'effet délétère que la violence exerce sur la jouissance d'autres droits, en particulier ceux des femmes, des enfants, des personnes handicapées et des membres des groupes ethniques ou religieux minoritaires. Les cadres législatifs propres à garantir et protéger les droits de ces groupes vulnérables sont inexistants ou insuffisants. Je suis profondément préoccupé par le sort des personnes qui restent captives de l'EIIL, en particulier les milliers de femmes et enfants yazidis, et je demande à tous ceux qui sont engagés dans la lutte contre celui-ci de veiller à ce que la libération en toute sécurité de ces personnes soit un objectif prioritaire des opérations militaires. D'autre part, je prie instamment les autorités iraquiennes compétentes et les communautés d'accueil de prêter l'appui voulu à ces femmes et ces enfants après leur libération afin de faciliter leur retour à la vie normale dans la dignité et leur pleine réinsertion dans leurs communautés.

77. J'affirme à nouveau que les crimes commis par l'EIIL en Iraq, notamment dans le cadre d'une campagne systémique de violences sexuelles et sexistes, peuvent constituer des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité, voire des actes de génocide. Je demande que les personnes impliquées dans de tels crimes soient traduites en justice et j'invite le Gouvernement ainsi que la communauté internationale à continuer d'aider les survivants et à mettre en œuvre, aux niveaux international et national, les mécanismes de responsabilisation qui permettront de faire en sorte que les auteurs de crimes internationaux commis dans le cadre du conflit armé en Iraq soient amenés à répondre de leurs actes. En outre, je prie instamment le Gouvernement de mettre en œuvre des politiques visant à lutter contre l'extrémisme violent et, s'il y a lieu, d'exécuter dans le même temps des programmes spécialisés pour venir tout particulièrement en aide aux milliers de jeunes gens qui ont été exposés à la radicalisation par l'EIIL, de sorte qu'ils puissent être réintégrés dans leurs familles et leurs communautés. Il sera essentiel de continuer à lutter contre l'idéologie de l'EIIL, même lorsque l'intégralité du territoire iraquien aura été libérée. Dans l'immédiat, il est indispensable de veiller à ce qu'aucun élément de preuve ne soit endommagé ou détruit. Il convient de prendre des mesures pour faire en sorte que ces éléments de preuve soient bien étayés et dûment traités en vue de leur utilisation future dans d'éventuelles procédures judiciaires. Mon Représentant spécial continuera de faciliter toute assistance internationale qui serait nécessaire à l'appui de cette action.

78. Je note avec satisfaction la récente signature du communiqué conjoint de l'Organisation des Nations Unies et du Gouvernement iraquien sur la prévention des violences sexuelles liées aux conflits et la manière d'y remédier. Cela constitue une étape importante vers l'adoption d'une approche systématique de la lutte contre ces violences, en particulier les actes commis par l'EIIL contre les communautés minoritaires, qui infligent des souffrances indicibles aux civils et les obligent à s'enfuir de chez eux. Je demande au Gouvernement d'élaborer à bref délai un plan d'action et de désigner une entité qui serait expressément chargée de tracer la voie à suivre pour mettre en œuvre le communiqué conjoint. Je demande également au Gouvernement et à la communauté internationale de répondre aux besoins urgents des victimes de viol et des enfants issus d'un viol en matière de services et de soutien aux moyens d'existence, comme il est préconisé dans le communiqué conjoint.

79. Le respect des droits à la liberté d'expression et à la liberté de réunion, qui constituent le socle d'un État démocratique, doivent être garantis en tant que partie intégrante de l'évolution démocratique et du processus de réforme en Iraq. J'engage instamment l'Iraq à envisager de promulguer, en pleine conformité avec ses obligations internationales, une législation solide qui protège ces droits et à mettre en place des politiques garantissant que les agents de la force publique soient dûment formés au maintien de l'ordre lors de rassemblements publics pacifiques et que la population soit informée de ses droits et responsabilités.

80. L'utilisation par l'EIIL d'agents chimiques militarisés, dont il a été fait état à plusieurs reprises, reste une source de grave préoccupation. Je condamne de tels actes, qui sont interdits par le droit international, et demande instamment que les personnes les ayant commis soient traduites en justice.

81. J'invite instamment les Gouvernements iraquien et turc à redoubler les efforts bilatéraux qu'ils déploient pour trouver, en ce qui concerne la présence des troupes turques dans le nord de l'Iraq, une solution mutuellement acceptable qui respecte pleinement les principes de souveraineté et d'intégrité territoriale de l'Iraq et de non-ingérence dans ses affaires intérieures, et qui garantisse que toutes les activités menées en Iraq soient coordonnées avec le Gouvernement iraquien et pleinement approuvées par celui-ci.

82. Les activités civiles qui sont essentielles pour consolider les progrès accomplis dans le cadre de la campagne militaire contre l'EIIL doivent bénéficier d'une attention et d'un financement accrus. Les progrès de la campagne militaire créent des besoins humanitaires supplémentaires. Je demande aux États Membres de contribuer généreusement aux opérations humanitaires. J'invite instamment les donateurs à répondre sans délai à l'appel éclair en faveur de Mossoul, afin que des préparatifs puissent être faits en vue d'aider le million de personnes qui fuiront probablement la ville. Des ressources supplémentaires, en quantité appréciable, sont également nécessaires au titre du mécanisme de financement pour la stabilisation immédiate établi par le PNUD et pour le Service de la lutte antimines de l'ONU, afin de faire face aux besoins en matière de stabilisation et d'atténuation de la menace due à la présence d'engins explosifs dans la ville. Ce sont là des éléments essentiels pour confirmer les succès de la campagne militaire et pour jeter plus solidement les bases d'un Iraq pacifique et sûr.

83. Je salue l'action menée pour stabiliser les zones nouvellement libérées et souligne qu'il importe de faire en sorte que les conditions soient réunies pour le retour volontaire des familles déplacées en toute sécurité et dans la dignité. Je mesure l'étendue des efforts qu'il faudra déployer à Mossoul et dans les communautés des provinces d'Anbar, de Diyala, de Ninive et de Salaheddine pour reconstruire les bâtiments et installations publics et privés, relancer les services publics et revitaliser l'économie locale. Je demande instamment aux États Membres de contribuer au mécanisme de financement pour la stabilisation immédiate établi par le PNUD.

84. Je me félicite de la récente inscription des marais de Mésopotamie du sud de l'Iraq sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO, et invite l'Iraq à y voir un encouragement à redoubler d'efforts pour préserver son patrimoine naturel et culturel.

85. Je note avec satisfaction que la réinstallation de plus de 3 000 résidents du camp Hourriya est achevée, conformément à la demande du Gouvernement iraquien. Je tiens à remercier ma Conseillère spéciale, Jane Holl Lute, de ses bons offices qui ont abouti au règlement de cette question humanitaire. J'exprime également ma gratitude aux États Membres et aux organisations internationales qui ont appuyé ces efforts.

86. Enfin, je tiens à remercier mon Représentant spécial, Jân Kubis, et le personnel des Nations Unies en Iraq de l'action qu'ils mènent pour aider le Gouvernement et le peuple iraquiens. Je ne doute pas que les partenaires internationaux de l'Iraq, notamment ses voisins, continueront d'aider mon Représentant spécial à s'acquitter de ses fonctions.


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